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Le cyclone qui a frappé le Mozambique prive l'Afrique du Sud d'électricité

Le cyclone qui a touché le Mozambique a mis à terre les pylônes. Conséquence : l'Afrique du Sud voisine se retrouve privée de 1000 MW d'électricité. Dans un contexte déjà très tendu, l’entreprise nationale sud-africaine Eskom, qui assure 90% de la fourniture en électricité, est contrainte de couper régulièrement le réseau.

Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3min
Les ruptures des lignes électriques au Mozambique prive l'Afrique du Sud de 1000 MW d'électricité. (ADRIEN BARBIER / AFP)

"La crise est à chercher dans la hausse des coûts, la baisse des revenus, le mauvais état de l'infrastructure, la corruption et la mauvaise gestion", analyse la BBC. Avec la fin du régime de l’apartheid en 1994, la fourniture d’électricité, jusqu’alors cantonnée à la minorité blanche, s’est élargie à la population noire. Mais la production n’a pas suivi. Et à partir de 2008, Eskom s’est retrouvée à gérer un déficit chronique en coupant le courant à répétition. Le programme de construction de deux nouvelles centrales, à Kusile et Medupi, lancé au milieu des années 2000, n’est toujours pas achevé.

A cela se sont donc greffés des problèmes conjoncturels. La longue période de sécheresse qu’a connue le pays a vidé les barrages et la production électrique s’en est ressentie. Il faut rajouter des pannes à répétition dans les centrales à charbon et des ruptures de livraison de fuel. La rupture des lignes à haute tension au Mozambique, venant du barrage de Cahora Bassa, va donc imposer des coupures en rotation, 4000 MW devant désormais être retirés du réseau.

Une dette de 26 milliards d'euros

Quant à la mauvaise gestion qu’évoque la BBC, on la retrouve dans la dette abyssale d'Eskom (26 milliards d’euros). Le ministre des Entreprises publiques, Pravin Gordhan, a été obligé de reconnaître l’impuissance des autorités face à cette cascade d’imprévus. Il se donne une quinzaine de jours pour y apporter une réponse.

En attendant, le gouvernement va éponger une partie de la dette, à hauteur de 1,3 milliard d’euros, selon l'AFP. Dans le même temps, le président Ramaphosa plaidait le contraire. "Je veux que ce soit clair, le gouvernement ne prendra pas en charge la dette d'Eskom. Verser de l'argent directement dans Eskom dans sa forme actuelle, c'est comme verser de l'eau dans une passoire."

Manifestation contre les coupures de courant à Soweto en 2015. (IHSAAN HAFFEJEE / ANADOLU AGENCY)

Déjà, bien sûr, les conséquences se font sentir sur l’économie du pays. Les petites entreprises qui n’ont pas de générateurs personnels sont les plus touchées. Dans les restaurants, selon Reuters, on évoque d'importantes pertes. Des dizaines de kilos de nourriture sont à jeter du fait de la rupture du froid, dans les réfrigérateurs et congélateurs. Les clients se font rares.

Conséquence politique

Cette fragilité de la fourniture électrique pourrait réduire à néant les efforts de relance de la croissance économique du président Cyril Ramaphosa, et cela alors que les élections, prévues en mai 2019, approchent. D’ailleurs, à Soweto notamment, les manifestations se multiplient. L’ANC, le parti de Ramaphosa et de l’ex-président Zuma, est accusée par l’opposition d’avoir pillé Eskom.

La crise n’est donc pas seulement économique. Eskom pose le problème de la privatisation ou non, de certains secteurs de l’économie. Mais cela joue sur l’épineux dossier de l’emploi. Eskom "pèse" 50 000 salariés, le gouvernement ne peut pas se permettre de voir l'entreprise couler.

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