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Le Somaliland et Taiwan signent un rapprochement diplomatique très intéressé

Les deux pays ouvrent des représentations diplomatiques croisées pour mettre fin à leur isolement politique.

Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Lou Chen-hwa (G), représentant de Taïwan au Somaliland, et Hagi Mohamoud, ministre des Affaires étrangères somalilandais, ont inauguré le 17 août le Bureau de représentation de Taïwan en république du Somaliland. (Ministère taiwanais des Affaires étrangères)

C'est un étonnant tandem que sont en train de constituer Taïwan et le Somaliland en ouvrant des représentations diplomatiques croisées. Celle de Taïwan à Hergeisa a été inaugurée lundi 17 août, et celle du Somaliland à Taipei le sera dans les jours suivants.

Une association de deux pays marginalisés qui ne pèsent guère sur l'échiquier mondial. Deux pays dont la survie est chaque jour plus menacée et qui, jusqu'à présent, n'avait pas montré d'intérêt réciproque. En se rapprochant diplomatiquement chacun espère gagner en influence.

Taïwan joue sa survie politique

L'île de Taïwan est depuis 1949 et l'avènement des communistes en Chine, le refuge des nationalistes chinois. Une deuxième Chine que Pékin considère comme partie intégrante du territoire et menace régulièrement d'annexion.
L'île ne doit son salut qu'au soutien indéfectible des Etats-Unis dans sa lutte contre l'expansion du communisme.

Mais les temps changent, le communisme ne fait plus figure de menace, et Taïwan est de plus en plus isolée diplomatiquement. L'île n'est pas reconnue comme pays par l'ONU, ce qui ne l'empêche pas de tisser des liens avec de nombreux pays. Mais il n'y a plus que 15 pays à reconnaître officiellement son indépendance. Le travail de sape de Pékin paye qui a "retourné" en quatre ans pas moins de huit alliés de Taipei. Un isolement qui peut signer à terme la fin du régime taïwanais.

Pékin à la manœuvre

Il lui faut donc élargir son cercle de pays amis, mais les cibles sont rares et peu influentes à l'image du Somaliland, ignoré par Pékin dans sa politique africaine de Soft Power.
Le pays, ancienne région de la Somalie a déclaré unilatéralement son indépendance en 1991, suite à la chute du dictateur Siad Barre à Mogadiscio. Dans le chaos absolu qui a suivi en Somalie, et qui dure encore, le Somaliland n'a pas eu beaucoup de peine à assurer son indépendance, mais il n'a pas obtenu de reconnaissance internationale.

Chercher des alliés

Hargeisa n'a pas grand chose à perdre en se rapprochant du camp occidental. D'autant que le Somaliland a un atout incontestable, sa position géostratégique sur le golfe d'Aden. L'opérateur portuaire émirati DP World s'est du reste déjà engagé à investir 400 millions de dollars dans le port de Berbera. Un quai de 400 m vient d'être achevé.

Tapei Act

Pour le Somaliland ce rapprochement diplomatique est peut-être aussi dicté par l'intérêt du "Taipei Act" américain. Ratifié le 26 mars 2020 par Donald Trump, son objectif est d’ "exprimer le soutien des Etats-Unis aux alliances diplomatiques de Taïwan à travers le monde". Ainsi, Washington promet "un accroissement de son engagement diplomatique, sécuritaire et économique" aux amis de Taïwan.

En jouant ainsi "au caillou dans la chaussure" de son principal adversaire, chaque pays montre qu'il existe encore. Taïwan pose un pion en Afrique, devenue un fief chinois, et gagne enfin un allié. Le Somaliland renvoie à Mogadiscio l'image d'un pays qui serait enfin devenu mature.

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