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Flambée de violences en Ogaden, dans l'est de l'Ethiopie

Émeutes, pillages, commerces brûlés: Jigjiga, la capitale de l’Ogaden (sud-est) connaît depuis le 4 août 2018 un regain de violences. Des clashs ont opposé la police régionale à l’armée fédérale, massivement déployée. Cette région, peuplée d'habitants d'ethnie somalie à majorité musulmane, connaît des troubles liés à des mouvements séparatistes mais aussi à des conflits pour la terre et l’eau.
Article rédigé par Michel Lachkar
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3min
L'armée fédérale éthiopienne s'est déployée à Jigjiga, capitale de l'Ogaden, dans le sud-est de l'Ethiopie.  (AFP PHOTO / STRINGER)

Les raisons de la soudaine flambée de violences qui a débuté le 4 août dans l’est de l’Ethiopie ne sont pas encore bien établies. Elles seraient liés au déploiement de l'armée éthiopienne dans la principale localité de l’Ogaden. Des images, circulant sur les réseaux sociaux, montrent des véhicules blindés dans les rues de la capitale régionale, Jigjiga.

L'ambassade américaine à Addis Abeba affirmait le 4 août, dans un communiqué, que l'armée éthiopienne avait «pris le contrôle de routes clés, d'immeubles gouvernementaux et de l'aéroport de Jigjiga».
 
Selon plusieurs sources, l'armée fédérale aurait affronté la police Liyu, une force paramilitaire créée en 2007, pour combattre les rebelles de l'ONLF (Front national de libération de l’Ogaden). D'ethnie somalie, bien armée et aguerrie, cette police régionale, placée sous les ordres du président de la région Abdi Ilay, rassemblerait 40.000 à 50.000 hommes.

Commerces brûlés
L'arrivée des troupes fédérales semble avoir provoqué la colère de la population somali. Ces violences auraient entraîné des pillages de commerces et des destructions de bâtiments.​ «Tout le monde reste à l'intérieur de sa maison. Personne n'en sort », a déclaré à l'AFP par téléphone un habitant de Jigjiga ayant requis l'anonymat. «Tant de mes voisins (...) ont perdu leurs hôtels, leurs magasins, leurs maisons, tout. Des foyers ont tout perdu», a ajouté ce résident, se disant en danger en raison de son ethnicité amhara. 

Un autre habitant, appartenant à l'ethnie oromo, la plus importante du pays, a expliqué qu'il était abrité par une famille somalie pour le protéger de la redoutée Liyu, régulièrement accusée d'abus par les groupes de défense des droits de l'Homme. Selon lui, «des émeutiers vidaient les coffres des banques et mettaient le feu à des églises» dans cette région à majorité musulmane.

Dans le colimateur du nouveau premier ministre 
Depuis l'arrivée au pouvoir du nouveau Premier ministre réformateur Abiy Ahmed à la tête du pays, le président de la région Ogaden était dans le collimateur d'Addis Abeba. L'Etat central pourrait avoir tenté un coup de force contre lui. L'homme est très contesté par une partie de la population. Plusieurs organisations l'accusent de violations des droits de l'Homme et de divers trafics entre la Somalie et l'Ethiopie.

La région somalie est la deuxième plus grande d'Ethiopie, après la région oromo, mais aussi la plus instable. En 2017, des affrontements entre membres des ethnies oromo et somalie avaient fait plus d'un million de déplacés.

Divisions ethniques
Le pays est divisé en neuf régions administratives selon un système dit de «fédéralisme ethnique». Celui-ci est censé donner un degré d'autonomie aux différentes ethnies. Mais il est accusé dans les faits d'exacerber les sentiments d'appartenance et d' «ethniciser» d'anciens différends fonciers.

Les violences ont commencé par des rivalités pour l’accès à la terre et aux ressources en eau (alimenté par une sécheresse en 2017). Les éleveurs somalis traversent les terres des agriculteurs oromos et convoitent les points d'eau.

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