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Népal: accoucher en sécurité, un pari difficile depuis le séisme

Plus de quatre mois après le séisme d'avril 2015 au Népal, les accouchements de bébés mort-nés et prématurés sont trois fois plus nombreux. Quelque 70% des cliniques ont été détruites et remplacées par des tentes dans les districts les plus touchés. Mais la mousson ralentit la reconstruction et risque de stopper net le déclin de la mortalité maternelle et des nouveaux-nés depuis plus de 10 ans.
Article rédigé par Dominique Cettour-Rose
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
Premier bébé mis au monde dans cet hôpital de campagne israélien, à Katmandou, le 30 avril 2015. (MENAHEM KAHANA / AFP )

Plus de quatre mois après le séisme au Népal, les nouveaux-nés et les mères sont en danger. Shrestha, 21 ans, s'estime chanceuse d'être parvenue à rejoindre en pleine nuit le campement médical installé à la place de la clinique locale détruite par le séisme du 25 avril 2015 pour accoucher en toute sécurité. Les membres de sa famille l'avaient retirée vivante des décombres de leur maison dans le village de Gerkhu, situé dans le district de Nuwakot, à environ 30 km au nord de Katmandou.

Seulement cinq des 21 centres d'accouchement ont résisté au tremblement de terre de magnitude 7,8, dans ce district où de nombreux villages se sont retrouvés coupés du monde. Plus de 30.000 femmes ont accouché dans les 14 districts les plus touchés. Comme Shrestha, ces femmes vivant dans des villages reculés ont dû emprunter des chemins dangereux, exposés à des glissements de terrain, pour rejoindre des tentes d'assistance médicale. Elles sont vitales pour ces femmes car elles sont équipées d'antibiotiques, de gants et d'instruments chirurgicaux, d'équipements de bases acheminés par des ONG telles que l'Unicef.

Accouchements en dehors des maternités
«Dans des conditions normales, nous estimons que 5% des grossesses débouchent sur des accouchements prématurés mais après le séisme, ce taux est monté à environ 15%», s’inquiète Asha Pun, spécialiste de ces questions à l'Unicef. L'organisation onusienne dit craindre une «augmentation de plus de 30% de la proportion de femmes qui accouchent en dehors des maternités et des centres d'accouchement».

Premier nouveau-né de l'hôpital de campagne israélien, mis au monde le 30 avril 2015 à Katmandou après le séisme. ( AFP PHOTO / MENAHEM KAHANA)


«Les nouveaux-nés, si vulnérables, et les femmes enceintes ont besoin d’une aide d’urgence car le stress causé par les séismes accroît le risque de naissances prématurées et de complications», explique Tomoo Hozumi, représentant de l'Unicef au Népal, estimant que «chaque jour, 90 femmes ont besoin d’un accouchement par césarienne. Actuellement, le système de santé est incapable d’y faire face.»

Déclin de la mortalité maternelle
Le Népal était parvenu, entre 2000 et 2013, à réduire de 55% sa mortalité maternelle, passée de 430 (pour 100.000 naissances) à 190 décès. Un succès qui s'explique, en partie, par la baisse du taux de natalité: les femmes népalaises donnent, en moyenne, naissance à 2,6 enfants, contre 4,6 enfants il y a 15 ans. Elle serait aussi due, d'après les professionnels de santé, à la migration des jeunes pères qui partent en Inde, en Asie du Sud-Est et dans les pays du Golfe pour trouver du travail.
 
Il y a plus de quatre mois, deux séismes ont secoué cette nation himalayenne. Près de 8.700 personnes ont trouvé la mort et 600.000 logements ont été détruits laissant des milliers de personnes sans abri en quête d'eau et de nourriture. La mousson ralentit la reconstruction et les glissements de terrain freinent l'acheminement de l'aide dans les villages de montagne, selon l'OMS qui craint le développement de diarrhées et d'autres maladies liées à l'eau. 

4,4 milliards de promesses de dons
Le Népal évalue à 6,7 milliards de dollars ses besoins pour la reconstruction, et les donateurs internationaux ont fait des promesses pour 4,4 milliards. Le gouvernement doit créer un nouvel organisme pour gérer ces fonds mais celui-ci n'a pas encore vu le jour. Les rescapés qui ont perdu leur logement n'ont reçu que 150 dollars sur les 2.000 promis pour reconstruire leur maison.

En juillet 2015, la banque centrale indiquait que les transferts d'argent des Népalais installés à l'étranger, devenus cruciaux depuis le séisme, ont augmenté et progressé de 11,2% à 5,5 milliards de dollars sur 11 mois. L'économie du Népal, l'une des plus fragiles avant le séisme, a été brutalement touchée avec une prévision de croissance annuelle de 3%, son plus bas niveau depuis huit ans.

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