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Coronavirus en Afrique : des milliers de migrants et de réfugiés pris au piège

Face à la propagation du coronavirus, l'inquiétude est grande dans les camps de réfugiés et de déplacés internes disséminés dans les pays africains ravagés par les conflits.

Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Un groupe de migrants interceptés par les garde-côtes libyens au large de la ville de Khom, à 120 km à l'est de Tripoli, le 1er octobre 2019. (MAHMUD TURKIA / AFP)

A l'occasion de la Journée mondiale des réfugies, nous vous proposons cet article, publié le 25 mars 2020.

Ils sont encore des milliers à être entassés dans les centres de rétention en Libye. La plupart ont été placés dans ces lieux de détention sinistres, après avoir tenté, sans succès, de rejoindre l'Europe par la Méditerranée. Ces migrants, déjà vulnérables, n'ont aucune chance de s'en tirer, redoute le responsable de la Commission libyenne des droits de l'Homme, Walid Elhouderi. Il s'attend à une grave catastrophe humaine si rien n'est fait pour sauver ces milliers de personnes.

Il faut fermer ces camps de concentration. Ces camps de la mort. Il faut aider à rapatrier ces gens vers leurs pays. Il faudrait aussi aider ceux qui le demandent à obtenir un asile en Europe.

Walid Elhouderi, Commission libyenne des droits de l'Homme

à RFI

En Libye, comme dans d'autres pays africains confrontés à l'insécurité, les réfugiés et les populations déplacées dans leur propre pays vivent déjà dans des conditions épouvantables. Ces personnes sont souvent concentrées dans des camps où sévissent d'autres épidémies comme le choléra et la rougeole. Aussi, l'arrivée du coronavirus dans leurs baraquements équivaudrait à une condamnation à mort pour la majorité d'entre eux. 

"Des foyers très dangereux de la maladie"

Rien qu'au Burkina Faso, où les mouvements jihadistes multiplient des attaques sanglantes, on compte quelque 765 000 déplacés internes auxquels il faut ajouter 30 000 réfugiés maliens et nigériens qui ont fui l'insécurité dans leurs pays. Si on découvre des cas avérés dans des camps, avec la promiscuité, le pays pourrait être "un foyer dangereux de la maladie" pour toute l'Afrique de l'Ouest, prévient un spécialiste interrogé par Radio DW. Une inquiétude déjà exprimée par l'Organisation mondiale de la santé (OMS).

Je crains que les gouvernements ne fassent rien pour des personnes qui ont été forcées de fuir leur pays d'origine, qui ont tout perdu et qui survivent tant bien que mal dans des camps et dans des conditions abjectes

Mike Ryan, responsable du programme d'urgence sanitaire à l'OMS

Au Tchad, le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) doit s'adapter à la nouvelle donne. Il gère des camps abritant 600 000 ressortissants soudanais, centrafricains et nigérians sur des sites où règne souvent l'insalubrité. Difficile d'imaginer la prise en charge médicale de tout ce monde quand le virus se sera propagé dans leurs tentes.

Piégés et démunis face à la pandémie

Qu'ils soient réfugiés, déplacés ou migrants, ils sont des centaines de milliers à travers l'Afrique à être piégés et démunis face à la pandémie du coronavirus. Les conséquences se font déjà sentir, y compris pour les migrants subsahariens résidant dans des pays en paix comme la Tunisie. Dans ce pays plutôt tolérant, ils ont perdu toutes leurs sources de revenus depuis l'entrée en vigueur du confinement sanitaire total de la population et l'instauration d'un couvre-feu. La plupart d'entre eux vivaient de petits boulots. Ils sont désormais livrés à eux-mêmes.

"Il faut savoir que tant qu'ils ne sont pas terrassés par la maladie, les membres de cette communauté, qui sont pour la plupart des irréguliers, ne vont pas avoir recours à un médecin", confie un responsable de Médecins du Monde Tunisie à l'hebdomadaire Jeune Afrique.

Face à la flambée épidémique, le nombre de migrants à l'assaut de la Méditerranée s'est toutefois réduit comme peau de chagrin, remarque le journal tunisien La Presse. Les candidats au départ hésiteraient de plus en plus à mettre le cap sur Lampedusa, rapporte notre confrère qui ajoute toutefois "qu'il n'est pas exclu qu'ils reviennent à la charge une fois ce redoutable virus vaincu". Mais on n'en est pas encore là.

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