Libye : la France reconnaît l'opposition et envoie un ambassadeur à Benghazi
Pour la France, désormais, la Libye, ce n'est plus le colonel Kadhafi. Paris a reconnu le Conseil national de transition (CNT), l'émanation des forces rebelles au régime, comme seul “représentant légitime du peuple libyen” . Trois émissaires des rebelles, en tournée européenne, ont rencontré Nicolas Sarkozy pendant une heure, entretien suivi de poignée de mains chaleureuse et ostentatoire sur le perron de l'Elysée, signe diplomatique sans équivoque. L'information a été immédiatement confirmée par les services officiels français.
Suite logique, mais particulièrement rapide de cette décision : Paris et Benghazi vont s'échanger des ambassadeurs : “nous allons ouvrir une représentation diplomatique, donc notre ambassade à Paris, et un ambassadeur de France sera envoyé à Benghazi”, précise l'un des envoyés, Ali Essaoui. Là aussi, confirmation élyséenne.
En réponse, un diplomate évoque une possible rupture des relations diplomatiques avec la France. Mouammar Kadhafi, lui, a menacé de révéler des secrets sur les comptes de campagne de Nicolas Sarkozy. Un "grave secret" qui "va entraîner la chute de Sarkozy, voire son jugement en lien avec le financement de sa campagne électorale", annonce l'agence officielle libyenne.
Plan stratégique européen pour la Libye
Cette reconnaissance intervient à la veille d'un sommet exceptionnel des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union européenne (UE), vendredi à Bruxelles, au cours duquel Nicolas Sarkozy doit proposer un “plan stratégique” au Conseil européen sur la crise libyenne.
La France est ainsi le premier pays à reconnaître officiellement la rébellion. Une attitude qui contraste avec la tiédeur européenne, puisque la chef de la diplomatie, Catherine Ashton, a refusé de s'engager dans cette voie, malgré les demandes du Parlement. Plusieurs pays européens semblent toutefois plus ou moins s'aligner sur Paris : le Portugal, qui a pourtant reçu un émissaire de Kadhafi, a déclaré que son régime était “fini”.
Ce coup diplomatique permet aussi à Paris de revenir sur le devant de la scène, alors que jusqu'ici, la France a toujours paru en retrait et désarçonnée face aux révolutions arabes. Accessoirement, il efface aussi quelque peu dans l'esprit de Nicolas Sarkozy l'humiliante visite de Mouammar Kadhafi à Paris, en 2007.
Grégoire Lecalot, avec agences
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