Visite d'Emmanuel Macron à Pékin : "La France est trop petite pour la Chine", estime le sinologue Jean-Luc Domenach
Alors qu'Emmanuel Macron s'apprête à effectuer sa première visite d'Etat en Chine, le 8 janvier, le sinologue Jean-Luc Domenach estime mardi sur franceinfo que Paris aura peu d'influence sur le géant chinois.
Emmanuel Macron effectuera sa première visite d'Etat en Chine du mardi 8 au mercredi 10 janvier, a annoncé l'agence de presse officielle Chine nouvelle. Il s'agit de la première visite d'un chef d'État français depuis octobre 2015. Pour le sinologue Jean-Luc Domenach, la France, est "trop petite pour la Chine", et peu d'influence sur Pékin pour avancer sur les dossiers nord-coréen ou sur celui des droits de l'Homme. Cela étant, il estime aussi que le président français "joue bien d'une fenêtre d'opportunité."
franceinfo : La France a-t-elle un intérêt pour Pékin ? Est-elle trop petite pour la Chine ?
Jean-Luc Domenach : Le pouvoir chinois voit la France comme un pays vraiment bizarre. Nous avons une politique étrangère qui est ambitieuse, alors que notre économie est faible. Eux ne raisonnent pas comme cela. Ils ont à la fois beaucoup d'argent, et beaucoup de pouvoir. Ils ne comprennent pas bien l'ambition d'une personnalité comme celle de notre président de la République. La France est trop petite pour la Chine mais il faut reconnaître que notre président joue admirablement bien d'une fenêtre d'opportunité. Les Allemands sont un peu coincés actuellement par leurs problèmes intérieurs, et donc la France peut apparaître, comme au temps de Georges Pompidou, comme la puissance européenne.
L'un des dossiers du moment c'est la Corée du Nord ; que peut-on obtenir de la Chine, qu'elle se positionne plus clairement face à Pyongyang ?
On va essayer. Mais les Chinois eux-mêmes sont coincés. S'ils écrabouillent la Corée du Nord, cela va faire un bazar formidable. Les Chinois sont à la fois furieux de la façon dont les Coréens du Nord fonctionnent, mais en même temps il n'y a pas de solution très nette pour eux. Ils ne soutiennent pas tant que cela la Corée du Nord. C'est une carte qu'ils n'utilisent pas, sinon cela ferait des problèmes sur leur frontière.
Sur les droits de l'Homme, une visite d'État française peut-elle changer quelque chose ?
Oui, pour les quelques centaines de détenus qui ont une relation avec la France. Pour eux, oui. Mais sincèrement, on ne peut pas espérer grand-chose. Les droits de l'Homme en Chine ne sont toujours pas respectés. Le nombre de détenus dans les camps de travail avoisine les cinq millions. C'est moins qu'avant, mais c'est toujours beaucoup.
Lors du dernier congrès du Parti communiste chinois, Xi Jinping a clairement dit qu'il ouvrirait les portes du marché chinois aux entreprises étrangères et qu'il les traiterait "plus équitablement". A quoi peut-on s'attendre ?
À rien. Ils feront ce que leurs intérêts économiques leur dicteront, et c'est tout. Cela a marché jusqu'à présent. L'Occident a été d'une extrême amabilité avec la Chine, et c'était peut-être d'ailleurs un bon calcul, parce que la Chine s'est équilibrée, et elle n'est plus un danger important pour nous. Mais il ne faut pas attendre d'elle qu'elle nous montre quoi que ce soit.
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