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Caraïbes: où va l'île de Curaçao?

Destination touristique des Antilles néerlandaises, l’île de Curaçao a été secouée en 2013 par l’assassinat du chef de file du parti indépendantiste, Helmin Wiels, 54 ans, tué par balles. Motif évoqué : la lutte contre la corruption menée par cet homme politique populaire. L'affaire a marqué le début d’une période d’instabilité pour l'île.
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Une baie de l'île de Curaçao (Antilles néerlandaises). Photo prise le 3 septembre 2011. (AFP - Robert Harding Premium - Michael Runkel)

Peu de temps avant sa mort, Helmin Wiels avait affirmé dans une interview (au site en néerlandais versgeperst.com) que la firme de télécommunication insulaire UTS était «impliquée» dans une affaire de «ventes illégales de numéros de loterie», rapporte le Curaçao Chronicle. Pour l’instant, l’assassinat n’a toujours pas été élucidé.

Cette affaire a choqué les 146.000 habitants de l’île, qui n’ont pas l’habitude de la violence politique. Elle est intervenue deux ans et demi après que les Pays-Bas eurent accordé au territoire une très large autonomie interne et effacé 80 % de sa dette. Un évènement célébré joyeusement dans les rues de l’île. «Cétait la première fois depuis l’arrivée des Espagnols en 1499, lesquels avaient rapidement réduit les indigènes à l'état d'esclave, que l’île était en mesure de contrôler son destin», commente le Christian Science Monitor (CSM).
 
Les citoyens «avaient des raisons d’être optimistes. Sans la dette qui pèse sur tant d’Etats des Caraïbes, Curaçao pouvait concentrer ses efforts sur la croissance de son économie», poursuit le journal américain. Une économie qui repose largement sur le tourisme (croisières et activités sous-marines) : 400.000 personnes visitent l’île chaque année.

Mais l’assassinat est venu tempérer ce bel optimisme. Il a aggravé une période d’instabilité politique, alors qu’augmentaient le chômage et la petite délinquance. A l’automne 2012, le premier chef du gouvernement de Curaçao, Gerrit Schotte, quitte son poste en parlant de «coup d’Etat» sans effusion de sang.

Depuis, trois premiers ministres se sont succédé au pouvoir. Il faut dire que la politique menée par les différents gouvernements n’a pas forcément plu à l’électorat : hausse de la TVA de 5 à 9% sur certains produits, augmentation de l’âge de la retraite de 60 à 65 ans, refonte du système de sécurité sociale avec des hausses de cotisations… Des réformes dont les manifestations n’ont pas empêché la mise en œuvre.

Maisons néerlandaises à Willemstad, capitale de l'île de Curaçao. Ce site est classé au Patrimoine mondial de l'UNESCO.  (AFP - Robert Harding Premium - Michael Runkel)

Dans le même temps, le pays a pris conscience de sa position stratégique dans une région, les Caraïbes, connue pour être une plaque tournante du trafic de drogue, notamment de la cocaïne sud-américaine. Une situation d’autant plus inconfortable que Curaçao se trouve coincée entre le Venezuela et les Etats-Unis, à couteaux tirés depuis des années.
 
A la suite d’un accord signé en 2000, Washington entretient sur l’île une base de l’US Air Force chargée de lutter contre les trafiquants. Le Venezuela d’Hugo Chavez a accusé les appareils américains de violer son espace aérien pour mener des missions d’espionnage. Ce qui n’a pas empêché les Américains de poursuivre leurs vols. Une position difficile à tenir pour Curaçao, située à 65 km au nord-ouest des côtes vénézuéliennes. Notamment parce que l’île accueille sur son territoire une raffinerie de pétrole, propriété de Caracas, où travaillent 1500 personnes…
 
«Evidemment, notre situation géopolitique nous fait jouer un rôle important. Mais nous ne voulons pas nous retrouver au milieu d’un conflit de ce genre. Nous sommes un petit pays. Il est donc important que nous restions neutres», explique Gerrit Schotte, aujourd’hui sénateur, cité par le CSM.

De son côté, Helmin Wiels, très populaire dans son pays et dont le parti (Pueblo Soberano) avait obtenu 22,6 % des voix aux élections de 2012, s’était prononcé pour l’indépendance totale de l’île et contre la présence de la base américaine. A ses yeux, cette installation était davantage chargée de réguler que d’éliminer le trafic de drogue. Avec ses attaques, il s’était fait «des ennemis chez lui et à l’étranger», constate le Christian Science Monitor…  

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