Changement climatique : "Il faudra utiliser intelligemment les 2,3 milliards d'euros pour s'adapter", prévient le directeur de l'Institut de l'économie pour le climat
Un rapport de l'Institut de l'économie pour le climat publié jeudi établit que la France devrait investir 2,3 milliards d'euros chaque année pour sa politique d'adaptation au changement climatique.
"C'est deux milliards [d'euros] qu'il va falloir utiliser intelligemment" prévient vendredi 24 juin sur franceinfo Benoît Leguet, directeur de l'Institut de l'économie pour le climat. Selon un rapport de l'institut publié jeudi, la France devrait investir 2,3 milliards d'euros chaque année pour sa politique d'adaptation au changement climatique.
franceinfo : Est-ce que ce rapport signifie que le changement climatique est irréversible, et qu'il faut s'y préparer plutôt que de tenter de l'éviter ?
Benoît Leguet : va falloir à la fois réduire nos émissions de gaz à effet de serre et les ramener, pour la France, à zéro d'ici à 2050. Ça, c'est pour éviter l'ingérable. Et puis, il va falloir gérer les conséquences du changement climatique qui sont déjà là et qui seront là même si on ramène nos émissions de gaz à effet de serre à zéro à l'horizon 2050, mais qui seront quand même "gérables" si on ramène les émissions à zéro rapidement.
On parle de plus de 2 milliards d'euros par an. À quoi seraient-ils utilisés ?
Deux milliards d'euros par an... pour commencer. En fait, c'est deux milliards qu'il va falloir utiliser intelligemment pour faire en sorte que tous les choix d'investissement que nous allons faire dans les prochaines années, que ce soit dans les infrastructures, le transport, le logement, l'aménagement urbain, par exemple, soient à la fois compatibles avec une France neutre en carbone, mais également compatibles avec un climat qui va changer. C'est donc quelques milliards d'euros qu'il va falloir mettre en plus pour s'assurer que tous les investissements, les dizaines, voire les centaines de milliards d'euros d'investissements qu'on va faire dans ces infrastructures, dans ces aménagements urbains, soient adaptés au climat de demain.
En fait, c'est vraiment quelques milliards pour éviter de mal investir quelques centaines de milliards. Nous, on a chiffré vraiment ces opérations. Il va falloir réfléchir à comment on intègre l'adaptation dans les décisions d'investissement. Donc, ça veut dire de l'animation, de la coordination, des politiques d'adaptation. Ça veut dire renforcer les mécanismes de prévention, comme les alertes aux crues, etc. Ça veut dire aussi accompagner les territoires et les différents acteurs qui veulent mettre en oeuvre des stratégies d'adaptation et les aider à comprendre les différents risques, les différentes vulnérabilités.
Concernant la hausse des températures, par exemple, il y a quelque chose à faire ?
Oui, bien sûr. Par exemple, quand on construit des bâtiments, il ne s'agit pas seulement de les faire en confort d'hiver, c'est-à-dire peu consommateurs d'énergie, il faut également les faire en confort d'été. Il faut se dire que le climat que devront subir ces bâtiments, par exemple des logements, ne sera pas tout à fait celui qu'on connaît aujourd'hui. Et donc en situation de canicule, comment fait on pour faire des bâtiments, des logements, qui sont encore habitables, vivables ? Là aussi, il va falloir travailler. Il y aura certainement un surcoût pour faire en sorte que ces bâtiments soient adaptés.
Il y a bien une solution, c'est la généralisation de la climatisation. Mais ça ne va pas aider ?
Avec la généralisation de la climatisation, on est typiquement dans ce qu'on appelle la "mal-adaptation". Si on climatise, on va augmenter le besoin en énergie. Et donc, cette énergie, il va falloir la produire. Cela risque d'émettre des gaz à effet de serre. En fait, il faut trouver des solutions qui s'adaptent "pour de vrai" et qui n'aggravent pas un problème par ailleurs. Ce n'est pas dans la climatisation, par exemple, que réside la solution. C'est peut être plus dans la construction des bâtiments, dans l'aménagement urbain. Pour vous donner un exemple très concret : une cour d'école, si on veut qu'elle soit plus fraîche, il faut la végétaliser et la déminéraliser. À mon avis, c'est peut-être prioritaire par rapport au fait de climatiser.
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