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L'otage tué par Daech occulté dans les médias chinois par les attentats de Paris

L'exécution de l'otage chinois par Daech a créé l'émotion en Chine. Mais les médias ont surtout réagi aux attaques meurtrières du 13 novembre 2015 à Paris. Le correspondant de France 2 à Pékin, Alain de Chalvron, fait le point pour Géopolis.
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Extrait d'une capture d'écran du «South China Morning Post». Portrait de Fan Jinghui, otage chinois exécuté par Daech. Lequel l'a annoncé le 18 novembre 2015 dans son magazine Dabiq. (Extrait d'une capture d'écran du South China Morning Post)
Y a-t-il eu une grande émotion en Chine après l'exécution d'un ressortissant chinois par Daech?
Oui bien sûr, le président Xi Jinping est monté au créneau : «Le terrorisme est l'ennemi numéro un de l'humanité», a-t-il dit.

Cet assassinat est toujours à la une de l'agence de presse Chine nouvelle. Il était à la une de plusieurs journaux.

Ci-dessous la une du quotidien Global Times (qui appartient au groupe du Quotidien du peuple). C'est la colonne de droite mais le titre principal reste l'opération de police à Saint-Denis et la concertation Etats-Unis-Russie sur la Syrie.

Une du journal chinois «Global Times», le 14 novembre 2015. (DR/Capture d'écran)

Est-ce que cette exécution est de nature à faire bouger la Chine sur le plan militaire? 
Je ne pense pas. Pour le moment, Pékin est un peu en retrait, appuyant la ligne de la Russie (soutien à Assad) diplomatiquement et verbalement, mais sans être sur le terrain (sauf peut-être par des ventes d'armes). 

Après le 13 novembre, je peux vous révéler qu'elle a proposé à la France une coopération active sur le plan du renseignement. Mais de là à participer à des frappes aériennes, il y a un pas. La Chine a un problème sérieux avec une partie de sa population musulmane, les Ouïgours, et ne voudra pas mettre de l'huile sur le feu. Même si elle suit la situation de très, très près, avec probablement des centaines de Ouïgours engagés auprès de Daech. 
 
Son appareil de sécurité et de répression est très mobilisé. La Chine a connu en 2014 une vague d'attentats commis par des Ouïgours et elle craint, comme beaucoup d'autres pays, le retour en Chine de djihadistes chinois entraînés en Syrie. 

Comment a-t-on réagi en Chine aux attentats du 13 novembre?
Avec beaucoup d'intérêt, de compassion mais aussi quelques reproches. 

Avec intérêt: le sujet fait la une.

Une de journaux chinois après les attentats de Paris du 13 novembre 2015. (DR/Capture d'écran)

Les télévisions y consacrent beaucoup de temps d'antenne. Pour vous donner une idée, le principal JT, celui de CCTV 1 à 19 heures, s'ouvre immanquablement sur les activités du numéro 1, puis du numéro 2 chinois et ainsi de suite... Pour la première fois de mémoire d'homme, il a, le 14, dérogé à cette règle en ouvrant sur les attentats de Paris. Une vraie révolution!

Pour le 11-Septembre 2001, la télévision centrale chinoise avait pris 24 heures de réflexion avant de donner l'information des attentats de New York et Washington!

Avec solidarité: de nombreux Chinois nous ont abordés dans la rue ou sont allés signer les registres de l'ambassade de France. 

Mais aussi avec un reproche: que les Français n'aient pas avoir réagi avec la même émotion lors des attentats qui ont frappé la Chine en 2014 et notamment celui de la gare de Kunming, la capitale du Yunnan (29 morts tués à l'arme blanche) ou celui du marché d'Urumqi (31 morts). Force est de reconnaître que le reproche n'est pas infondé.

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