Cinq questions pour comprendre la situation au Niger visé par des attaques terroristes
Les agressions contre les civils ont fait plus de 200 morts en moins d'une semaine.
Depuis le début de l'année 2021, le Niger connaît une dégradation importante de sa sécurité. Ce pays enclavé du Sahel qui partage sa frontière avec le Mali est depuis 2015 en proie à des attaques jihadistes, notamment à l’ouest. L’armée nigérienne semble incapable de défendre les civils. Les dernières agressions sont les plus meurtrières du genre.
1Que s'est- il passé ?
En moins d’une semaine, deux attaques importantes ont frappé l’ouest du Niger, faisant plus de 200 morts dont une vingtaine d'enfants et de nombreux blessés parmi la population civile. Des hommes armés à moto ont attaqué des villages et des campements nomades en tirant "sur tout ce qui bouge", selon un élu local de la région cité par l'AFP. Les multiples attaques ont eu lieu près de Tillabéri, dans la zone dite des Trois frontières (Niger, Mali, Burkina Faso).
Depuis le début de l’année, au moins 300 personnes ont été tuées dans cette région, où sévissent de nombreux groupes armés.
2Qui mène les attaques ?
Les attaques perpétrées contre les civils n’ont pas été revendiquées, mais plusieurs groupes armés sont actifs dans la zone de Tillabéri. Il s'agit de "bandits", selon les autorités nigériennes, affiliés aux organisations islamistes Etat islamique et Al-Qaïda. Dans cette région du Sahel, leurs appellations ont changé. On parle de l’organisation Etat islamique au grand Sahara (EIGS) et d'Al-Qaïda au groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM, ou Jnim en arabe). Les deux nébuleuses terroristes rivales sont bien implantées dans le Sahel et recrutent localement.
3D’où vient la menace terroriste ?
Si le Sahel est familier de l'instabilité politique, la situation sécuritaire s'est dégradée ces dernières années avec la crise au Mali. Dans une région aux frontières poreuses, l'insécurité dans un pays est souvent une menace pour ses voisins. Après leur éviction du nord du Mali en 2012, les groupes armés ont été fortement affaiblis mais n'ont pas été éradiqués pour autant.
Ces mouvements armés qui se financent grâce à de multiples trafics se sont disséminés dans l'immense Sahel (une zone aussi vaste que l’Europe), en s'implantant localement avec un effet dévastateur. Pas un jour ne passe sans une attaque contre des cibles militaires et civiles au Mali, au Niger et au Burkina Faso. L'année 2020 a été la plus meurtrière au Sahel, selon l’ONG Acled, spécialisée dans la collecte des données.
4 Le Niger peut-il se défendre ?
Le Niger fait face à un défi immense dans la lutte anti-jihadiste. Le pouvoir dirigé désormais par le président Mohamed Bazoum a envoyé des renforts dans la région ciblée, mais cela n’a pas permis de protéger la population. Sous-équipée et pas assez entraînée, l’armée nigérienne qui compte près de 25 000 soldats n’est pas en mesure de faire face aux attaques récurrentes à l'ouest et au sud-est du pays. Le Niger s'est engagé à doubler ses effectifs, mais en attendant, il compte sur le soutien militaire de l’armée tchadienne, la plus aguerrie de la région dans le cadre du G5-Sahel. Le pays bénéficie aussi du soutien de l'opération française antijihadiste Barkhane qui compte plus de 5 000 hommes déployés dans la région désertique.
5Quelle est l'approche du Niger ?
Le Niger veut renforcer ses moyens militaires pour lutter contre les jihadistes, mais le "tout-sécuritaire" ne suffit pas, comme le soulignent de nombreux observateurs. Niamey valorise le dialogue avec les communautés locales visées. La dernière attaque a notamment ciblé les touaregs pour porter atteinte à la cohésion sociale. Cette tournure communautaire inquiète la société civile, comme le souligne à l’AFP Amadou Oumarou Mamar, coordonateur d’un collectif de la région de Tillabéri où ont eu lieu les dernières attaques. Pour éviter l'embrasement, le Niger tente de rassurer les communautés sur la présence de l'Etat et de ses forces armées accusées d’exactions lors d’opérations anti-terroristes.
Le nouveau président élu, Mohamed Bazoum, s'est engagé à lutter contre la corruption et à poursuivre une politique sociale en faveur du développement du pays, l’un des plus pauvres au monde.
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