Quand la Chine consommera
Malgré la crise, l’économie chinoise devrait croître «d'environ 8%» en 2012 avec une accélération durant la seconde moitié de l'année, selon un rapport du Fonds monétaire international (FMI) sur la deuxième économie mondiale publié en septembre.
Cette prévision est inférieure à celle de 8,25% que le FMI avait faite en avril. Pour 2013, le Fonds projette désormais 8,5% de croissance du Produit intérieur brut (PIB) chinois.
Atterrissage en douceur ?
Ce chiffre de 8% de croissance nous paraît impressionnant, mais il est loin des 10% souvent atteints les années précédentes (10,4% en 2010 et 9,3% en 2011).
Certes, les exportations ont progressé de 2,7% en septembre 2012 par rapport à août 2011, mais les analystes attendaient 3%. Résultat, l'avertissement lancé récemment par le président Hu Jintao, qui a parlé des «graves défis» à relever du fait de la conjoncture négative au niveau mondial, prend donc d'autant plus de sens.
Le marché intérieur n’est guère meilleur. «En septembre, les achats de l'industrie ont reculé pour le 5e mois d'affilée. Une situation économique qui suppose un soutien de la part des autorités pour préserver les profits des grandes entreprises. Or, ceux-ci ont continué de s'éroder en août pour le 5e mois de suite», pouvait-on lire dans Les Echos.
Le FMI a relevé que l'atterrissage en douceur voulu en 2011 par les autorités chinoises pour lutter contre l'inflation et éviter une surchauffe dans le secteur immobilier «a rencontré des vents contraires plus forts que prévu à cause de l'aggravation de la crise dans la zone euro». Mais le ralentissement de la hausse des prix a permis au gouvernement de desserrer sa politique monétaire et de soutenir l'activité. «Les autorités ont levé le pied du frein mais elles n'ont pas encore appuyé fortement sur l'accélérateur», tout en se tenant prêtes à le faire si nécessaire, a estimé Markus Rodlauer, chef de mission du FMI en Chine.
Rééquilibrage de l’économie ?
Les importations, encore plus mauvaises que les exportations, affichent une baisse de 2,6% alors que les observateurs s'attendaient à une hausse de 3,5%.
«La Chine a les moyens de réactiver son économie», estime Montgomery Ho, un responsable de HSBC Chine, évoquant le développement de la consommation intérieure. Pékin dispose d'une marge de manœuvre sur le plan monétaire grâce à un faible niveau d’inflation, rappelle-t-il, et le gouvernement central a récemment avalisé un nouveau plan d’investissement, qui concerne essentiellement les transports. «La Chine 1.0, pays des manufactures, est en train de devenir la Chine 2.0, pays de la consommation», ajoute Miguel Barrieras, directeur du marché des entreprises chez HSBC France, indiquait Les Echos.
Selon l’OFCE, la consommation des ménages a soutenu la croissance en 2011 et devrait rester dynamique à moyen terme. Elle a bénéficié en 2011 de la revalorisation de 20% en moyenne du salaire minimum dans de nombreuses villes, et les salaires devraient poursuivre leur progression à deux chiffres en 2012.
Une économie à plusieurs vitesses
Automobile, télécoms, recherche, énergie solaire… En quelques années, la Chine s’est imposée comme une puissance capable de rivaliser avec les autres pays dans tous les domaines. La Chine, ce n’est plus seulement le pays qui exporte des t-shirts à prix imbattables ou l’atelier mondial des objets à bas coûts. Aujourd’hui, par exemple, «Suntech, avec 3 milliards de dollars de chiffre d’affaires et 22.000 salariés, est le leader mondial des panneaux solaires», rappelait Le Figaro.
Une récente étude de Thomson Reuters montre que la Chine est devenue le deuxième producteur mondial d’articles scientifiques, après les Etats-Unis. Les dépenses de recherche-développement des pays asiatiques ont représenté 387 milliards de dollars en 2008 contre 384 milliards aux USA et 280 milliards en Europe.
Toujours dans les hautes technologies, les Etats-Unis ont été obligé d’avancer l’argument de la sécurité nationale pour bloquer le développement de matériels chinois sur ses réseaux télécoms. En France, un rapport préconise la même solution. Dans le secteur automobile, la Chine est devenu le premier marché mondial. D’ici 2018, un véhicule sur 4 devrait y être produit, selon une étude du cabinet PricewaterhouseCoopers.
Autre symbole de la puissance chinoise, Pékin a acquis 21,3% du capital de l’électricien Energias de Portugal (EDP, équivalent d’Electricité de France), privatisé au nom de la lutte contre la dette publique.
Congrès du PCC
Inégalités, croissance, développement de la consommation, bulle immobilière, valeur de la monnaie, environnement… La «Chine est en train de faire la transition entre une longue période de croissance quantitative et une ère où l'accent sera mis sur la qualité de la croissance», a résumé Jim O'Neill, président de la gestion d'actifs de Goldman Sachs.
Ce passage à une économie plus réactive et plus tournée vers la consommation pourra-t-elle se faire dans le cadre du régime actuel ? Les récentes tensions au sein de la direction du Parti communiste chinois montrent que les tensions existent.
A plus court terme, les organismes internationaux parlaient d’un soft landing (atterrissage en douceur) pour l’économie chinoise. Les plus pessimistes s’interrogent sur un ralentissement plus important. Comment dit-on hard landing en chinois ? Voilà une des questions sur laquelle le XVIIIe congrès du Parti communiste chinois, convoqué le 8 novembre, pourrait avoir à se pencher.
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