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FIFF 2017.«Enquête au paradis»: la propagande islamiste détricotée par Allouache

«Tahqiq fel Djenna (Enquête au paradis)», le documentaire de Merzak Allouache projeté au Festival international du film francophone de Namur (FIFF), peut être considéré comme une œuvre d'utilité publique. Car le film aide à comprendre et à défaire cette idée du paradis répandu par les prêches salafistes à destination des jeunes. Notamment en Algérie.
Article rédigé par Falila Gbadamassi
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 4min
  (​Photo du film «Enquête au paradis» de Merzak Allouache )

Comment imaginez-vous le paradis? Dans le dernier film du cinéaste franco-algérien Merzak Allouache, Tahqiq fel Djenna (Enquête au paradis), présenté dans la section Regards du présent au Festival international du film francophone de Namur (29 septembre au 6 octobre 2017), cette question est loin d’être anodine.

Une vie pour 72 vierges célestes
Elle est l'une des clés pour comprendre pourquoi des milliers de jeunes hommes se transforment en kamikazes sous l’influence de prédicateurs salafistes leur promettant un accès direct, en tant que martyrs, au paradis. Un lieu où ils trouveront, notamment, 72 vierges célestes (houris).

Dans le «documentaire fictionné» d'Allouache, Nedjma est une journaliste qui mène l'enquête en Algérie, avec son collègue Mustapha, sur ce fameux paradis. Les premiers à qui ils donnent la parole sont bien évidemment les jeunes qui sont la cible de ces prêches. Artistes, écrivains, activistes, religieux et ancien salafiste répondent à la question tout en analysant ses implications, notamment pour les femmes et la société algérienne. 

L’enquête de Nedjma est méticuleuse. Elle établit d’abord que les jeunes ont définitivement enregistré cette promesse paradisiaque. A sa question, l'un d'eux répond en substance: «Ici, ce n’est pas le paradis parce qu’il n’y a pas de femmes». Sur Terre, elles paraissent inacessibles. Mais dans ce «paradis», où il n'est jamais fait mention de femmes «normales», il devrait en être autrement avec les houris.

«Les jeunes s’interdisent tout, s’infligent tout», note l'un des interlocuteurs de Nedjma. La «frustration sexuelle» fait ainsi le lit de l’idéologie wahhabite (islam rigoriste) venue d’Arabie Saoudite, clairement identifiée comme à l’origine de cette vision qualifiée par l’écrivain algérien Kamel Daoud de «porno-islamisme».


Le paradis décrit par l'idéologie wahhabite est devenu «un produit de consommation» qui «légitime la mort»
Enquête au paradis, filmé en noir et blanc, est une démonstration efficace de ce que les musulmans ne cessent de répéter à la planète depuis que le terrorisme islamiste sème la terreur dans le monde: tout cela est contraire à l'islam.

Dans le même registre, le roi du Maroc, Mohammed VI, avait déclaré en 2016: «Est ce qu’une personne saine d’esprit peut croire que des vierges au Paradis sont la récompense pour le djihad?» L'idée fait pourtant toujours autant de dégâts auprès des jeunes, d'autant que l'ancien salafiste Omar Belkhala fait remarquer que «l'individu jeune réfléchit mal».

«C'est le monde entier qui vit désormais ce qu'a vécu l'Algérie avec le terrorisme», confie-t-on à Nedjma. Car c'est une certitude pour nombre de ceux à qui la journaliste tend son micro: c'est déjà cette idéologie wahhabite qui a plongé le pays dans la décennie noire.

Désormais, elle se répand via les autouroutes de l'information et les écrans du monde entier. Ce «paradis» devient «un moyen de légitimer la mort» et «un produit de consommation», la résultante d'une bataille culturelle financée par l'Arabie Saoudite qui a les moyens de sa politique, constate-t-on dans le document de Merzak Allouache. Le royaume wahhabite semble avoir exporté une philosophie qu'elle s'applique à elle-même, note un militant démocrate, pour justifier «la répression» et favoriser la «résignation»

Si la guerre est culturelle, Enquête au paradis est certainement l'un des moyens de la gagner. Le documentaire de Merzak Allouache a déjà été couronné par le Fipa d’or (Festival international des programmes audiovisuels) en janvier 2017 et par le jury œcuménique de la 67e Berlinale.

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