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COP21 : en Inde, vivre au milieu des centrales à charbon

Comment convaincre tous les pays qu’il faut sauver le climat ? Tous les pays ne sont pas encore prêts à faire les mêmes efforts. Ainsi l’Inde qui a comme priorité l’accès à l’énergie pour tous même si cela doit passer par la construction de très polluantes centrales à charbon. Reportage près de Mundra sur la côte nord-ouest de l’Inde.
Article rédigé par Anne-Laure Barral
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
  (Navim, un jeune pêcheur,, devant les centrales à charbon de Mundra © RF/ Anne-Laure Barral)

 Le village de Bhadreshwar est plutôt rudimentaire. Il n’y a pas de toilettes, pas d’électricité. Les habitants rechargent leur portable grâce à quelques panneaux solaires.  Ici les pêcheurs vont plutôt pêcher à pied en laissant la marée apporter dans leur filet les poissons. Juste derrière ce village de 3000 habitants, une immense cheminée se dessine dans la brume de pollution, celle d’une centrale au charbon construite ici en 2006.  En 10 ans les habitants des villages près de Mundra ont vu les usines poussées comme des champignons : trois sur à peine 40 km de côte. Cela a énormément limité leur accès à la mer, les arbustes de la mangrove ont été arrachés pour creuser un canal et des criques ont été remplies de terre pour faciliter l’arrivée du charbon par bateau.

COP21 : en Inde, vivre au milieu des centrales à charbon - reportage Anne-Laure Barral

"Depuis que nous avons les usines nous avons beaucoup de services"

"Avant il y avait plein de poissons, maintenant je n’attrape plus rien. Je pense que c’est à cause des rejets d’eau chaude de la centrale" estime  Navim, jeune pêcheur du village de Koutari. En effet en 10 ans le nombre de poissons pêchés a baissé de moitié. En plus les villageois soupçonnent des rejets chlorés. Mais les industriels réfutent. Ils respectent les normes même si la presse n’est pas la bienvenue dans leurs usines. Il faut dire que récemment l’une d’entre elles a dû stopper ses rejets sur décision de justice. "Nous avons porté plainte à Dehli et nous avons gagné. S’ils recommencent nous nous battrons. Nous brûlerons leur voiture s’il le faut ", tempête Amina, 62 ans, qui vit depuis toujours près de Mundra.

La situation est toujours très tendue et les pêcheurs n’ont pas le soutien de toute la population. "Depuis que nous avons les usines nous avons beaucoup de services : de bonnes routes, des médecins. C’est bien pour le développement de Mundra", estime Anwar qui tient un hôtel restaurant dans la ville. Mundra pourrait devenir le deuxième port industriel du pays. Plus de deux cents personnes travaillent à la centrale de la ville qui compte aujourd’hui 15.000 habitants contre quelques milliers il y a dix ans.

  (Les centrales à charbon ont poussé comme des champignons juste derrière les villages des pêcheurs de Mundra © RF/ Anne-Laure Barral)

"Il ne faut pas choisir entre le climat et l’accès à l’énergie"

L’accès à l’énergie, c’est la priorité en Inde. 300 millions de personnes n’en ont pas. Alors que ce soit avec du solaire, du nucléaire ou du fossile, le gouvernement veut développer toutes les énergies et projette de construire plus d’une centaine de centrales à charbon. "La centrale de Mundra émet autant de CO 2 que tout le Bangladesh c’est un gros impact sur l’environnement, le climat et la vie marine ", estime  Bharat Patel à la tête de l’association des pêcheurs de Mundra

 

Le comble, c’est que cette centrale qui fournit 4000MW de courant envoie toute sa production vers les grandes villes du nord du pays alors que les villages des pêcheurs, juste à côté n’ont pas d’électricité. "Il ne faut pas choisir entre le climat et l’accès à l’énergie. De petits projets d’énergies renouvelables sont plus adaptés pour fournir de l’électricité aux populations rurales qui n’en ont pas" , explique Lucie Pinson des Amis de la Terre qui soutient le combat des pêcheurs de Mundra

 

L’ONG dénonce aussi dans ce dossier le financement de banques françaises comme BNP Paribas, qui a prêté plus de  300 millions d’euros pour la centrale de Mundra. L’ONG espère que la banque fera évoluer les pratiques en Inde. La banque aujourd’hui partenaire de la conférence sur le climat de Paris estime avoir engagé des efforts sur le sujet depuis 2011 mais pourrait en faire de nouveau dans les prochains jours.

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