Cet article date de plus de huit ans.

RDC: la peur d’un bain de sang tant redouté à Kinshasa

Tous les clignotants sont au rouge depuis que les affrontements se sont multipliés entre jeunes et forces de l’ordre à Kinshasa, faisant de nombreuses victimes dans la capitale. L’opposition réclame le départ de Kabila et la tenue d’une présidentielle en décembre 2016. Le pouvoir met en garde contre la création «d’une deuxième Libye en Afrique centrale».
Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 5min
Un homme montre ses blessures. Il a été agressé près de l'UDPS, siège du parti de l'opposant historique Etienne Tshisekedi incendié dans le nuit du 19 septembre 2016. (Photo AFP/Junior D.Kannah)

C’est la descente aux enfers tant redoutée par la communauté internationale qui n’a pas cessé de mettre en garde les acteurs politiques congolais. Tout semble indiquer que le pays risque de plonger dans un chaos généralisé.
 
Il a suffi d’une marche d’opposants contestant le maintien au pouvoir de Joseph Kabila après l’expiration de son second mandat en décembre, pour mettre le feu aux poudres. La marche a été réprimée dans le sang.
 
Des symboles de l’Etat, comme des postes de police, ont été attaqués; les sièges des partis politiques, de la majorité comme de l’opposition ont été incendiés. La plupart des boutiques qui n’ont pas été pillées ont tiré leurs rideaux, tout comme les écoles désertées par les élèves et les enseignants. Un calme précaire semble être revenu dans la capitale, ce mercredi 21 septembre.
 
Les mises en garde se multiplient
Les mises en garde se sont multipliées à travers le monde. Depuis la tribune des Nations Unies à New York, le président français, François Hollande, a appelé au respect de la Constitution et dénoncé fermement les violences qui endeuillent la capitale congolaise.
 
«Ce qui est incontestable, c’est qu’il y a des victimes et qu’elles ont été provoquées par des exactions venant de l’Etat congolais lui-même. Dans aucun pays on ne peut accepter de tels comportements, de tels agissements, donc je veux ici les dénoncer», a déclaré François Hollande au cours d’une conférence de presse.
 
Le scénario catastrophe 
En août 2016, un émissaire du département d’Etat américain pour la région des grands lacs, Thomas Perriello, avait tiré la sonnette d’alarme.
 
«Plus on se rapproche des dates butoirs, moins les bons scénarios sont plausibles et plus les mauvais sont probables», avait prévenu le diplomate américain.
 
Présent à ses côtés, l’ambassadeur congolais à Washington avait aussi mis en garde contre un scénario catastrophe, accusant l’opposition et certains partenaires étrangers de chercher à mettre de l’huile sur le feu.
 
Si l’on veut «provoquer une révolution de masse pour chasser le président Kabila, alors personne ne sera en mesure d’assurer l’après chaos. L’implosion de la RDC doit être évitée à tout prix. Il n’y a aucun intérêt à créer une deuxième Libye en Afrique centrale» avait averti le diplomate congolais. Les autorités congolaises dénoncent «un mouvement insurrectionnel» dans la ville de Kinshasa et assurent que «l’ordre sera respecté».
 
Une rue de Kinshasa bloquée par des manifestants, le 19 septembre 2016. La représsion de la marche de l'opposition aurait fait 17 morts, selon le gouvernement, 50 morts selon l'opposition. (Photo AFP/Mustafa Mulopwe)

Le silence de Joseph Kabila
Arrivé au pouvoir en 2001, le président Joseph Kabila ne montre aucun signe de vouloir abandonner son poste alors que la Constitution lui interdit de se représenter. Dans tous les cas, le scrutin présidentiel apparaît désormais impossible à organiser dans les temps.
 
«En réalité, il joue la montre depuis 15 ans. Et le pire, c’est que ça lui réussit. C’est le roi du pourrissement», analyse Christophe Rigaud sur le site d’information Afrikarabia.
 
Pour le quotidien burkinabè Le Pays, «il ne fait pas l’ombre d’un doute que le glissement électoral qu’il recherchait pour se remettre en selle est désormais un acquis pour lui. Mais Kabila aurait tort de penser qu’il a gagné. Car le peuple congolais est loin d’avoir dit son dernier mot», écrit le journal.
 
L’Eglise catholique pose ses conditions
Les violences qui ont endeuillé Kinshasa sont survenues alors que le pouvoir congolais, la société civile et une frange minoritaire de l’opposition négociaient un accord politique pour tenter de sortir le pays de l’impasse électorale. L’Eglise catholique a d’ores et déjà suspendu sa participation à ces assises pour respecter le deuil de la population.
 
La conférence des évêques du Congo subordonne la reprise de sa participation aux travaux du dialogue à la signature d’un accord qui devra établir clairement que le président Kabila ne sera pas candidat à la prochaine élection présidentielle qui doit être organisée le plus tôt possible.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.