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Philippines: l'opposition anti-Duterte passe d'abord par les femmes
La guerre meurtrière sans retenue contre les narcotrafiquants, menée depuis des mois par le président philippin Rodrigo Duterte, a poussé la vice-présidente Leni Robredo à dénoncer des «exécutions sommaires» et à tirer la sonnette d'alarme internationale. Une déclaration en forme d'écho au combat anti-Duterte menée par une autre femme, la sénatrice Leila de Lima, emprisonnée depuis fin février.
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Il a sans doute fallu du courage à Mme Robredo pour mettre en cause de façon si radicale la politique sécuritaire du président philippin, élu en mai 2016 sur sa promesse de faire abattre des dizaines de milliers de toxicomanes et de trafiquants de drogue afin, disait-il, d'éradiquer le fléau de la drogue de son pays.
Dans un message vidéo envoyé à une réunion de l'ONU, prévue le 16 mars 2017 en Autriche sur les meurtres extrajudiciaires, la vice-présidente philippine s'inquiète en effet de l'implication policière de l'archipel dans des «exécutions sommaires».
Un système «d'échange de têtes»
Pour Mme Robredo, soulignant «les statistiques très sombres», la police est également coupable d'arrêter des innocents en vertu d'un système «d'échange de têtes»: lorsque les policiers ne trouvent pas le suspect, ils arrêtent un membre de sa famille, selon elle.
La vice-présidente philippine regrette aussi la défiance grandissante des Philippins envers leurs forces de l'ordre.
«Certains nous ont dit que quand il se produit un crime, ils iraient normalement voir la police. Maintenant, ils ne savent plus où se tourner», affirme Mme Robredo, élue à son poste lors d'un scrutin distinct de l'élection présidentielle et membre d'un parti différent de celui du président.
Limogée du gouvernement Duterte
Depuis l'entrée en fonctions de Rodrigo Duterte fin juin 2016, la police a annoncé avoir tué 2.500 personnes lors d'opérations antidrogue tandis qu'environ 4.500 autres sont mortes dans des circonstances non élucidées. Amnesty International et Human Rights Watch estiment que des crimes contre l'humanité sont peut-être commis aux Philippines.
Ministre du gouvernement Duterte jusqu'en décembre 2016, Leni Robredo a été limogée après avoir émis ses premières critiques sur la sanglante guerre antidrogue visant surtout, selon elle, les habitants des quartiers pauvres, les hommes en particulier, principal gagne-pain de leur famille.
Depuis l'entrée en fonctions de Rodrigo Duterte fin juin 2016, la police a annoncé avoir tué 2.500 personnes lors d'opérations antidrogue tandis qu'environ 4.500 autres sont mortes dans des circonstances non élucidées. Amnesty International et Human Rights Watch estiment que des crimes contre l'humanité sont peut-être commis aux Philippines.
Ministre du gouvernement Duterte jusqu'en décembre 2016, Leni Robredo a été limogée après avoir émis ses premières critiques sur la sanglante guerre antidrogue visant surtout, selon elle, les habitants des quartiers pauvres, les hommes en particulier, principal gagne-pain de leur famille.
L'Eglise catholique en soutien
Excédé par ces commentaires sur les plus démunis, le président philippin, qui conserve un soutien populaire considérable, accuse les petits dealers de «gagner beaucoup d'argent» et affirme qu'ils jouent un rôle crucial dans les réseaux de distribution. «Peu m'importe que vous soyez le plus gros trafiquant de drogue, ou le plus pauvre, vous conspirez tous pour détruire le peuple», s'est-il justifié récemment
Excédé par ces commentaires sur les plus démunis, le président philippin, qui conserve un soutien populaire considérable, accuse les petits dealers de «gagner beaucoup d'argent» et affirme qu'ils jouent un rôle crucial dans les réseaux de distribution. «Peu m'importe que vous soyez le plus gros trafiquant de drogue, ou le plus pauvre, vous conspirez tous pour détruire le peuple», s'est-il justifié récemment
Mobilisée, l'Eglise catholique joue depuis peu un rôle croissant pour soutenir les familles, financièrement et psychologiquement.
Leila de Lima, une opposante gênante envoyée au cachot
Autre anti-Duterte déterminée, la sénatrice Leila de Lima, ancienne ministre de la Justice et ancienne présidente de la Commission philippine des droits humains, n'a pas non plus ménagé ses critiques à l'égard de l'effrayant président Duterte, dont le mandat s'achèvera en 2022.
Une attitude vaillante qui lui a valu d'être envoyée sans autre forme de procès au siège de la police nationale à Manille, le 24 février 2017, où elle se trouve encore.
Avant d'être emprisonnée, Mme de Lima a réagi sur la chaîne ABS-CBN: «Je sais que je continuerai d'être crucifiée car c'est ce que le président souhaite (...) depuis que j'ai lancé l'enquête sur ses meurtres extrajudiciaires». Et d'ajouter: «Ils se trompent s'ils pensent qu'ils peuvent me faire taire et m'empêcher de me battre pour la vérité, la justice, et contre les meurtres quotidiens et l'oppression du régime Duterte».
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