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Tribune "Boire ou gaspiller, il faut choisir" : "Le gouvernement doit être plus volontariste", selon Cécile Duflot, directrice générale d’Oxfam France

Dans une tribune publiée lundi sur franceinfo, des associations et organisations, dont Oxfam, demandent aux pouvoirs publics comme aux citoyens de prendre la mesure de l'urgence.
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Cécile Duflot, invitée de franceinfo, mardi 17 mai 2022. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

"On n'a pas encore bien mesuré, à quel point les conséquences du dérèglement climatique qu'on vit déjà aujourd'hui vont impliquer un changement d'usage", prévient lundi 5 juin sur franceinfo Cécile Duflot, directrice générale d'Oxfam France, alors que plusieurs associations environnementales appellent dans une tribune publiée lundi sur franceinfo à "repenser urgemment nos usages en eau" face au réchauffement climatique. Attac, Greenpeace France, la Ligue des droits de l'Homme, Oxfam, notamment, demandent aux pouvoirs publics, aux élus et au gouvernement de prendre des mesures de justice pour que tout le monde ait accès à l'eau. Selon l'ancienne ministre du Logement, "le gouvernement doit être plus volontariste".

franceinfo : La France ne s'est pas remise de la sécheresse historique de l'été dernier ?

Cécile Duflot : On a du mal, tous, à comprendre qu'on est entrés dans une période différente. L'eau était considérée comme une ressource très abondante dans laquelle il suffisait de puiser, que ce soit pour irriguer ou pour l'industrie. Maintenant, on sait qu'il faut changer nos façons d'envisager l'eau. C'est un bien commun qui est menacé par le dérèglement climatique aujourd'hui. Les nappes phréatiques si elles ne se rechargent pas en eau, vous n'arrivez pas ensuite à pouvoir consommer de la même manière que vous ne le faisiez auparavant.

"La situation est déjà très difficile dans un certain nombre de territoires, mais même les pluies du début du printemps, qui avait semblé sauver la situation dans le nord de la France, n'ont pas suffi. On est déjà dans une situation où on retrouve des taux de sécheresse importants dans les sols."

Cécile Duflot, directrice générale d'Oxfam France

à franceinfo

Le plan eau du gouvernement avec 53 mesures ne suffit pas ?

Non, parce que je pense que la question, c'est celle de l'ampleur, et notamment le fait qu'il faut dire qu'un certain nombre d'usages qui étaient presque banals, parce qu'on avait de l'eau en abondance, il va falloir y renoncer. C'est ça qu'on n'a pas encore bien mesuré, c'est à quel point les conséquences du dérèglement climatique qu'on vit déjà aujourd'hui, que les pays du Sud vivent déjà énormément, mais que nous aussi nous commençons à vivre, vont impliquer un changement d'usage et en particulier une mutation du secteur agricole qui est à 50% celui qui consomme le plus d'eau en France.

Vous pointez les golfs et les hôtels dotés de piscines ou de spas. Il va falloir choisir entre certaines activités et de l'eau au robinet ?

Quand vous n'avez plus d'eau au robinet, mais que les golfs peuvent continuer à arroser, vous sentez bien que cela génère de la tension. D'ailleurs, c'est ce qui se passe en Espagne qui vit un moment de sécheresse très important. Il commence à y avoir des conflits, y compris physiques, avec des destructions de puits agricoles illégaux. Il faut peut-être changer les plantes qui sont utilisées sur les terrains de golf.

Le but n'est pas de dire que le golf, c'est mal, c'est de se dire, il faut qu'on s'adapte à une baisse de notre ressource en eau. Il va aussi falloir qu'on s'adapte à des moments où il pleuvra de manière extrêmement violente. C'est ça qu'il faut que l'on comprenne, c'est que notre climat change et que ça va être très compliqué.

Peut-on faire confiance aux différents secteurs pour adapter leurs usages ou faut-il durcir les règles immédiatement ?

On voit bien qu'un certain nombre d'élus, dans certaines zones où il faut faire appliquer des restrictions de consommation, ont du mal avec certains individus ou certaines familles qui considèrent qu'ils ont installé un système d'arrosage de leur gazon et qui veulent continuer à le faire fonctionner et veulent remplir leur piscine. Ça ne veut pas dire que c'est facile, mais ça veut dire que si les règles sont fermes et s'appliquent à tout le monde, elles sont beaucoup plus faciles à suivre.

C'est la même chose avec les économies d'énergie. Quand vous dites qu'il faut débrancher votre box, mais que vous avez en face de vous une publicité sur un écran, la question de l'exemplarité et de la justice est essentielle pour faire face à cette question. Si vous dites aux gens 'ne prenez plus de bain' par exemple, mais que vous laissez arroser les golfs ou que vous laissez des gigantesques piscines où l'eau s'évapore parce qu'elles sont extérieures, au profit de quelques-uns, ça ne marche pas. On dit que c'est injuste. Le gouvernement doit être plus volontariste.

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