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Des idées pour adapter notre forêt au changement climatique

Aujourd'hui, nous plantons des arbres qui devront survivre plus de 80 ans. Il ne faut donc pas se tromper. Les scientifiques cherchent des solutions pour capter davantage de CO2 et produire du bois. Exemple dans la forêt d'Orléans où les scientifiques aident les forestiers à faire les meilleurs choix pour demain.
Article rédigé par Anne-Laure Barral
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
  (Nathalie Korboulewski de l'IRSTEA en forêt d'Orléans devant son appareil de mesure © RF | Anne-Laure Barral)

Pour Véronique Bertin, responsable de l’agence Val de Loire de l’Office nationale des forêts (ONF), cet immense domaine forestier est bien sûr très agréable pour les promenades, mais il a aussi une fonction économique bien précise : "L'objectif, c'est bien de produire du bois et alimenter une filière avec différents produits, du bois de chauffage, des planches mais aussi des produits de luxe" , explique-t-elle.   

L’ONF, comme les forestiers privés, sont donc très attentifs à ce que leur forêt continue à produire du bois. Les forestiers privés sont 3,5 millions en France et ils ont 75% de la surface de la forêt en France. Yves Bachelier est conseiller auprès des forestiers privés du Loiret et de la Sologne. Les entreprises forestières qu’il représente doivent penser au long terme et donc à comment leurs arbres subiront les effets du changement climatique : "Aujourd'hui, certains arbres que l'on régénère ne seront récoltables que dans plus d'un siècle, souligne-t-il, donc on sait qu'il ne faut pas se tromper sur l'adaptation de cette essence sur la station."

Prendre le pouls de la nature 

Et pour répondre à cette préoccupation d’avenir, les scientifiques de l’IRSTEA, l’Institut de recherches en science et technologie pour l’environnement et l’agriculture, ont isolé 33 parcelles d’un hectare chacune dans cette forêt. Ils y ont installé de drôles de machines blanches, bourrées de capteurs et d’appareils de mesure. Une façon de prendre le pouls de la nature, explique Nathalie Korboulewsky, de l'IRSTEA : "On étudie l'état de santé de la forêt, tout en prenant compte des conditions environnementales et du micro-climat dans lequel elle pousse. Cela nous permet de déterminer les conditions dans lequelles elle se sent bien et vice-versa." 

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Les équipes de l’IRSTEA vont ainsi récolter 30 millions de donnés par an sur ces 33 parcelles pour tester deux stratégies de cultures forestières : "Les stratégies envisagées sont d'une part la réduction du nombre d'arbres par hectare, posant l'hypothèse que s'il y a moins d'arbres, ils vont consommer moins d'eau, et d'autre part, c'est de les mettre en mélange, deux chênes et deux pins, avec l'hypothèse que ces peuplements seraient plus productifs et seraient plus résistants à des événements climatiques extrêmes ou à l'attaque de ravageurs" , poursuit Nathalie Korboulewski.   

D’ici trois ans, grâce à ces mesures, les scientifiques de l’IRSTEA pourront ainsi conseiller aux forestiers privés et à l’ONF s’il vaut mieux planter plusieurs essences d’arbres ou une seule espèce, s’il vaut mieux les espacer pour que tous aient à boire, au vu des sécheresses qui se profilent, etc. Claude Mannevie, du groupement des forestiers privés du Loiret et de Sologne attend beaucoup de ces recherches : "Nous croyons fortement au mélange chêne-pin , annonce-t-il. Cela permet de ne pas mettre nos œufs dans le même panier et il y a une synergie vraiment intéressante entre deux des essences."

Un hectare de forêt = 37 tonnes de CO2 en moins 

Mais l’IRSTEA cherche en plus du changement climatique à comprendre l’impact des animaux, comme les cerfs ou les sangliers qui peuvent manger les pousses de jeunes arbres, et aussi des espèces invasives. Yann Dumas se penche, lui, sur certaines espèces de plantes et de mousses qui colonisent aujourd’hui les écosystèmes.

Ces dernières arrivent souvent par hasard, mais avec le changement climatique, elles peuvent vite devenir un problème : "C'est un peu introduire le loup dans la bergerie , explique-t-il. On ne les a pas introduites dans ce but-là, on ne savait pas forcément qu'elles allaient avoir cette dynamique. Certaines espèces introduites dans les années 1600 subissaient le climat, le froid les éradiquait, alors qu'aujourd'hui elles ont une dynamique naturelle, puisque le climat a changé. Elles sont désormais capables de provoquer des méfaits qu'on ne connaissait pas à l'époque."

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Les chercheurs essayent donc de comprendre tout ce qui pourrait rendre nos forêts malades à l’avenir afin qu’elles continuent à remplir un rôle essentiel, au-delà de nous fournir du bois, celui de capter les émissions de CO2. Un hectare de forêt, c’est jusqu’à 37 tonnes de CO2 en moins dans l’atmosphère.

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