La loi islamique (charia) imposée par le long règne d'un pouvoir martial a mis sous le boisseau toute velléité d'émancipation des femmes au Soudan. La ligue féminine de football, qui comprend 21 clubs, est donc une organisation inédite dans ce pays dirigé pendant près de trente ans par le général Omar el-Béchir – arrivé au pouvoir grâce à un coup d'Etat soutenu par les islamistes – jusqu'à sa destitution sous la pression de la rue le 11 avril 2019.La première des rencontres a opposé les clubs de Tahadi et de Difaa dans l'enceinte du stade de la capitale. Les villes de Madani (est), Al-Obeid (centre) et Kadugli (sud) accueilleront également des matches. "Pouvoir civil, pouvoir civil", a scandé la foule dans les gradins, tandis que d'autres criaient "Kandaka, Kandaka", allusion aux reines nubiennes ayant marqué l'histoire de la région dans l'Antiquité. Et référence plus récente à la jeune Alaa Salah, tout de blanc vêtue, devenue l'icône de la révolte populaire du printemps 2019.A la suite d'un accord conclu en août entre l'armée, qui avait pris le pouvoir tout de suite après la chute de M. Béchir, et les meneurs de la contestation, le Soudan a vu se mettre en place des institutions de transition vers un pouvoir civil. Tel le Conseil souverain, à majorité civile et dirigé par un militaire, chargé de superviser la transition. L'instance comprend deux femmes. Aisha Mousa (à droite sur la photo), membre du Conseil souverain, qui supervise la transition vers un pouvoir civil, félicite les joueuses de Difaa, l'une des équipes du premier championnat de foot féminin au Soudan, le 30 septembre 2019. (ASHRAF SHAZLY / AFP) La société soudanaise attend des changements et plus de liberté"C'est une rencontre historique, pas seulement pour le sport féminin, mais pour le Soudan tout entier", a déclaré la ministre des Sports Wala Essam, qui a assisté au match aux côtés de diplomates soudanais et étrangers. "Nous accorderons une attention spécifique au sport féminin et au football féminin", a-t-il ajouté.Des mesures de libéralisation de la société sont attendues de la période de transition d'un peu plus de trois ans dans laquelle le pays s'est engagé, notamment en matière de liberté d'expression, d'égalité femmes-hommes, mais aussi dans le sport et les arts.Membre de la Fifa depuis 1948 et co-fondateur de la Coupe d'Afrique des nations (CAN) avec l'Egypte, l'Ethiopie et l'Afrique du Sud, le Soudan est en train d'écrire un nouveau chapitre de sa longue histoire avec le football et sera peut-être en mesure d'envoyer une sélection de joueuses à l'une des prochaines Coupes d'Afrique des nations féminines.