Ossétie, Abkhazie, Crimée... Quelles frontières pour la Russie de Poutine ?
Le 8 août 2008, la Géorgie donnait l’assaut en Ossétie du Sud, provoquant l'intervention de la Russie. Après cinq jours de conflit, le Kremlin a reconnu l’indépendance de l’Ossétie du Sud et d’un autre territoire séparatiste, l’Abkhasie, mettant fin aux ambitions géorgiennes sur ses ex-territoires. Tbilissi et les pays occidentaux avaient alors dénoncé une occupation de fait.
En 1992, pourtant, un cessez-le-feu avait été négocié entre la Géorgie et l'Ossétie du Sud pour mettre un terme au conflit armé consécutif à l’effondrement de l’URSS.
Conscients de la vulnérabilité des anciennes Républiques soviétiques, de nombreux Géorgiens sont convaincus que la conquête de la Crimée par la Russie va encourager le président Vladimir Poutine à accentuer la pression sur ces pays. «L'erreur serait de croire que Moscou agit pour défendre les Russes, ethniques ou porteurs d'un passeport russe, en Crimée aujourd'hui ou comme en 2008 dans les provinces séparatistes géorgiennes», déclarait récemment au Figaro, le politologue Thorniké Gordadzé, de l'Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN), à Paris. Une menace sur ces Russes qui n'existe pas, selon cet ancien ministre géorgien.
Poutine pense «géopolitique»
Vladimir Poutine pense essentiellement «géopolitique», analyse Lawrence Sheets, experte du Caucase à l'International Crisis Group. De la Géorgie à l'Ukraine, il poursuit son grand objectif: replacer la Russie sur le devant de la scène internationale et recréer pour ce faire une sphère d'influence autour d'elle, précise-t-elle dans une interview au Figaro.
Le Parlement géorgien a adopté une résolution appelant la communauté internationale à «défendre le peuple ukrainien contre l'agression russe afin d'éviter un conflit armé et à mettre fin à l'occupation de la Géorgie». Dans le même temps, le Premier ministre géorgien Irakli Garibachvili a pour sa part écrit aux dirigeants occidentaux appelant «la communauté internationale (à) inciter la Russie à renoncer à ces actions (...) dont la Géorgie a été la première à faire l'expérience».
«Pensez à l'enchevêtrement qui naîtrait d'un tracé des frontières selon des critères ethniques en Europe. S'il n'y a plus de règles, une spirale de violence et de destruction est inévitable», écrivait l’ancien président géorgien, Mikhaïl Saakachvili, dans une tribune du Washington Post, quelques jours avant le référendum de Crimée du 16 mars 2014.
«L'Ukraine, la Géorgie et la Moldavie devraient bénéficier d'une adhésion accélérée à l'Union européenne et de plans d'accession à l'Otan afin de bien montrer que la Russie ne peut parvenir à ses fins par des moyens illégaux», a poursuivi M.Saakachvili, plus radical vis-à-vis de Moscou que ne l'est son successeur, Guiorgui Margvelachvili.
Accélérer son adhésion à l'OTAN
La Géorgie peut espérer obtenir un plan d’action pour l’adhésion à l’Otan (MAP) au sommet des Etats membres de l’Alliance début septembre 2014 au Pays de Galles – la dernière étape avant l’adhésion du pays candidat. Mais Tbilissi, extrêmement préoccupé par les événements en Ukraine, cherche à persuader ses partenaires occidentaux de la nécessité d’adhérer à l’Otan dès maintenant.
Promis au président Mikheïl Saakachvili au sommet de l'Otan de Bucarest en avril 2008, le MAP n'avait finalement pas été accordé à Tbilissi en raison notamment de l'opposition de la France et de l'Allemagne. Aujourd'hui, la Géorgie peut compter sur le soutien traditionnel des Etats-Unis, de la Pologne et des Pays baltes, mais rien n’indique encore que la France et l’Allemagne vont changer d’avis.
Pour le secrétaire général de l'Otan, Anders Fogh Rasmussen, l'intervention de Moscou en Crimée participe d'une «stratégie globale» de la Russie. L’ex-Premier ministre danois dit craindre que le président russe n'aille «au-delà de la Crimée» et n'intervienne dans les régions orientales de l'Ukraine. Après la crise des Balkans dans les années 90 et la Géorgie en 2008, la crise ukrainienne représente, selon lui, «la plus grave menace à la sécurité et à la stabilité de l'Europe depuis la fin de la Guerre froide».
Très critiqué en Europe occidentale et aux Etats-Unis, Vladimir Poutine enregistre 68% d’opinions favorables en Russie, selon Courrier international. Lors de la campagne militaire d’août 2008 en Ossétie du Sud, 80% de la population russe approuvait sa politique extérieure.
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