Obsèques de Tshisekedi en RDC: un dossier politique et un sujet de crispation
A Kinshasa, personne ne se risque à avancer une date pour le rapatriement du corps d’Etienne Tshisekedi. Le gouvernement congolais a bien annoncé sa décision d’organiser un hommage national, mais les tractations se prolongent avec la famille du disparu sans aucun résultat pour l’instant.
Le débat fait rage sur le mausolée du «combattant»
L’un des principaux points d’achoppement concerne l’érection d’un mausolée en plein cœur de Kinshasa pour accueillir la dépouille du disparu.
«Un mausolée, si on l’a fait pour Laurent-Désiré Kabila, pourquoi pas pour Etienne Tshisekedi?», s’interroge Félix-Antoine Tshisekedi, fils de l’opposant historique. L’ancien président Laurent-Désiré Kabila, père de Joseph Kabila, a été assassiné en janvier 2001 et déclaré «héros national».
Dans la capitale comme en province, la question ne laisse personne indifférent.
Voici quelques réactions recueillies par RFI dans son émission Appels sur l’Actualité.
«L’UDPS manque de respect à son leader que nous pleurons aujourd’hui. Sa disparition ne devrait pas être un sujet de débat. Dire que l’ancien chef de l’Etat Laurent-Désiré Kabila a un mausolée et que Tshisekedi aussi doit en avoir est un faux débat. Laurent-Désiré Kabila est décédé en fonction. Nous devons honorer Tshisekedi avec sa famille et arrêter de faire du chantage», estime Jimmy à Kinshasa.
D’autres Congolais n’hésitent pas à dénoncer ceux qu’ils considèrent comme des profiteurs. Ceux qui veulent séquestrer la dépouille d’Etienne Tshisekedi pour se positionner sur l’échiquier politique.
«Le perdant dans toute cette histoire, c’est le Congolais. Parce que je pense que les gens qui ont eu cette habitude de promouvoir leurs ambitions politiques sur le dos de Tshisekedi se sont tout d’un coup retrouvés sans alibi. Ils cherchent à tout prix à s’accrocher à cette mort pour monter les enchères et se trouver une position plus ou moins favorable dès que les élections arrivent», soutient Richard, un Congolais résidant en Grande Bretagne.
Le préalable du gouvernement national de transition
Le parti d’Etienne Tshisekedi a posé des conditions pour le rapatriement du corps de son leader: l’acceptation par le gouvernement d’un mausolée dans le centre ville de Kinshasa mais aussi la mise en place d’un gouvernement de transition prévu par l’accord sur le partage du pouvoir conclu le 31 décembre 2016. Un préalable balayé par le gouvernement.
«Je ne vois pas de lien entre les obsèques qu’on rend à une personne qui est décédée et des négociations politiques… Nous considérons que les obsèques sont un moment de recueillement», tranche Lambert Mendé, porte-parole du gouvernement. Pour l’instant, les deux camps campent sur leurs positions.
Polémique sur «une erreur médicale»
Officiellement, Etienne Tshisekedi est mort d’une embolie pulmonaire à la clinique Saint-Elisabeth de Bruxelles. Mais sa famille n’en est pas du tout convaincue. Elle s’interroge sur la rapidité de son décès et n’exclut pas une demande d’autopsie. Ce qui pourrait encore retarder le rapatriement de son corps à Kinshasa.
«Il y a une situation qui nous interpelle tous, en tout cas dans la famille, c’est la rapidité avec laquelle son état s’est dégradé.» Selon Félix Tshisekedi , son père a subi une anesthésie générale pour une intervention chirurgicale au pied gauche, alors que les spécialistes estiment qu’une anesthésie locale aurait suffi.
«Nous ne soupçonons personne, nous n’accusons personne, nous voulons simplement comprendre ce qui s’est passé. Je crois que c’est notre droit le plus légitime», a-t-il déclaré au cours d’une conférence de presse.
Deux semaines après la disparition d’Etienne Tshisekedi, seuls les Congolais de la diaspora ont pu s’incliner devant son cercueil, qui a été exposé au palais de Heysel à Bruxelles. Une foule nombreuse de Congolais venus de différents pays ont pris d’assaut les lieux pour pleurer celui qu’ils considèrent comme «le père de la démocratie congolaise». Quant aux habitants de RDC, ils devront attendre la fin du bras de fer en cours pour lui rendre, à leur tour, un dernier hommage.
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