Soudan: le président Omar al Béchir à la recherche d’une nouvelle respectabilité
Mettant fin à près de 3 ans, 30 mois exactement, d’exil volontaire dans la capitale égyptienne, Sadek al Mahdi, chef du puissant parti soudanais de l’Oumma, est rentré le 26 janvier 2017 à Khartoum.
Un retour aussi populaire que politique
Même si, selon sa fille Mariam, certains de ses partisans ont été empêchés d’atteindre l’aéroport, l’ancien premier ministre soudanais a été accueilli par de nombreux responsables de l’opposition avec portraits et banderoles attestant d’un retour aussi populaire que politique.
Agé de 81 ans, le dernier premier ministre démocratiquement élu, avant d’être chassé en 1989 par le putsch de l’actuel président, Omar al Béchir, Sadek al Mahdi avait quitté Khartoum pour le Caire en août 2014, après un mois de détention. Il avait été emprisonné pour avoir dénoncé des exactions des janjawids, les milices gouvernementales, contre des civils au Darfour. Une région en rébellion contre le pouvoir central dans l'ouest du pays.
Libéré sur instruction du chef de l’Etat après des manifestations contre son arrestation, violemment réprimées, l’opposant encourait la peine de mort pour trahison en cas de condamnation.
Sadek al Mahdi adhère à «l'Appel du Soudan»
Au cours de son exil cairote, il avait signé avec d’autres formations politiques, des groupes rebelles et des représentants de la société civile, un accord baptisé «l’Appel du Soudan», prônant une transition politique pacifique dans le pays.
«Je suis revenu pour arrêter la guerre, rétablir la paix et œuvrer pour une transition démocratique», a-t-il déclaré devant des milliers de partisans rassemblés à Omdourman, son fief dans les faubourgs de la capitale. «Je travaillerai avec toutes les parties pour mettre fin aux hostilités et faire parvenir les aides humanitaires à tous ceux qui en ont besoin», a encore ajouté le célèbre opposant.
Gage de fréquentabilité de la part du président al-Béchir, recherché par la Cour pénale internationale pour «crimes de guerre et génocide» au Darfour, ou montée en puissance d’une opposition unie ? Le retour de l’opposant numéro 1 intervient deux semaines après l’annonce par l’administration Obama d’une levée de certaines sanctions économiques contre le Soudan, en raison d’avancées «positives» de la part de Khartoum au cours des six derniers mois.
Dans un courrier adressé au Congrès et rendu public par la Maison Blanche, Barack Obama faisait état en particulier d’«une réduction marquée des activités militaires confortée par un engagement à maintenir la cessation des hostilités» et d’efforts pour améliorer les opérations humanitaires à travers le pays. Le président américain sortant souligne même la coopération de Khartoum avec Washington pour «répondre aux conflits régionaux et à la menace du terrorisme».
Les efforts de l'administration Obama pour régler le conflit
Une décision qui semble accompagner les efforts déployés par l’envoyé spécial américain pour le Soudan. Après l’échec des réunions d’Addis Abeba en août 2016, à trouver une sortie de la guerre, Donald Booth a rencontré à plusieurs reprises des représentants des groupes rebelles et du gouvernement pour aplanir les divergences entre les deux parties.
Le 9 janvier 2017, le ministre soudanais de l’information, Ahmed Bilal Osan, avait même révélé «une initiative américaine pour la tenue d'une réunion entre le gouvernement et l'opposition armée à Paris, les 20 et 21 janvier.»
Pour l’heure, l’opposition, dont «l’Appel du Soudan», continue d’œuvrer au rassemblement d’un large front pour renverser le régime. De son côté, ce dernier continue d’appeler tous les groupes à adhérer au document élaboré lors du dialogue national organisé par le pouvoir entre octobre 2015 et octobre 2016, et à participer à un gouvernement de transition. Ce dialogue avait été boycotté à l'époque par la plupart des groupes armés et des partis d’opposition.
En rapport ou pas avec le retour de Sadek al-Mahdi au bercail ? Fin décembre 2016, les députés soudanais ont voté le rétablissement du poste de Premier ministre, supprimé depuis la prise de pouvoir du président Omar al Béchir.
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