Alassane Ouattara, le président élu de Côte d'Ivoire, a appelé à la grève générale à partir de lundi
Cette grève est censée durer jusqu'au départ du président sortant qui se maintient au pouvoir, Laurent Gbagbo, a annoncé un porte-parole du président élu.
La ville a longtemps offert lundi le même spectacle: embouteillages et concert de klaxons, taxis en vadrouille, commerce ouverts. Mais le mouvement a été peu suivi.
Dans le quartier d'Adjamé comme dans celui d'Abobo (nord), fief de Ouattara, les mini-cars de transport collectif, surnommés "gbakas" et très utilisés par les Abidjanais, étaient peu visibles sur les principaux axes. Le long des rues, des centaines d'habitants étaient contraints de regagner leur domicile à pied après le travail.
"L'info n'est pas très bien passée", a expliqué à l'AFP Anne Ouloto, porte-parole de Ouattara, soulignant que son camp ne bénéficiait pas du relais de la radio-télévision d'Etat RTI, contrôlée par le camp Gbagbo.
Motif de satisfaction à Paris pour les pro-Ouattara
Les partisans de Ouattara ont cependant eu un motif de satisfaction à l'étranger.
Une trentaine de partisans d'Alassane Ouattara, qui avaient pris le contrôle dans la journée de l'ambassade de Côte d'Ivoire à Paris, ont cessé l'occupation des lieux lundi soir, a déclaré à l'AFP Marcel Youpeh, "président" du RHDP (camp pro-Ouattara) en France. Ils ont pris le temps de décrocher un portrait de Laurent Gbagbo.
Des policiers français en tenue anti-émeutes bloquaient l'entrée de l'ambassade, située près de l'Arc de Triomphe à Paris, a constaté l'AFP.
Les partisans de M. Ouattara avaient indiqué à l'AFP vouloir rester jusqu'à l'arrivée du nouvel ambassadeur désigné par le président reconnu par la communauté internationale pour remplacer l'ambassadeur Pierre Kipré, un proche de Laurent Gbagbo, qui n'était pas présent lundi.
Menacé d'être renversé par ses voisins d'Afrique de l'Ouest, le président sortant Gbagbo dit "prendre au sérieux" les menaces d'intervention militaire. Dans un entretien au Figaro, il réitère ses accusations de "complot" de la France et des USA.
La crise en Côte d'Ivoire née de la présidentielle du 28 novembre a connu un tournant depuis que la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) a menacé vendredi, en sommet à Abuja (Nigeria), d'user de la "force légitime" si Laurent Gbagbo ne cédait pas le pouvoir à son rival Alassane Ouattara, reconnu président par la communauté internationale, ONU en tête.
Une mission de la dernière chance, envoyée par la Cédéao et composée des présidents béninois Boni Yayi, cap-verdien Pedro Pires et sierra-léonais Ernest Koroma, est toutefois attendue mardi à Abidjan.
Gbagbo parle de "complot" dirigé par la France
Dans son interview au Figaro de lundi, Laurent Gbagbo souligne qu'"ils ont aussi décidé de m'envoyer une délégation. On aurait dû commencer par là. On aurait économisé beaucoup de malentendus".
"S'il y a un désordre intérieur, une guerre civile, il y aura des risques, car nous n'allons pas laisser piétiner notre droit, notre Constitution, ça il faut que cela sorte de la tête des gens, poursuit-il. Nous n'avons pas peur. C'est nous qui sommes agressés. C'est nous qui avons le droit pour nous."
Autre moyen de pression exercée sur le président sortant, l'avion de l'Etat ivoirien utilisé jusqu'alors par Gbagbo, a été immobilisé à l'aéroport franco-suisse de Bâle-Mulhouse, à la demande des "autorités légitimes" de Côte d'Ivoire, c'est-à-dire le camp Ouattara.
Laurent Gbagbo a dénoncé dimanche un complot et affirmé que le "bloc occidental dirigé par la France" était derrière cette initiative mettant en garde contre un risque de guerre civile dans son pays.
C'est la première fois que le Laurent Gbagbo, qui ignore ultimatums et sanctions, est directement menacé d'une opération militaire. Le régime de Laurent Gbagbo a mis en garde contre les graves conséquences économiques et humaines d'une telle opération qui exciterait le patriotisme.
Risque de guerre civile, 14.000 Ivoiriens fuient au Liberia
Environ 14.000 Ivoiriens ont rejoint le Liberia voisin pour échapper aux violences qui ont suivi la présidentielle du 28 novembre. Ils ont été enregistrés par le HCR (Haut commissariat pour les réfugiés de l'Onu) dans l'est du Liberia.
"Les réfugiés viennent de l'ouest de la Côte d'Ivoire et ils sont obligés de marcher plusieurs heures, voire plusieurs jours, avant de traverser en pirogue de nombreux cours d'eau qui marquent la frontière naturelle entre leur pays et le Liberia", a relaté le HCR dans un communiqué. L'organisme onusien a d'ailleurs tenté d'alerter sur la situation des réfugiés: "Les stocks alimentaires s'amenuisent, malgré les efforts déployés par le gouvernement et les agences humanitaires pour apporter davantage de vivres."
Le Conseil des droits de l'homme de l'Onu a imputé aux forces de sécurité ivoiriennes des violations des droits de l'homme, notamment des meurtres et des enlèvements, et appelé à une réconciliation nationale pour prévenir une nouvelle guerre civile.
Ouattara: "La justice sera saisie sur les actes odieux"
Alassane Ouattara a aussi affirmé que pendant le couvre-feu de près d'un mois (du 27 novembre au 21 décembre), "des personnes ont été enlevées et exécutées par des éléments de la Garde républicaine et du Cecos (forces spéciales, ndlr), appuyés par des mercenaires et des miliciens étrangers".
Il a assuré "que la justice sera saisie pour faire la lumière sur ces actes odieux. Une Commission d'enquête nationale sera constituée" dont "les résultats seront rendus publics et les auteurs sanctionnés". Il a rappelé avoir demandé la venue en Côte d'Ivoire d'une mission de la Cour pénale internationale (CPI) "dans les tout prochains jours".
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