Cet article date de plus de dix ans.

Au Canada, les femmes autochtones mobilisent les réseaux sociaux contre les assassinats

Face aux disparitions et meurtres qui endeuillent leurs communautés, les femmes des peuples autochtones, soutenues par des responsables politiques, font pression pour que le gouvernement ouvre une enquête fédérale.

Article rédigé par Marie-Violette Bernard
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Capture d'écran du fil Twitter de Tami PT Blue Eagle, une Canadienne qui participe à la campagne "Am I next?" (TAMI PT BLUE EAGLE)

"Suis-je la prochaine ?" C'est la question posée au Premier ministre canadien, Stephen Harper, par les femmes autochtones. Elles sont de plus en plus nombreuses à poster des photos d'elles portant une pancarte "Am I next?" sur les réseaux sociaux, pour pousser Ottawa à ouvrir une enquête fédérale sur les disparitions et les assassinats qui touchent leur communauté.

Les femmes autochtones ne constituent que 4,3% de la population féminine canadienne, mais représentaient 23% des homicides de femmes en 2012, explique Radio CanadaCe chiffre, qui n'était que de 8% en 1980, a explosé, alors que le nombre de meurtres de femmes a globablement baissé au Canada durant la même période. Les autochtones représentent en outre 11,3% des disparitions de femmes signalées entre 1980 et 2012, selon un rapport de la gendarmerie royale du Canada.

323 000 signatures pour une enquête fédérale

L'assassinat de Loretta Saunders, une Inuite de 26 ans originaire du Labrador, a mis le feu aux poudres en février dernier, raconte le Globe and Mail (en anglais). La jeune femme écrivait justement une thèse sur ce phénomène au moment de sa disparition. Un drame qui a poussé sa cousine, Holly Jarret, à lancer une pétition sur Change.org

"Notre famille est inuite, et Loretta est devenue l'une des 1 186 femmes autochtones tuées ou portées disparues sur lesquelles elle enquêtait. Nous ne laisserons pas sa mort sans suite et nous nous battrons pour poursuivre le travail de Loretta", explique-t-elle sur le site, où près de 323 000 signatures ont été enregistrées.

Le décès d'une Autochtone de 15 ans, Tina Fontaine, en août, a relancé la mobilisation. Son corps a été retrouvé dans un sac, dans une rivière de Winnipeg, dans le centre du pays. Le hashtag #AmInext est alors apparu sur Twitter. La campagne a depuis largement été reprise, y compris à l'extérieur de la communauté autochtone, rapporte le Huffington Post (en anglais).

"C'est le problème de toutes les femmes"

Le Premier ministre de la Saskatchewan, une province du centre du Canada, ainsi que de nombreux membres des peuples autochtones sont favorables à l'ouverture d'une enquête nationale sur les crimes et les difficultés touchant cette communauté. Mais le gouvernement fédéral a rejeté l'idée à plusieurs reprises, estimant que le problème devait être réglé par la police locale, rapporte Radio Canada (en anglais).

Une décision qui prouve que Stephen Harper et les conservateurs manquent de "compassion", selon la députée libérale Carolyn Bennett, auteure d'une tribune dans le Huffington Post (en anglais). Comme elle, plusieurs membres de l'opposition canadienne réclament une réponse du gouvernement fédéral à la situation, souligne CTV News (en anglais).

Cette demande fait écho à celle des Autochtones, qui espèrent que l'ampleur grandissante de la campagne "Am I next?" parviendra à faire céder Ottawa. "Ce n'est pas un problème aborigène, c'est le problème de toutes les femmes, affirme Amber Shiplack, une habitante de la Saskatchewan citée par Radio Canada (en anglais). Des femmes sont en train de disparaître et nous devons faire quelque chose." Le gouvernement a depuis consenti à organiser une table ronde au sujet des Aborigènes disparues et assassinées, selon le média canadien.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.