Le rapport entre un nuage de fumée à Singapour et l'huile de palme indonésienne
Une analyse par Greenpeace de données de la NASA, l’Agence spatiale américaine, a montré que «des centaines de foyers d’incendie se situaient à l’intérieur de concessions d’huiles de palme» détenues par des groupes indonésiens, malaisiens ou singapouriens. «La moitié des foyers se situent dans des zones qui devraient être protégées par le moratoire indonésien» censé bannir toute destruction de forêts primaires, précise l’organisation.
De son côté, l’association écologiste indonésienne Eyes of the Forest, soutenue notamment par le WWF, a elle aussi montré du doigt les plantations de palmiers, mais aussi les firmes papetières Asia Pulp and Paper (APP) et April. Lesquelles comptent parmi les plus importants du secteur au niveau mondial. Une accusation reprise par la présidence indonésienne. Interrogé, APP a assuré de sa bonne foi. L’entreprise affirme respecter une «politique de zéro brûlis mise en place en 1996». Tandis qu’April dément toute responsabilité.
On n’est pas forcément obligé de les croire… Mais au-delà, on compte nombre de «coupables», estiment les écologistes. En l'occurrence les fermiers qui veulent nettoyer leur terrain pour d’autres cultures, les personnes payées pour craquer une allumette dans une concession appartenant à une grande compagnie, les grands planteurs de palmiers à huile…
Un mode de culture traditionnel
Facteur aggravant : la culture sur brûlis est une tradition. Dans la région de Pelalawan, dans la province de Riau, province située dans l’est de l’île de Sumatra d’où partent la majorité des feux, personne ne reconnaît mettre le feu à la forêt. On n’en est pas moins disert sur les mérites de la pratique.
«Le brûlage, c'est obligatoire. Qui voudrait couper ces arbres? Ils sont énormes», assure le propriétaire d'une petite plantation de palmiers à huile qui ne donnera que son prénom, Herman. «Il suffit d'un mégot de cigarette pour faire partir un énorme incendie, surtout lors de la saison sèche», révèle-t-il. Les flammes défrichent en quelques heures des zones que l’on mettrait beaucoup plus de temps à déforester avec des équipements lourds comme des bulldozers.
Une fois allumé, le feu est très difficile à éteindre : les flammes couvent dans la tourbière qui fait le lit de la forêt, et est épaisse de plusieurs mètres. «Elles voyagent comme de l'eau sous nos pieds. On n'a pas idée d'où le feu peut réapparaître et brûler à nouveau en surface», explique Herman.
Autre avantage de la culture sur brûlis : la cendre fertilise les terres, estiment les fermiers locaux. Alors, même si elle avoue que ses enfants «toussent» en raison de la pollution, Saparina, une paysanne, soutient la pratique qui lui permet de planter ses épinards dans ce qui était auparavant une jungle primaire. La loi existe pourtant: elle punit les incendiaires d'une peine minimale d'un an de prison mais elle est rarement appliquée, comme c'est souvent le cas en Indonésie. Huit planteurs font ainsi l’objet d’une enquête à Riau.
Pour ces Indonésiens, il est donc difficile donc de renoncer à une pratique. Même si elle fait s’envoler en fumée l’une des biodiversités les plus riches de la planète, libérant d’importantes quantités de C02 dans l’atmosphère.
Cela est d’autant plus difficile que le secteur de l’huile de palme est plus que porteur. L’«or rouge», peu coûteux, est massivement utilisée par l’industrie agroalimentaire et cosmétique. Cette huile entre en effet dans la fabrication de nombreux biens de consommation courants: pains de mie, biscuits, pâtes à tartiner, savons, rouges à lèvres… Pourtant, certains scientifiques dénoncent leurs risques sur la santé humaine, liés aux transfats.
L'huile de palme et les biocarburants
Une huiie de palme durable ?
WWF France, 22-11-2011
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