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Le pape François en Afrique : «La violence ne peut se justifier au nom de Dieu»

Des dizaines de milliers de fidèles ont assisté à la messe célébrée le 25 novembre 2015 par le pape François dans le stade de Nairobi au Kenya. Le Saint-Père a prôné la coexistence pacifique et l’esprit de tolérance entre chrétiens et musulmans. Le pape découvre une église africaine sur la défensive face au djihadisme et à la prolifération des sectes évangélistes.
Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
200.000 catholiques kenyans sont allés à la rencontre du pape François, le 26 novembre 2015 sur le campus de l'université de Naïrobi. (Photo AFP/Georgina Goodwin)

Au premier jour de sa tournée africaine, le pape François a plaidé en faveur du dialogue des religions en Afrique. Devant plusieurs dirigeants musulmans et d’autres cultes religieux réunis à la nonciature apostolique de Nairobi, le Saint-Père a dénoncé les violences commises au nom de Dieu: «Trop souvent, la jeunesse est radicalisée au nom de la religion pour semer le désordre et la peur et pour déchirer le tissu même de nos sociétés.»
 
Des communautés chrétiennes sur la défensive
Dans les trois pays de son voyage (Kenya, Ouganda et Centrafrique), l’église catholique est en pleine croissance. Mais les communautés chrétiennes sont sur la défensive face à l’apparition de mouvements djihadistes qui sèment la mort dans la région.
 
Le Kenya a été particulièrement touché par le terrorisme. Le pays a été traumatisé par l’attaque meurtrière menée en  septembre 2013 par des islamistes somaliens (shebabs) contre le centre commercial de Westgate à Nairobi. Bilan: 67 morts.
En avril 2015, c’est l’université de Garissa qui a été prise d’assaut par les shebabs. L’attaque a fait 148 morts, pour la plupart des étudiants chrétiens visés pour leur appartenance religieuse.
 
Funérailles des victimes de l'attaque de l'université kenyane de Garissa, le 10 avril 2015. Des islamistes somaliens ont tué 148 personnes lors de l'assaut. (Photo Reuters/Thomas Mukoya)

Dans l’entourage du pape, ses conseillers reconnaissent la difficulté d’établir un dialogue avec des extrémistes qui se réclament de Dieu. «Comment dialoguer avec des gens qui ont une telle mentalité, s’interroge le cardinal guinéen Robert Sarah, préfet de la congrégation pour le culte divin au Vatican. Au Soudan, affirme-t-il à l’AFP, «les évêques nous disent que les chrétiens sont considérés comme moins que des chiens, comme du bois, juste bon à brûler».
 
Le pape François a appelé les chrétiens à ne pas assimiler l'islam à la violence. Mais il est à craindre que la fracture entre les communautés en Afrique subsaharienne ne se creuse dans les décennies à venir.
 
Prolifération des sectes évangélistes
C’est l’autre défi de l’église catholique en Afrique. Les églises évangélistes ou pentecôtistes, très festives, poussent comme des champignons. Elles promettent des miracles aux gens en difficulté. Et ça marche. Des centaines de milliers de catholiques les rejoignent dans les quartiers.

Pour le père Giulio Albanese, expert de l’Afrique à Radio Vatican, c’est «le fruit de l’échec de l’inculturation des églises établies, qu’elles soient catholiques, protestantes ou anglicanes». Les liturgies catholiques sont restées «trop romaines», les célébrations «trop solennelles», déconnectées de la culture africaine, explique le père Giulio à l’AFP.
 
La culture chrétienne serait-elle fragile sur le continent? Oui, répond le cardinal guinéen Robert Sarah qui relève que le christianisme apporté par les missionnaires est jeune. A peine un siècle et demi. Mais il est persuadé que la jeune église africaine incarne l’espoir d’une régénérescence de l’église dans le monde. A condition qu’elle s’adapte aux changements en cours dans la société.
 
Des jeunes prêtres kenyans venus écouter le pape François le 26 novembre 2015 sur le campus de l'université de Nairobi. (Photo AFP/Georgina Goodwin)

Dans un contexte de guerre contre le terrorisme, des centaines de milliers de catholiques kenyans ont bravé la pluie et le froid pour communier avec le pape ce jeudi 26 novembre à Nairobi.
 
Dans une homélie saluée par un tonnerre d’applaudissements, il a appelé à rejeter le «préjugé et la discrimination» tout en insistant sur la défense de la famille et le respect des grandes valeurs de la société africaine.
 
«Je m’en souviendrai toute ma vie», a déclaré à l’AFP un catholique kenyan présent dans les jardins de l’université de Nairobi.

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