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Guerre du Vietnam: l’agent orange, un héritage empoisonné

Article rédigé par Laurent Filippi
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
30 avril 2015 : 40e anniversaire de la fin du de la guerre du Vietnam. Pendant dix ans (1961-1971), les Etats-Unis ont déversé sur les campagnes de ce pays 80 millions de litres d’agent orange, un herbicide extrêmement toxique contenant près de 400 kilos de dioxine, produit par les entreprises Monsanto et Dow Chemical.

La mission des avions de l’US Air Force était de déloger des forêts les forces armées communistes du Front national de libération du Sud Vietnam (le Vietcong).
 
Selon l’association vietnamienne des victimes de l'agent orange/dioxine (VAVA), plus de 4,8 millions de personnes ont été exposées au défoliant et plus de 3 millions en subissent encore les conséquences.
 
A la façon d’un photographe judiciaire, Damir Sagolj a décidé de traverser le Vietnam du Nord au Sud pour aller à la rencontre de ces corps meurtris, de ces victimes de deuxième et troisième générations dont les cas augmentent avec la proximité des anciennes lignes de front.
 
L’idée de faire un reportage sur l’agent orange, sujet mille fois traité par les médias, a provoqué de nombreux étonnements chez ses confrères. Mais comme l’explique le photographe, l’important n’est pas le sujet mais comment il est raconté. Ses photographies parlent de l’ici et maintenant, montrent la tragédie qui frappe dans leur chair les adultes mais aussi leurs enfants : dérèglements hormonaux, déficiences immunitaires et reproductives, malformations congénitales, cancers, maladies du système nerveux…
 
VAVA, les responsables locaux et les membres des familles confirment que l’état de santé de personnes rencontrées par le photographe est lié à l’exposition des parents ou des grands-parents à l'agent orange. Un constat qu’ils ont mis des années à pouvoir faire.
 
Alors que de nombreuses coopérations ont lieu entre les diverses associations américaines et vietnamiennes pour aider les victimes de la plus longue guerre chimique de l'Histoire, les Etats-Unis refusent toujours de reconnaître leur responsabilité.
 
15 photos de Damir Sagolj prises en avril 2015 illustrent ce propos.

dans des zones fortement contaminées par l'agent orange. Sur les quinze enfants qu’il a eus après la guerre, tous sont nés handicapés et douze sont morts peu de temps après de maladies en rapport avec le défoliant.  (REUTERS/Damir Sagolj )
Do Duc Diu a aménagé à côté de sa maison un cimetière pour pouvoir se recueillir sur les tombes de ses enfants. Mais il aura attendu 1994 et la naissance de sa dernière fille, handicapée comme ses deux sœurs, pour qu’il connaisse ​les réels dangers de l'agent orange. Auparavant, sa femme et lui consultaient de nombreux chefs spirituels, car ils croyaient en une malédiction.  (REUTERS/Damir Sagolj )
une femme qui vit elle aussi dans la province de Quang Binh, lave son fils handicapé Doan Van Quy.  (REUTERS/Damir Sagolj )
affecté aux canons antiaériens pendant la guerre, a sillonné de nombreuses zones exposées à la dioxine. Ses deux fils sont nés avec de très graves problèmes de santé. (REUTERS/Damir Sagolj )
Son père, lui aussi ancien combattant de l'armée nord-vietnamienne, n’a pas été directement aspergé par l’herbicide mais est resté longtemps dans des zones contaminées. Les médecins ont confirmé que l’état de santé de Phan Van Lam est directement lié au défoliant.  (REUTERS/Damir Sagolj )
vit dans la province de Thai Binh, dans le nord du Vietnam. Cet ancien officier des renseignements a eu la confirmation par les responsables locaux que l’état de santé de ses deux fils, handicapés physiques et mentaux, est directement lié à son exposition prolongée à l’agent orange pendant la guerre. (REUTERS/Damir Sagolj )
Elle vit dans la maison familiale d’un petit village de la province de Thai Binh. Elle passe la plupart de son temps dans une pièce vide, isolée du reste de la famille depuis l’âge de 16 ans en raison de son comportement agressif et de ses accès de colère liés à ses problèmes de santé mentale. Son père qui a combattu dans les montagnes et a été fortement exposé à l’herbicide est lui aussi gravement malade. (REUTERS/Damir Sagolj )
Il vient rendre visite à son fils Nguyen Dinh Loc, 20 ans, dans le Village de l'amitié, un hospice pour les victimes de l'agent orange créé en 1998 près de Hanoi. Son fils vient d’être opéré d’une tumeur. Il souffre de graves problèmes mentaux et physiques. Nguyen Hong Phuc n’a rejoint l'armée qu’en 1971 quand l'armée américaine avait déjà cessé d'utiliser l'agent orange. Mais vivant dans des zones fortement contaminées, il a été empoisonné.  (REUTERS/Damir Sagolj )
et sa meilleure amie Dinh Thi Huong, qui est sourde est muette, sont aussi résidentes du Village de l'amitié. Leurs pères sont d’anciens soldats. Quelque 120 enfants et 60 anciens combattants y vivent.  (REUTERS/Damir Sagolj )
Nguyen Thi Ngoc s’amuse avec son amie Dang Thi Nu qui vit ici depuis dix ans.  (REUTERS/Damir Sagolj )
et malformations attendent de déjeuner dans le Village de la paix de l'hôpital de Tu Du, à Hô Chi Minh (sud). La plupart d’entre eux sont orphelins ou ont été abandonnés à la naissance. Il existe onze autres villages de la sorte au Vietnam. (REUTERS/Damir Sagolj )
Le directeur explique que les problèmes de santé de plus des deux tiers de ses 60 enfants sont dus à l’agent orange.  (REUTERS/Damir Sagolj )
Il est né sans yeux. Ses parents et son grand-père ont été exposés à l’herbicide.  (REUTERS/Damir Sagolj )
vêtu d'une veste militaire usée, surveille son petit-fils handicapé Le Van Tam pendant que sa fille nourrit un autre de ses petit-fils, lui aussi gravement malade. Une agence gouvernementale leur fournit du lait pour les nourrir.
  (REUTERS/Damir Sagolj )
Il souffre des mêmes problèmes de santé que sa sœur née en 2000 et morte sept ans plus tard. Leur maison se trouve près de l'aéroport de Danang, une zone fortement contaminée. Il a fallu quatre décennies pour nettoyer entièrement cet endroit qui servait de base militaire américaine pour entreposer des milliers de barils de défoliant. Quand son père a commencé à travailler à l'aéroport en 1997, il n’était pas au courant des risques encourus. Pauvre, il a longtemps pêché dans le lac, ramassé des escargots et cueilli des légumes près de l’aéroport. Le couple a une autre fille de 20 ans en bonne santé. (REUTERS/Damir Sagolj )

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