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Cameroun anglophone: «Des villages entiers brûlés par les forces de sécurité»

Des centaines de maisons brûlées, des meurtres de civils sans défense. Dans les régions anglophones du Cameroun, les populations vivent la peur au ventre. Human Rights Watch a envoyé des enquêteurs sur le terrain. Leur rapport donne froid dans le dos. Ils détaillent une série d’exactions menées contre les civils, dont 180.000 ont dû fuir leurs villages.
Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Des soldats camerounais patrouillent dans la ville anglophone de Buea (sud-ouest du pays), le 26 avril 2018. (Photo AFP/Alexis Huguet)

Dans les deux régions anglophones du Cameroun, le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, les combats sont devenus quotidiens entre les forces de sécurité et les séparatistes armés qui réclament un Etat anglophone indépendant.

«La tactique de la terre brûlée»
Dans ces régions extrêmement boisées et isolées, les forces séparatistes opèrent de plus en plus librement et les accrochages se multiplient avec les forces de sécurité qui semblent avoir opté pour «la tactique de la terre brûlée». Elles procèdent à des attaques massives contre des villages en les incendiant et en tuant ceux qui n’arrivent pas à fuir.

C’est ce que confirme, au micro de RFI, Jonathan Pedneault, chercheur à la division urgence de Human Rights Watch. Il a enquêté pendant trois semaines en avril 2018 dans les régions anglophones du Cameroun.

«Plusieurs personnes m’ont décrit comment, à la suite d’une attaque ou d’une embuscade menée par les groupes armés, les forces de sécurité arrivent dans le village et commencent à tirer sur les habitants qui s’enfuient en forêt. Et lorsqu’ils retournent dans leurs villages, ils retrouvent des quartiers entiers brûlés et des cadavres de personnes âgées ou handicapées tuées pendant ces attaques.»

Des civils pris entre deux feux
Human Rights Watch met en garde les autorités camerounaises.
«Plus il y a des villages brûlés, plus il y a des civils tués par les forces gouvernementales, plus il y aura des gens qui vont soutenir les groupes séparatistes opérant dans la région», avertit l’ONG.

Des bus brûlés le 9 juillet 2018 à Buea, chef-lieu de la région anglophone du Sud-Ouest, en proie à des violences entre les séparatistes et les forces de sécurité. (Photo AFP)

Dans son rapport, l’organisation de défense des droits de l’Homme pointe aussi les séparatistes anglophones qui «empêchent les enfants d’aller à l’école» et qui s’en prennent à des civils, considérés comme favorables au pouvoir.

«La communauté internationale doit agir afin de garantir que les deux parties prennent des mesures concrètes pour protéger les civils et garantir la justice concernant les crimes à leur encontre», plaide  Mausi Segun, directrice de la division Afrique de l’ONG.

Le risque de la radicalisation
Human Rights Watch constate que la répression menée par les forces gouvernementales a contribué, de façon significative, à radicaliser les activistes anglophones et à les pousser vers la lutte armée.

«Tous ces abus que nous avons pu documenter contribuent à la radicalisation de la population anglophone qui se voit attaquée par des forces qui sont censées la protéger. Une insurrection telle que celle-là ne peut pas être combattue en utilisant de telles méthodes», explique Jonathan Pedneault à RFI.

Si les séparatistes peuvent compter sur le soutien des populations excédées par les exactions des forces de sécurité, ils bénéficient surtout d’importants appuis de la diaspora anglophone camerounaise établie aux Etats Unis et en Europe, mais aussi en Afrique, notamment au Nigeria et en Afrique du Sud. C’est elle qui fournit l’argent, les armes et les munitions.

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