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Birmanie: le tandem Suu Kyi et Kyaw profite aux prisonniers politiques
Le nouveau président birman, Htin Kyaw, désigné par la LND, le parti d'Ang San Suu Kyi, a annoncé la libération de 83 prisonniers politiques à l’occasion du Nouvel an. Cette mesure vise, selon le décret d’amnistie, à promouvoir «la réconciliation nationale et un climat de paix». Dans ce même but, Mme Suu Kyi a promis de faire pression pour une plus grande autonomie des minorités ethniques.
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La Dame de Rangoun l’avait promis, Htin Kyaw l'a fait. Dans un discours télévisé de Nouvel an, dimanche 17 avril 2016, le président birman, 69 ans, a souligné sa détermination à libérer des prisonniers politiques. «Les 83 prisonniers amnistiés aujourd'hui par le président sont des prisonniers politiques et des prisonniers concernés par des affaires politiques», a précisé Zaw Htay, directeur adjoint du cabinet présidentiel.
Pami les détenus relâchés figurent cinq journalistes du journal Unité, condamnés à dix ans de prison, en 2014, pour avoir rédigé un article accusant l’armée de fabriquer des armes chimiques. Leur peine avait été réduite à sept ans en raison de la mobilisation des défenseurs des droits de l'Homme. Selon l'Association d'assistance aux prisonniers politiques (AAPP), des dizaines de prisonniers politiques sont toujours incarcérés, et des centaines d'autres militants sont poursuivis pour des actions politiques.
«Au-dessus» du président.
Cette aministie présidentielle confirme la volonté du nouveau pouvoir de tourner la page après d'un demi-siècle de domination militaire. Depuis sa prise de fonction, le 1er avril 2016, le président Htin Kyaw, ami et proche collaborateur de longue date d'Ang San Suu Kyi, a procédé à l'annulation des poursuites de 282 militants inculpés pour des délits à caractère politique. Parmi eux, des dizaines d'étudiants emprisonnés pendant plus d'un an pour avoir manifesté contre une réforme de l'éducation.
La lauréate du prix Nobel de la paix (1991) a elle-même été condamnée par la junte qui l'a assignée à résidence pendant près de 15 ans dans sa maison de Rangoun. L’emprisonnement des dissidents par les militaires a perduré avec le précédent gouvernement semi-civil ayant succédé, en 2011, à la junte. La lutte de la LDN contre ces pratiques avait notamment valu à l'ancienne opposante, le soutien de nombreux Birmans pour qui elle incarne «l'espoir d'un retour à la démocratie».
La lauréate du prix Nobel de la paix avait fait savoir qu'en cas de victoire aux premières élections libres de novembre 2015, elle «dirigerait le gouvernement» et se situerait «au-dessus» du président. Ainsi, la Ligue nationale démocratique (LDN) a désigné un fidèle de son cercle rapproché, Htin Kyaw, au poste qui lui était impossible d'occuper étant donné la nationalité britannique de ses deux fils. Ce qui est interdit par la Constitution birmane, rédigée en 2008 par la junte.
L'ancienne opposante rassure les minorités
Son parti, la LND voulant instaurer «une véritable union démocratique fédérale», la Dame s'est déclarée, dans une allocution télévisée pour le Nouvel an, favorable à une plus grande autonomie des minorités techniques. C'est un geste en direction des nombreux groupes rebelles qui s'opposent à l'armée dans plusieurs régions frontalières du pays.
L'enjeu du contrôle des richesses naturelles, comme les rubis ou le bois précieux, complique la situation. Dans ces régions, où les minorités ethniques sont majoritaires, la LDN avait réalisé de très bons scores aux législatives historiques qu'elle a remportées.
L'ancienne colonie britannique est confrontée depuis son indépendance en 1948 à des soulèvements de groupes ethniques qui réclament une plus grande autonomie. Mais la Constitution en vigueur centralise le pouvoir. Pour la modifier, le projet doit être avalisé par les généraux qui ont conservé, via des députés non élus, un quart des sièges au sein du Parlement.
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