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Lac Tchad: cible de Boko Haram, les piroguiers de Bol arrêtent le travail

A Bol, principale ville du lac Tchad, les piroguiers refusent de naviguer depuis qu'ils ont été attaqués dans les eaux nigérianes par les combattants de Boko Haram qui ont sauvagement assassiné sous leurs yeux cinq de leurs collègues. Résultat: l'insécurité qui règne met en péril une économie déjà fragile axée essentiellement sur la pêche, l'élevage et l'agriculture.
Article rédigé par Dominique Cettour-Rose
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Un survivant de l'attaque de Boko Haram, à Bol, le 25 janvier 2015. (AFP PHOTO / SIA KAMBOU)

Adam Hassan, 20 ans, raconte avoir échappé, il y a quelques mois, aux assaillants de Boko Haram, «bien armés» et le visage enturbanné de noir, portant de longs couteaux et des kalachnikovs en bandoulière. Ce jeune Tchadien rescapé revenait alors, à bord de sa pirogue chargée de marchandises, de Baga, autre ville nigériane tombée aux mains du groupe islamiste début janvier 2015.

Malgré un important dispositif de sécurité mis en place par l'armée tchadienne jusqu'à la frontière, la navigation reste «très dangereuse». Un responsable de la police locale, avoue qu’il est impossible de contrôler toutes les allées et venues sur les centaines de petites îles et les innombrables chenaux qui parcourent le quatrième plus grand lac africain. Ce qui rend difficile la lutte contre les trafics en tout genre, comme la pêche illégale ou le trafic de Tramadol en provenance du Nigeria, drogue particulièrement prisée par Boko Haram.

Un bateau de la police tchadienne patrouille sur le lac Tchad, le 25 janvier 2015. (PHOTO / PATRICK FORT)

L'insécurité est lourde de conséquences pour les échanges commerciaux entre pays riverains: Nigeria, Tchad, Cameroun et Niger. «Depuis qu'ils ont fermé la frontière avec le Nigeria, on est foutus», déplore une vendeuse du marché de Bol, aux allées quasiment désertes. Avant, de longues pirogues en bois partaient chaque semaine en direction du Nigeria, chargées de viande, poisson fumé, patates ou manioc. En sens inverse, sucre, piles, huile d'arachide, vêtements ou savons remplissaient les marchés de Bol.
 
«Nous n'avons pas d'industrie ici, ces produits sont essentiels», explique Maï Moussa, responsable de l'Association pour le développement économique et social du lac (Adesol), une ONG locale, en montrant les terres arides tout autour, où les Tchadiens pratiquent essentiellement la pêche, l'élevage et l'agriculture. 

«Je n'ai plus de travail», explique de son côté un piroguier, Idriss Ali Haroun. «Moi qui n'ai pas été à l'école, qu'est-ce que je peux faire? Le lac est tout pour nous», ajoute-t-il. 

Les camions ont pris le relais des pirogues et font un immense détour en contournant le lac par le nord-ouest, à travers la région de Diffa au Niger, avant de redescendre au Tchad. Résultat, beaucoup ont perdu leur emploi et «tout est plus cher», regrette Moussa Maï.

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