Washington offre cinq millions de dollars pour l'arrestation d’un ex-général de Guinée-Bissau
L'ancien chef d'état-major Antonio Indjai est recherché pour son implication présumée dans un trafic de drogue.
Le président de la Guinée-Bissau exclut l'extradition vers les Etats-Unis d’un ex-général et ancien putschiste. La tête d'Antonio Indjai a été mise à prix par le département d’Etat américain, plus de huit ans après une première inculpation en 2013.
Petit pays lusophone
On parle peu de la Guinée-Bissau, petit pays lusophone d’Afrique de l’Ouest, à ne pas confondre avec la Guinée Conakry ou encore la Guinée équatoriale. L'ex-colonie portugaise est connue pour ses multiples coups d’Etat. Seize tentatives, dont quatre réussies, depuis son indépendance en 1974. La Guinée-Bissau est également citée depuis des années comme un point de passage en Afrique de l'Ouest de la cocaïne en provenance d'Amérique du Sud vers l'Europe. Une plaque tournante du trafic de drogue dans lequel Antonio Indjai tient un rôle déterminant, selon Washington.
Putsch, drogue et pots-de-vin
Le dernier putsch militaire en date est mené en avril 2012 par le chef d'état-major de l’époque, Antonio Indjai. Pendant deux ans, la période est particulièrement instable et favorise le trafic de drogue déjà en place, comme le souligne le conseil de sécurité de l’ONU. Antonio Indjai est soumis aussitôt à des sanctions internationales et ne peut plus quitter son pays.
Parallèlement, il est accusé par la justice américaine de narcotrafic en lien avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). Antonio Indjai aurait accepté de stocker des tonnes de cocaïne dont la vente aurait financé l'achat d'armes pour les guérilleros colombiens. L'ancien général est également mis en cause dans la distribution de pots-de-vin à des responsables en Guinée-Bissau. L'affaire a été relancée en août 2021 avec un avis de recherche officiel.
"Indjai était considérée comme l'une des figures de déstabilisation les plus puissantes de Guinée-Bissau, opérant librement dans toute l'Afrique de l'Ouest, utilisant des produits illégaux pour corrompre et déstabiliser d'autres gouvernements"
Communiqué du département d'Etat américainPublié le 19 août 2021
Dans le viseur américain
Plus de huit ans après une première inculpation américaine en 2013, Washington ne lâche pas l’affaire et veut poursuivre en justice l’ex-général bissau-guinéen âgé de 66 ans. Elle l’accuse notamment de "corrompre et de déstabiliser d’autres gouvernements", sans les nommer. Une récompense de cinq millions de dollars est offerte par le département d’Etat contre toute information menant à l'arrestation et ou à la condamnation d'Antonio Indjai. Elle s’inscrit dans le cadre du programme de lutte contre les stupéfiants. Mais ce "Wanted" à l'américaine semble prendre de court la Guinée-Bissau. Le président Umaro Sissoco Embalo rejette les accusations américaines contre l’ancien général et exclut toute extradition vers les Etats-Unis.
"Aucun citoyen guinéen ne sera traduit en justice dans un autre pays"
Umaro Sissoco Embalo, président de Guinée-Bissau
Le politologue et chercheur bissau-guinéen Rui Jorge Semedo juge "exagérée" l'annonce de Washington. Elle risque, selon lui, d’approfondir les clivages dans "un pays fragile", comme il l’explique à l’agence portugaise Lusa. Il rappelle surtout que l’homme recherché a encore beaucoup d’influence au sein de l’armée. C’est sans doute pour cela que le général à la retraite n’a jamais été inquiété par la justice de son pays ni interrogé sur un quelconque rôle dans le trafic de drogue.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.