Maroc : l'historien Maâti Monjib en liberté provisoire après 19 jours de grève de la faim
Il avait été jugé et condamné en même temps que six journalistes et militants qui ont écopé de peines allant jusqu'à un an de prison.
Affaire de droit commun ou politique ? L'intellectuel avait entamé sa grève de la faim le 4 mars en demandant "sa remise de liberté immédiate". L'historien et défenseur des droits humains franco-marocain Maâti Monjib, en grève de la faim depuis 19 jours, est sorti de prison, mardi 23 mars, après trois mois de détention, le juge d'instruction ayant décidé de le remettre en liberté provisoire. Selon Tel Quel, Maâti Monjib se serait vu confisquer son passeport et signifier une interdiction de quitter le territoire.
"Les accusations contre moi sont fabriquées par la police politique (...) maintenant que je jouis de la liberté provisoire, je vais militer pour la libération des autres détenus (d'opinion)"
Maâti Monjib, historienà l'AFP
Critiques du pouvoir
Visiblement amaigri mais heureux, l'intellectuel de 60 ans a été accueilli par ses amis et soutiens quand il a quitté en marchant la prison d'El Arjat, près de Rabat, où il avait été incarcéré après son arrestation fin décembre. Ce militant, connu pour ses critiques ouvertes du pouvoir, dénonçait une arrestation "abusive" depuis son interpellation dans le cadre d'une enquête préliminaire pour "blanchiment de capitaux". Parallèlement, il a ensuite été condamné à un an de prison le 27 janvier pour "fraude" et "atteinte à la sécurité de l'Etat" au terme d'un procès ouvert en 2015 et plusieurs fois reporté. Ses avocats et son comité de soutien s'étaient indignés de ce jugement, rendu en l'absence de l'accusé et sans convocation de sa défense. Face aux critiques, les autorités marocaines mettent toujours en avant l'indépendance de la justice et la conformité des procédures.
"Toutes les allégations relayées pour le présenter comme celui qui a été privé de son droit à la défense et d’un procès équitable restent infondées juridiquement et dans les faits"
Conseil supérieur du pouvoir judiciaireà la MAP
"Délit d'opinion"
Le secrétaire général de l'ONG Reporters sans Frontières, Christophe Deloire, a salué cette libération en appelant "à l'abandon de toutes les poursuites iniques lancées contre des journalistes au Maroc".
THREAD Nous sommes tellement heureux d'apprendre la libération de @MMonjib, quatre jours après l'action menée par @RSF_inter devant l'ambassade du Maroc à Paris. L'iniquité évidente de la procédure et son état de santé le réclamaient. Un grand merci à tous ceux qui l'ont soutenu pic.twitter.com/RnLtCjNjxI
— Christophe Deloire (@cdeloire) March 23, 2021
Il y a près de deux semaines, Maâti Monjib avait fait déposer une plainte à Paris pour "harcèlement moral", "mise en danger de la vie d'autrui" et "atteinte à la liberté individuelle par des personnes exerçant une fonction publique", ce dernier point correspondant en droit pénal français à la détention arbitraire. L'historien "est l'une des voix critiques les plus emblématiques du régime marocain, dénonçant notamment la mainmise des services de sécurité (...), qui s'apparentent à une vraie police politique", avaient alors souligné ses avocats français. Maâti Monjib souffre de troubles cardiaques et de diabète, problèmes médicaux qu'il avait évoqués sur sa page Facebook en annonçant qu'il avait été contaminé par le coronavirus.
#MaatiMonjib LIBÉRÉ ! https://t.co/MXkPqm8y6U
— RSF (@RSF_inter) March 23, 2021
Journalisme d'investigation
Maâti Monjib a toujours nié les faits qui lui sont reprochés, à savoir des malversations dans la gestion d'un centre qu'il avait créé notamment pour promouvoir le journalisme d'investigation. Il a affirmé que son arrestation était liée à un article récent sur "l'état parallèle" qui "cible" les militants au Maroc. Il a été jugé et condamné en même temps que six journalistes et militants qui ont écopé de peines allant jusqu'à un an de prison. Trois d'entre eux ont quitté le Maroc avant d'obtenir l'asile politique en France et aux Pays-Bas.
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