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Tunisie : les autorités multiplient les coups de force en pleine crise politique

A Tunis comme dans les montagnes, les forces de sécurité tunisienne s'activent contre les islamistes radicaux. Une manière pour le gouvernement d'Ennahda d'asseoir sa légitimité dans un contexte de crise.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Des partisans d'Ennahda manifestent leur soutien au gouvernement dans les rues de Tunis (Tunisie), le 3 août 2013. (FETHI BELAID / AFP)

La démonstration de force du gouvernement contre des groupes soupçonnés de terrorisme se poursuit en Tunisie. Le ministère de l'Intérieur a annoncé, dimanche 4 août, un coup de filet à Ouardia, dans la banlieue sud de Tunis. Un suspect a été tué et quatre complices arrêtés. 

Ce type d'opérations se multiplie depuis fin juillet, une manière pour le gouvernement d'asseoir sa légitimité dans un contexte de grave crise politique. Francetv info retrace le fil des derniers évènements qui ont secoué le pays.

Acte I : un opposant assassiné

L'événement déclencheur a eu lieu le 25 juillet : Mohamed Brahmi, député et coordinateur général du Mouvement populaire, un parti d'opposition, est assassiné, criblé de balles devant sa famille par un groupe inconnu.

Le meurtre sanglant de l'opposant en rappelle un autre : celui de Chokri Belaïd, issu du même camp et tué en février avec le même mode opératoire. La veuve de Belaïd avait à l'époque accusé le parti islamiste Ennahda, au pouvoir, d'être responsable de cet assassinat pour avoir fermé les yeux sur l'activité des islamistes radicaux.

Le parti a démenti toute implication et qualifié les deux assassinats d'actes terroristes, sans convaincre l'opposition laïque.

Acte II : manifestations massives des deux camps

Comme après l'assassinat de Chokri Belaïd, plusieurs milliers de personnes descendent dans les rues de Tunis et d'autres villes du pays après l'assassinat de Brahmi, pour réclamer la démission du gouvernement et la dissolution de l'Assemblée nationale constituante (ANC). 

Le crise née de l'assassinat de Belaïd intervient dans un contexte déjà marqué par un blocage politique : les travaux de l'ANC sont paralysés depuis des mois faute d'un compromis réunissant les deux-tiers des députés pour adopter la Constitution tunisienne.

Les manifestations se poursuivent dans les jours suivants. En cette période de ramadan, partisans d'Ennahda et opposants descendent chaque soir dans les rues, après la rupture du jeûne, se faisant face dans une atmosphère très tendue. Loin de laisser le terrain à l'opposition, le parti au pouvoir s'organise. La contre-offensive politique culmine samedi 3 août au soir : une manifestation massive à Tunis rassemble des dizaines de milliers de partisans du pouvoir.

"Ceux qui ont cru que le scénario égyptien pouvait être répété ici ont tout faux. La Tunisie a été une inspiration avec sa révolution, et elle ne va pas importer un coup d'Etat", déclare devant la foule Rached Ghannouchi, chef d'Ennahda, en référence au renversement du président égyptien, Mohamed Morsi.

Acte III : offensive de terrain contre les islamistes radicaux

Entre-temps, les autorités, désireuses de contrer les accusations de laxisme, ont lancé une campagne coup de poing contre les islamistes radicaux.

Une offensive militaire a lieu vendredi 1er août près du mont Chaambi, dans l'ouest du pays, où huit soldats tunisiens ont été sauvagement assassinés quatre jours auparavant, sans que les autorités n'en commentent les résultats.

Parallèlement, les forces de l'ordre annoncent plusieurs opérations contre des "extrémistes religieux" et des "terroristes". Outre le coup de filet dans la banlieue de Tunis, où des armes ont été saisies, deux hommes sont arrêtés dans le sud du pays, à la frontière avec la Libye. La zone est en proie à un trafic d'armes important depuis le début du Printemps arabe. Enfin, la police indique avoir déjoué un assassinat politique contre une personnalité non-identifiée, et arrêté deux "terroristes très dangereux" et saisi des armes à Sousse, au sud de Tunis.

Mais si les autorités assurent qu'un lien existe entre les hommes traqués au mont Chaambi et les meurtriers de Brahmi, aucune arrestation directement en lien avec l'assassinat de l'opposant n'a pour l'instant été révélé. Le gouvernement ne donne par ailleurs aucun élément précis sur les faits reprochés aux personnes interpellées, alimentant les spéculations.

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