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Migrants: la «route de l’Espagne», itinéraire de tous les dangers
Les corps de 16 migrants ont été repêchés le 3 février 2018 au large des côtes marocaines, dans le bras de mer avec l'Espagne. La «route espagnole» (on parle aussi de «route méditerranéenne occidentale») des migrations fait l'objet d'une recrudescence des tentatives de traversée de la Méditerranée par les migrants depuis le début de l'année.
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Quinze des victimes sont originaires d'Afrique subsaharienne, et la seizième est de nationalité marocaine, a indiqué dimanche à l'AFP une source médicale à la morgue de Nador. C’est dans cette ville du nord-ouest du Maroc que la majorité des corps ont été transférés. Un peu plus tôt, la préfecture de l'enclave espagnole de Melilla, voisine de Nador, avait communiqué un bilan de «près d'une vingtaine» de cadavres repêchés en mer par les secours marocains dans leurs eaux territoriales.
Les autorités marocaines n'ont pas communiqué sur le sujet.
La découverte de ces derniers corps intervient alors que la «route espagnole» est de plus en plus empruntée par les migrants subsahariens qui tentent d'atteindre l'Europe.
Au 30 janvier 2018, selon le dernier bilan de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) publié sur son site, l'Espagne est devenue le deuxième point d'entrée avec 1237 arrivées par mer depuis le début de l'année, après l'Italie (3176) et avant la Grèce (1089). Depuis le début de l'année 2018, 343 migrants ont disparu ou péri en mer Méditerranée, selon un bilan de l'OIM établi au 5 février 2018.
En 2017, les arrivées par mer ont triplé par rapport à 2016, atteignant un total de 21.300 migrants par cette «route espagnole», selon Frontex, l'organisme chargé par l’UE de la surveillance des frontières de l’Union. Principaux pays d’origine de ces migrants: le Maroc (4813 personnes), l’Algérie (4208) et la Côte d’Ivoire (3163). En juillet 2017, on signalait une augmentation du nombre de Marocains en provenance de la région du Rif (nord) où un mouvement populaire réclame le développement de cette région marginalisée. De la même façon, les Africains se détournent de la Libye, pays de tous les risques et de tous les dangers.
En 2017, 222 migrants seraient morts en tentant la traversée par cet itinéraire ouest-méditerranéen.
«Barques de la mort»
Selon un responsable de l'Association marocaine des droits de l'Homme à Nador, Omar Naji, «les migrants étaient auparavant plus nombreux à tenter d'escalader la haute barrière de Melilla» pour se rendre dans l'enclave espagnole. Mais en raison d'un «renforcement du dispositif de contrôle de cette barrière, la seule possibilité pour (eux) est de passer par la mer», explique-t-il. Les enclaves espagnoles de Melilla et Ceuta sont les deux seules frontières terrestres entre l'Afrique et l'Union européenne. Jusque-là, elles étaient des accès privilégiés pour l'immigration clandestine.
Cette filière migratoire maritime «est gérée par des trafiquants» qui «demandent à chaque candidat de payer 3000 euros», ajoute Omar Naji. Selon lui, ce «trafic se fait sous les yeux des autorités».
De son côté, le président de l'Association grand Rif des droits de l'Homme, Saïd Chramti, fustige des «mafias de l'immigration clandestine qui transportent les migrants dans des barques de la mort». Ce sont eux les «responsables de ces drames humains». Mais «en serrant la vis à l'immigration, l'Europe a aussi sa part de responsabilité, au même titre que le Maroc qui a échoué à lutter contre les réseaux migratoires clandestins» dans ses eaux territoriales, estime le représentant associatif.
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