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La Chine se réconcilie avec le Zimbabwe et dit vouloir renforcer la coopération entre les deux pays

Le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, s'est entretenu le 12 janvier 2020 à Harare avec son homologue zimbabwéen, Sibusiso Busi Moyo. Une manière de mettre fin à une période de tension entre les deux pays. Dans le même temps, le Zimbabwe peine à rembourser l'argent que lui prête Pékin...

Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi (à gauche), avec son homologue zimbabwéen, Sibusiso Moyo, à Harare le 12 janvier 2020. (JEKESAI NJIKIZANA / AFP)

Lors de la dernière étape au Zimbabwe de sa tournée en Afrique, qui l'a amené également en Egypte, à Djibouti, en Erythrée et au Burundi, le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Y,i s'est engagé le 12 janvier 2020 à renforcer la coopération avec Harare. Selon un communiqué de l'ambassade de Chine, Pékin a déclaré vouloir "étendre l'aide mutuelle à des questions liées aux intérêts fondamentaux des deux parties" et dit vouloir soutenir "fermement le développement économique et social du Zimbabwe".

Un trait est ainsi officiellement tiré sur une récente querelle entre les deux pays sur les chiffres de l'aide bilatérale que Pékin accorde à Harare pour maintenir à flot son économie en crise. Une crise exacerbée par la sécheresse, entraînant des coupures de courant, une pénurie de devises étrangères, de carburant et de médicaments. Selon l'ONU, le Zimbabwe se trouve au bord de la famine.

3,61 ou 136,8 millions de dollars ?

En novembre 2019, le ministre des Finances zimbabwéen, Mthuli Ncube, avait affirmé que l'aide bilatérale de la Chine ne s'élevait qu'à 3,61 millions de dollars (3,24 millions d'euros). Quand, dans le même temps, celle des Etats-Unis et du Royaume-Uni devait être de 50 millions de dollars (44,9 millions d'euros) pour chacun des deux pays, celle de l'UE atteignant 41 millions de dollars (36,85 millions d'euros).

Les autorités chinoises n'avaient pas apprécié et "avaient immédiatement réfuté les chiffres", rapporte le site du journal Zimbabwe Independent. Elles avaient alors expliqué que Pékin avait fourni 136,8 millions de dollars (123 millions d'euros) entre janvier et septembre 2019. "Un tel chiffre n'inclut pas les autres aides bilatérales tels que les dépenses d'expertise, les dons de l'ambassade à des groupes vulnérables, etc.", ajoutait la représentation diplomatique chinoise à Harare.

Le Zimbabwe reconnaît officieusement une "erreur"

"Il était évident que les Chinois n'étaient pas satisfaits du cafouillage et voulaient que l'affaire soit abordée lors des discussions (entre les deux ministres des Affaires étrangères, NDLR). Ils étaient venus avec la preuve qu'ils avaient bien versé 136,8 millions de dollars entre janvier et septembre (2019). Les officiels ministériels (côté zimbabwéen, NDLR)) ont reconnu que l'erreur venait de chez eux", a déclaré un responsable gouvernemental à Harare cité par le Zimbabwe Independent"Lors de la rencontre, il a été décidé que le ministre des Finances (Mthuli Ncube, NDLR) allait corriger cette anomalie", poursuit le responsable. En clair, les Zimbabwéens mangent leur chapeau...

"La Chine a aidé l'Afrique à construire plus de 130 installations médicales, 45 stades, et plus de 170 écoles au cours des cinq dernières années", a déclaré Wang Yi à la presse à Harare. Pour autant, la situation n'est pas aussi simple. Et derrière les sourires de façade liés à des relations anciennes entre les deux parties, les visages commencent peut-être à se crisper côté chinois... 

Défauts de paiement...

Parmi les projets sur lesquels la Chine intervient au Zimbabwe : la rénovation de la centrale thermique de Hwange (1,1 milliard de dollars, 980 millions d'euros), l'extension de l'aéroport international de Harare (153 millions de dollars, 137,6 millions d'euros) et l'extension du réseau de l'opérateur de téléphonie NetOne (71 millions de dollars, 63,8 millions d'euros). "Projets menacés, selon le Zimbabe Independentaprès que la China Exim Bank a arrêté de (les) financer jusqu'à ce que l'argent soit remboursé..." 

Globalement, Harare "se trouve dans l'incapacité de rembourser 2,2 milliards de dollars (1,97 milliards d'euros) de prêts accordés par la Chine au Zimbabwe", rapporte le South China Morning Post. Ce qui, selon des observateurs cités par le journal de Hong Kong, "commence à mettre à rude épreuve les relations" entre les deux parties. Pékin se trouverait ainsi pris dans un véritable "dilemme", analyse Chipo Dendere, enseignante au Wellesley College dans le Massachusets (Etats-Unis), dont les propos sont rapportés par le quotidien hongkongais. Un dilemme entre "d'un côté l'amitié avec le Zimbabwe et le souhait d'avoir accès aux ressources (du pays) et de l'autre, la réalité que l'élite zimbabwéenne est profondément corrompue"

Le Chine est devenue le premier partenaire commercial de l'Afrique. Au Zimbabwe, sa présence est particulièrement visible depuis les sanctions pour non-respect des droits de l'Homme infligées par les Occidentaux au régime de l'ex-président Robert Mugabe. Les partis d'opposition à Harare accusent le gouvernement de céder minerais et autres ressources naturelles aux Chinois en échange de l'aide financière de ces derniers. Ils accusent également les entreprises de l'ex-Empire du Milieu d'abuser des travailleurs locaux et de les sous-payer.

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