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La crise en RDC commence à inquiéter ses voisins
L’immense République démocratique du Congo compte neuf voisins: Congo-Brazaville, Centrafrique, Soudan, Ouganda, Rwanda, Burundi, Tanzanie, Zambie et Angola. Des voisins fort nombreux qui se retrouvent à leurs corps défendant en première ligne d'une crise politique à l'issue incertaine, qui agite la très instable RDC.
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Les pays frontaliers redoutent de voir surgir des débordements de violences – réfugiés, mouvements rebelles, trafics en tous genre – si le président congolais Joseph Kabila briguait un troisième mandat aux élections prévues le 23 décembre 2018, ce que lui interdit la Constitution. Voire en cas de énième report du scrutin.
«La RDC est la mère de toutes les crises car ce qui s'y passe affecte toute la région des Grands Lacs», résumait le ministre angolais des Affaires étrangères, Manuel Domingo Augustos, dans un entretien au journal français Le Monde en janvier 2018. «C’est toujours pour nous une source de préoccupation que de voir la crise politique se superposer à une prolifération de milices et de mouvements rebelles», ajoutait-il.
La question congolaise est l’un des principaux points au menu de la visite en Belgique, du 4 au 10 juin 2018, des présidents angolais, Joao Lourenço, et rwandais, Paul Kagamé. La Belgique et l'Angola ont réitéré le 4 juin «l'importance d'élections libres, crédibles et transparentes dans les termes de l'accord de la Saint-Sylvestre». En clair : sans le président Kabila. Paul Kagamé et Joao Lourenço sont respectivement président en exercice de l'Union africaine (UA) et de la Communauté des Etats d'Afrique australe (SADC), deux organisations qui surveillent le processus électoral congolais.
Trafic ferroviaire interrompu pendant 34 ans
Chaque pays frontalier a aussi sa propre histoire bilatérale avec la RDC. L'Angola, qui partage 2500 km de frontière avec ce pays, a soutenu militairement le président Kabila à son arrivée au pouvoir en 2001 après l'assassinat du père de ce dernier, Laurent-Désiré. Le trafic ferroviaire a repris en mars entre les deux pays après 34 ans d'interruption. Leurs dirigeants organisent régulièrement des sommets tripartites avec le président du Congo-Brazzaville, Denis Sassou Nguesso.
Ces relations peuvent se crisper rapidement, comme le montrent le retrait des conseillers militaires angolais fin 2016 et le mouvement de l'armée de Luanda à la frontière congolaise en mai 2017 lors de la crise dans le Kasaï (centre-sud de la RDC). «Le mandat de Joseph Kabila est terminé. Il doit donc partir dans le cadre d'un processus démocratique», déclarait en janvier le ministre angolais des Affaires étrangères, loin des précautions oratoires du président Lourenço en Europe.
Le petit Rwanda et le grand Congo entretiennent des relations tendues depuis le génocide des Tutsis et le massacre des Hutus modérés en 1994 (800.000 morts).
Soucieux d'éliminer les génocidaires réfugiés dans l'ex-Zaïre, le président rwandais Paul Kagame a soutenu le chef rebelle Laurent-Désiré Kabila en 1997 dans sa marche victorieuse contre le vieux maréchal Mobutu. Avant un retournement d'alliance.
Depuis, le Rwanda est accusé de piller le coltan du Nord-Kivu (est de la République démocratique du Congo). Et Kigali accuse la RDC de soutenir les rebelles hutus installés dans cette même province. En février, les deux armées se sont brièvement battues à la frontière.
A la jumelle
«Si nous pouvons comprendre en tant que voisin comment aider la transition au Congo à se passer sans nous affecter (...), c'est ce que nous devrions faire», a récemment déclaré le président Kagamé. Lequel est lui-même aux affaires depuis 23 ans et réélu en août 2017 avec plus de 98% des voix.
A Brazzaville, on suit au sens propre à la jumelle la situation de l'autre côté du fleuve, où le régime du président Sassou Nguesso a expulsé et renvoyé en 2014 des dizaines de milliers de ressortissants de RDC. «Nous devons en principe nous retrouver à Luanda le 17 juin (Lourenço, Sassou, Kabila, Kagame, le Gabonais Ali Bongo et le Sud-Africain Cyril Ramaphosa). Nous attendons tous la confirmation par Kinshasa de ce rendez-vous décisif», glisse une source bien informée à Brazzaville.
Les relations sont complexes entre la RDC et l'Ouganda, sur fond de partage des ressources énergétiques des lacs Albert et Edouard. Comme le Rwanda, Kampala a soutenu en 1997 le renversement du maréchal Mobutu par Kabila père avant un retournement d'alliance. «Que Kabila brigue un troisième mandat ou non, cela ne nous concerne pas. Mais ce qui nous préoccupe, c'est la présence des groupes armés qui déstabilisent la région», avance un diplomate ougandais.
Rebelles ougandais
Les relations entre RDC et Ouganda sont polluées par la présence des mystérieux Allied Democratic Forces (ADF). Officiellement, ceux-ci sont des rebelles ougandais musulmans opposés au président Yoweri Museveni. Mais dans les faits, ils égorgent, enlèvent et terrorisent les Congolais de la région de Beni.
Kampala s'est aussi inquiété d'un afflux de réfugiés congolais en février lors de la reprise des violences en Ituri (nord-ouest de la RDC).
Kinshasa n'a rien à redouter du petit Burundi, où le président Pierre Nkurunziza vient de réformer la Constitution pour rester au pouvoir jusqu'en 2034. «Nous entretenons de très bonnes relations sur le plan du renseignement ou le plan militaire», a rappelé un haut-responsable burundais. Une allusion à la poursuite des milices congolaises au Burundi et inversement.
La RDC a aussi des relations cordiales avec la Tanzanie, où la famille Kabila a vécu en exil. «Aucune solution au conflit inter-congolais ne devrait être envisagée, dans le dos du pays concerné et sans associer les organisations régionales», selon un haut responsable tanzanien.
Le président Kabila s'est rendu en février en Zambie pour s'assurer de ses bonnes relations avec Lusaka. Quant à la Centrafrique et le Sud-Soudan, ces deux pays paraissent trop englués dans leurs propres violences pour s'inquiéter du dossier congolais. Ils sont à peu près les seuls dans la région.
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