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Incendies en Amazonie : à Porto Velho, "les consultations ont explosé, c’est hors de contrôle"

En raison des incendies en Amazonie, de nombreuses régions voient leur ciel recouvert d’une épaisse couche de fumée. Irritations et problèmes respiratoires, ce n’est pas sans conséquence sur la santé, comme l'a constaté franceinfo.

Article rédigé par franceinfo - Matthieu Mondoloni, Eric Audra <br> Édité par Camille Laurent
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Des patients attendent devant l'hôpital de Porto Velho dans la région de Rondonia au Brésil en proie aux incendies, le 28 août 2019. (MATTHIEU MONDOLONI / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Le reportage de Matthieu Mondoloni à Porto Velho

Cela fait plusieurs semaines que Noémia, une habitante du Rondonia, dans l'ouest du Brésil, a des problèmes de santé. "J'ai mal aux poumons, explique-t-elle, alors qu'avant je n'avais jamais eu de problèmes. Quand je respire ça me fait vraiment mal surtout le soir et c'est à cause de cette fumée et de tous ces incendies", condamne-t-elle. Dans la région de Rondonia, en proie aux feux depuis plusieurs semaines, quelque 1 000 nouveaux départs de feu ont été décomptés pour le seul mardi 27 août.

L'hôpital de Porto Velho dans la région de Rondonia dans l'ouest du Brésil, le 28 août 2019. (ERIC AUDRA / RADIO FRANCE)

Noémia n'est pas la seule à souffrir de cet air toxique qui s'accumule. À Porto Velho, la capitale régionale, des dizaines de personnes patientent dans la salle d’attente des urgences pédiatriques. Elle ne désemplit pas, il y a 20 % d'admissions en plus depuis le début des feux. Enzo, cinq mois, somnole dans les bras de Maria, sa grand-mère : "En général il est plutôt éveillé, mais là il est un peu mou à cause de la fumée, se désole-t-elle. Vous voyez, il y a plein d’enfants à l'hôpital, tout ça à cause de cette pollution qui recouvre notre ville. Ça vient des incendies."

La file des patients s'étire jusqu’à l’extérieur du bâtiment. Devant la porte, assise sur un banc, Miliane sort de consultation. Dans ses bras, son fils David, d'à peine deux ans : "Aujourd’hui, je suis là avec mon fils, parce qu’il est fatigué et qu'il tousse depuis plus d’un mois. Je fais des inhalations mais ça ne change rien. J’ai discuté avec la docteure, précise-t-elle, et elle m’a dit 'Miliane, c’est à cause du temps et de toute cette fumée, et ça va continuer'." La jeune femme ne décolère pas : "Cinq fois, je suis venue, cinq fois juste au mois d’août."

Miliane et son fils David à l'hôpital de Porto Velho dans la région de Rondonia au Brésil en proie aux incendies, le 28 août 2019. (MATTHIEU MONDOLONI / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Qui est coupable ? L’être humain, qui décide de mettre le feu. Et qui subit les conséquences ? C’est nous !

Miliane, une patiente de l'hôpital de Porto Velho

sur franceinfo

Habituellement, cet hôpital pour enfants traite 240 patients par jour. Mais depuis les incendies, la fréquentation est en hausse de près de 20%. Une augmentation des malades que constate aussi, dans son cabinet, le docteur Alessandro Alves : "Cela fait 16 ans que je vis à Porto Velho, dit-il, et cette année est la pire de toute, incontestablement. Les consultations ont explosé, c’est hors de contrôle." Le pédiatre reste parfois jusqu’à minuit dans son cabinet pour prendre en charge les enfants. Ils ont toujours les mêmes pathologie, explique-t-il : "Des trachéites, c’est l’inflammation de la trachée, des pneumonies, dont les cas explosent à cette période de l’année, et des sinusites." Les enfants sont les plus vulnérables, tout comme les personnes âgées, les asthmatiques et les gens allergiques.

Le pédiatre Alessandro Alves exerce à l'hôpital de Porto Velho dans la région de Rondonia au Brésil en proie aux incendies, le 28 août 2019. (MATTHIEU MONDOLONI / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Les autorités sanitaires de la région refusent de communiquer des chiffres précis sur le nombre de malades. Officiellement pour elles, il n'y a rien d'anormal. Mais à Porto Velho, c’est l’ensemble de la population qui respire quotidiennement cette épaisse fumée venue des incendies d’Amazonie, dont on ignore encore la totalité des conséquences.

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