La justice française déboute des ONG opposées au mégaprojet de TotalEnergies en Afrique de l'Est
Elles n'ont pas obtenu gain de cause. La justice a débouté, mardi 28 février, les six ONG qui avaient assigné TotalEnergies en référé pour son mégaprojet d'exploitation pétrolière en Afrique de l'Est, en jugeant "irrecevables" leurs demandes. Le tribunal estime que les associations n'ont pas respecté les étapes de la procédure en présentant à l'audience en décembre des demandes et des griefs "substantiellement différents" de ceux qu'elles avaient reprochés à TotalEnergies dans une mise en demeure de 2019, point de départ de l'affaire.
"On est extrêmement déçu par cette décision qui retarde de nouveau un jugement sur le fond de l'affaire", réagit Juliette Renaud, militante au sein de l'association Les Amis de la Terre. Elle conteste le motif d'irrecevabilité soulevé par le juge : "Nous avons dû actualiser nos preuves au-fur-et-à-mesure d'une procédure qui s'est allongée à cause de la bataille procédurale lancée par Total."
"Cette décision ne donne pas raison à l'entreprise, le tribunal ne s'est pas prononcé sur le fond."
Juliette Renaud, militante aux Amis de la Terreà franceinfo
Et de préciser que les ONG, qui peuvent faire appel, vont analyser la décision en détail et consulter les communautés concernées avant de décider de la suite.
Une loi pionnière encore peu appliquée
Ces ONG s'attaquaient à deux chantiers indissociables : le projet Tilenga, un forage d'environ 400 puits en Ouganda, dont un tiers dans le parc naturel des Murchison Falls, et le projet EACOP (East African Crude Oil Pipeline), un oléoduc chauffé de 1 500 km reliant le lac Albert à l'océan Indien, à travers la Tanzanie et des aires protégées. Un mégaprojet qui symbolise la volonté de TotalEnergies de continuer à investir dans de nouveaux forages en dépit du réchauffement climatique.
Cette procédure judiciaire était une première. TotalEnergies est en effet soumis à une loi française pionnière de 2017 sur le "devoir de vigilance" des multinationales, qui leur impose de "prévenir les atteintes graves envers les droits humains, la santé et la sécurité des personnes ainsi que l'environnement" dans toutes leurs activités mondiales, y compris chez leurs fournisseurs. Les ONG estimaient que le "plan de vigilance" de l'entreprise bafouait cette loi.
Une autre audience prévue en mars
De son côté, l'entreprise explique répondre à la demande des gouvernements locaux cherchant une alternative profitable au charbon et assure que ce forage, prévu pour 25 ans, ne remet pas en question son objectif de zéro émission nette en 2050. Les travaux ont été entamés en 2022 et les premières gouttes d'or noir sont prévues en 2025.
Le géant pétrolier n'en a toutefois pas fini avec la justice. Dans une autre procédure, le groupe français est encore assignée sur la base du "devoir de vigilance" ; il est cette fois accusé de sous-estimer les "risques d'atteintes graves au système climatique" de ses activités. Une audience est prévue à Paris le 22 mars.
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