Cameroun : sale temps pour l'opposition...
Entre arrestations et tortures, plusieurs affaires récentes montrent que la répression contre les opposants au régime du président Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, ne faiblit pas.
Dans un communiqué publié le 26 juillet 2017, l'organisation des droits de l'Homme Amnesty International révèle que "59 membres de l'opposition – dont six femmes" ont été "torturés par les forces de sécurité". Ils avaient "été arrêtés le 1er juin 2019 dans la capitale, Yaoundé, lors d'une manifestation pacifique planifiée".
"Ces personnes ont décrit l'utilisation de différentes techniques, telles que des coups et des exercices physiques difficiles, y compris contre les femmes", notamment l'obligation de marcher "comme des canards dans la boue", poursuit Amnesty. Elles avaient été emmenées au Secrétariat d'Etat à la Défense (SED). Siège de la gendarmerie à Yaoundé, le SED est fréquemment dénoncé par les associations de droits humains, qui affirment que la torture y est largement pratiquée.
Mutineries
Dans le même temps, plusieurs militants du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), détenus à la prison centrale de Yaoundé, ont été "brutalement enlevés pour une destination inconnue" après une mutinerie qui a éclaté le 22 juillet dans l'enceinte de ce pénitencier, ont dénoncé leurs avocats dans un communiqué. Parmi eux, figure le vice-président du mouvement Mamadou Yacouba Mota.
La mutinerie a éclaté après que plusieurs détenus de la crise anglophone, rejoints par des membres du MRC, dont Mamadou Yacouba Mota, ont organisé une manifestation pacifique relayée sur Facebook pour dénoncer leurs conditions de détention. En soirée, certains endroits de la prison ont été saccagés, un bureau, la bibliothèque et un atelier de couture ont été incendiés, sans que les auteurs soient identifiés.
"Après moult recherches, il nous a été indiqué qu'une partie de nos clients se trouvait" au SED, ont indiqué les avocats des militants du MRC, précisant qu'un droit d'entrée leur a été refusé. "Nous craignons sérieusement les traitements inhumains et dégradants et les tortures" dont ils "pourraient être victimes".
Selon un communiqué du gouvernement camerounais, la responsabilité de la mutinerie incombe à "un regroupement de personnes" placées en détention provisoire dans le cadre de la crise anglophone. Mais pour le MRC, la mutinerie a été provoquée par "une décision scandaleuse" des autorités d'ouvrir la cour, où manifestaient les séparatistes et opposants politiques, à des détenus dangereux, a affirmé le porte-parole du président du parti.
Par ailleurs, 45 personnes, dont 43 détenus, ont été blessées le 25 juillet au cours d'une autre mutinerie à la prison principale de Buea, chef-lieu du sud-est du Cameroun, l'une des deux régions anglophones où militaires et séparatistes s'affrontent depuis près de trois ans, a rapporté le gouvernement.
La peine de mort pour Maurice Kamto et d'autres opposants ?
Le président du MRC, Maurice Kamto, et une centaine de ses partisans sont "détenus arbitrairement" depuis janvier "pour avoir participé pacifiquement à des manifestations" contre le résultat de la présidentielle d'octobre 2018, selon Amnesty. Principal opposant au président Paul Biya, Maurice Kamto était arrivé second lors de ce scrutin.
Une quarantaine de détenus ont été libérés dans la nuit du 13 au 14 juillet.
Le 11 juillet, un tribunal militaire s'est déclaré compétent pour juger le dirigeant de l'opposition et 107 autres personnes. Il a confirmé leur inculpation pour rébellion, hostilité contre la patrie, incitation à l’insurrection, outrage au président de la République et destruction de bâtiments et biens publics. "En confirmant que les membres de l'opposition seront jugés devant un tribunal militaire, les autorités camerounaises bafouent le droit international. Maurice Kamto et ses partisans risquent de ne pas bénéficier d'un procès équitable et pourraient encourir la peine de mort", selon le communiqué d'Amnesty.
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