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Essai nucléaire : "Pendant des années, beaucoup d'experts ont sous-estimé la capacité nucléaire nord-coréenne"

Selon le journaliste Dorian Malovic, auteur de "La Corée du Nord en cent questions", face à l'annonce de la Corée du Nord d'avoir testé une bombe H, "la communauté internationale est démunie".

Article rédigé par franceinfo
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Un écran diffuse des informations de la télévision japonaise sur un essai nucléaire en Corée du Nord, le 3 septembre 2017, à Tokyo (Japon).
 (ED JONES / AFP)

La Corée du Nord a annoncé, dimanche 3 septembre, avoir testé une bombe H. Cet essai, que le régime qualifie de "réussite parfaite", a été confirmé par le Japon. Il s'agit du sixième essai de ce type depuis 2006.

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Dorian Malovic, chef du service "Asie" au quotidien La Croix et auteur de La Corée du Nord en cent questions, estime que cet essai est la conséquence du fait que, "pendant des années, beaucoup d'experts ont sous-estimé la capacité nucléaire nord-coréenne".

franceinfo : Cette explosion est 9,8 fois plus puissante que le dernier essai. Est-on ici dans le cadre d'une escalade ?

Dorian Malovic : D'une escalade de point de vue de la communauté internationale et du côté nord-coréen. On est dans une étape majeure de maîtrise de la bombe nucléaire. Quand vous imaginez que le premier test, en 2006, était d'une kilotonne et là, on est à plus de cent kilotonnes. En plus d'une dizaine d'années, la Corée du Nord a fait des progrès considérables. Aujourd'hui, la communauté internationale fait face à une réalité qu'il va falloir intégrer dans les nouveaux logiciels. Pendant des années, beaucoup d'experts ont sous-estimé la capacité nucléaire nord-coréenne en disant que c'était du bluff, des écrans de fumée. Maintenant, force est de constater qu'ils ont au moins, selon les experts, vingt à trente têtes nucléaires. Ils ont le matériel fissible pour en fabriquer, et là, le danger est de savoir, comme vient de l'annoncer la télévision nord-coréenne, s'ils peuvent miniaturiser ce nucléaire et le mettre sur un missile intercontinental. La communauté internationale va-t-elle réagir très fortement ? On est face à quelque chose, aujourd'hui, qui est très difficilement maîtrisable.

La communication du pays a-t-elle évolué en 11 ans ?

Tout à fait. La Corée du Nord a avancé "masquée" pendant des années. La narration, le storytelling américain a été de mépriser quelque peu cette nation pauvre, sous-développée, qui a vécu une énorme famine dans les années 1990, après la chute de l'URSS, et on ne prenait pas au sérieux ce petit pays. Dans tous les logiciels des experts de la prolifération, un pays comme la Corée du Nord ne pouvait pas avoir la maîtrise du nucléaire, faire des missiles et maîtriser l'atome. Aujourd'hui, elle a la maîtrise : ça fait quand même plus d'un an et demi, deux ans, qu'on voit que ce ne sont plus des écrans de fumée comme on a voulu nous le faire croire, et que, face à cette réalité, la communauté internationale est démunie.

Quel va être, à votre avis, le rôle de la communauté internationale dans les jours qui viennent ?

Il se trouve qu'il va y avoir une conférence des pays BRICS [groupe de pays, acronyme de Brésil, Russie, Inde et Chine, remplacé par BRICSAM depuis l'adhésion de l'Afrique du Sud et du Mexique en 2011] à Pékin qui s'ouvre demain, donc vous avez la Chine, la Russie, l'Inde, l'Afrique du Sud qui se réunissent. Il va y avoir une condamnation de leur part, de la Chine et de la Russie c'est incontestable. Nous allons avoir, de façon très pavlovienne, une réaction de la communauté internationale japonaise, sud-coréenne, américaine, jugeant ce sixième essai comme "inacceptable", impardonnable", "intolérable". Je m'avance peut-être un peu, mais on a vu ce scénario : on va probablement avoir, une réunion d'urgence du Conseil de sécurité, et nous allons probablement avoir de nouvelles séries de sanctions, probablement sur le pétrole, mais ceci dit, ça ne réglera pas le problème du nucléaire nord-coréen.

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