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"C'est une menace pour l'humanité" : la ville amazonienne de Manaus asphyxiée par le variant brésilien du coronavirus depuis quatre mois

Alors que la France a décidé de couper toutes ses liaisons vers le Brésil face à la menace de cette forme très contagieuse du coronavirus, franceinfo est allé à la rencontre des habitants de Manaus. C'est dans cette ville amazonienne, aujourd'hui traumatisée, qu'est apparu le P1.

Article rédigé par Olivier Poujade
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Un des 24 hôpitaux de Manaus, au Brésil, le 14 avril 2021. Face au variant brésilien du coronavirus, le système de santé local s'est retrouvé dépassé.  (GILLES GALLINARO / RADIO FRANCE)

Massivement présent au Brésil, le variant amazonien du Covid-19 se propage en Amérique du Sud et inquiète désormais la planète. La France a stoppé, mercredi 14 avril, ses liaisons aériennes vers le territoire brésilien pour s'en protéger. Le P1 est apparu pour la première fois à la fin de l'année dernière en Amazonie, à Manaus, à 4 000 km de Rio. Franceinfo vous emmène au bord du fleuve Amazone, dans cette ville traumatisée par cette forme très contagieuse du coronavirus.

"Des montées d'angoisse"

"Ce variant arrive très vite, il se répand et il vous emporte, c'est ça le maudit P1 qui nous a frappés", résume une habitante de Manaus. Pas un habitant ne vous parle des ravages du variant brésilien sans évoquer la perte d’un proche. Joao vient à peine de revenir sur son lieu de travail dans l’un des 24 hôpitaux de Manaus, après trois mois d'absence : "Je tremblais de partout comme des montées d’angoisse qui me vidaient, je ne voulais plus travailler ici. Comment j’allais m’occuper des gens alors que je n’ai même pas été capable de sauver ma femme ?"

"Portez un masque", indique ce panneau, mercredi 14 avril 2021. Malgré la propagation du variant brésilien du coronavirus, les autorités brésiliennes n'ont pas mis en place de nouvelles restrictions, ni de confinement. (GILLES GALLINARO / RADIO FRANCE)

Joao a perdu son épouse, une infirmière de 38 ans. Elle s’est éteinte au milieu des autres, au même étage que le service de radiologie où il travaille. "Pendant la première vague, on arrivait à distinguer les points d’inflammation du poumon sur les radios. Un là, l’autre ici, etc. Il n'y en n'avait pas tant que ça. Mais là, il y en avait partout, 50 à 60% de plus qu’avant". Tant bien que mal Joao s’est relevé. Il est revenu travailler mais ce n’est pas le cas de tous les personnels de santé.

Ni restrictions, ni confinement

Ce sont les chercheurs de la Fiocruz, l’Institut Pasteur local, qui ont découvert le P1. Malgré leur message d’alerte sur la circulation "anormale" du virus en décembre, les autorités ont fermé les yeux. "En moins de quatre mois, on a déjà atteint la moitié du total des victimes depuis le début de la pandémie. C’est pour ça qu’on est inquiets, explique l'épidémiologiste Jesem Orellana. La propagation incontrôlée du variant P1 est une menace pour l’humanité. Nous sommes devenus un laboratoire à ciel ouvert".

L’absence de mesures de restrictions, l’absence de confinement a permis au virus de muter rapidement, de se renforcer au cœur de l’Amazonie. 96 nouveaux variants du Covid-19 circulent aujourd’hui sur le territoire brésilien. Le variant amazonien est de loin le plus dangereux.

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