Cet article date de plus de huit ans.

Gabon : lâché par les siens, Ali Bongo dénonce «des professionnels du mensonge»

L’élection présidentielle au Gabon devrait se tenir entre le 30 Juin et le 30 Septembre 2016. Le président sortant, Ali Bongo s’est déjà lancé dans la course. Mais il ne peut plus compter sur certains anciens barons du Parti Démocratique Gabonais (PDG) au pouvoir, qui ont claqué la porte pour lui barrer la route d’un nouveau septennat. Une bataille sans merci s’annonce pour la conquête du pouvoir.
Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6min
Elu en 2009, le président gabonais Ali Bongo sollicite un nouveau mandat de 7 ans à la tête de son pays. Plusieurs anciens caciques du pouvoir ne lui apportent plus leur soutien pour la présidentielle 2016
 
 
  (Photo AFP/Mustafa Yalcin/Anadolu Agency)

La rupture est désormais consommée depuis qu’ils ont créé leur propre parti politique, le Rassemblement héritage et modernité. Une douzaine d’anciens caciques du Parti Démocratique Gabonais ont définitivement rompu les ponts avec Ali Bongo, le président sortant, qui brigue un nouveau mandat de sept ans à la tête du pays.
 
«C’est un moment historique. La fin d’une époque», a déclaré Alexandre Barro Chambier, le tout nouveau président du parti qui a quitté la majorité présidentielle.
 
Des démissions en cascade
Parmi les anciens barons du pouvoir gabonais qui ont quitté le navire figure Guy Nzouba Ndama. Considéré comme l’un des hommes forts du régime, il occupait le poste de président de l’Assemblée nationale depuis 19 ans. Il n’a pas apprécié la mise à l’écart de trois députés frondeurs du parti présidentiel, accusés d’indiscipline notoire.
 
«Je crois qu’on est passé de la main du fondateur du parti, personnalité expérimentée comme l’a été Omar Bongo, à une nouvelle génération avec Ali Bongo, qui n’a peut-être pas la même maîtrise de la gouvernance interne»,  analyse le sociologue gabonais Anaclet Bissiolo, au micro de RFI.
 
La tension était montée lorsque les trois députés, soutenus par certains de leurs collègues et quelques anciens ministres, ont créé un courant contestataire au sein du parti présidentiel. Ils dénonçaient sans détour, la gestion des affaires de l’Etat par le président Ali Bongo.
 
Depuis, on a assisté à une véritable hémorragie au sein du PDG. Plusieurs autres députés frondeurs de la majorité présidentielle les ont rejoints et se sont regroupés derrière l’ancien président de l’Assemblée nationale, Guy Nzouba Ndama. C’est lui qui a été choisi pour défendre les couleurs de leur nouveau parti à la présidentielle 2016.
 

Guy Nzouba Ndama, le président démissionnaire de l’Assemblée nationale du Gabon (premier à droite). C’est lui que les frondeurs, qui ont créé leur propre parti, ont chargé de défendre leurs couleurs lors de la présidentielle. (Photo AFP/Yanick Maniengui)

La liste des opposants s’allonge
Désormais, les anciens barons du pouvoir gabonais sont nombreux à contester le leadership d’Ali Bongo. Anciens cadres du parti, anciens premiers ministres, anciens ministres de feu le président Omar Bongo, tous ne visent qu’une chose : chasser son fils Ali Bongo du pouvoir.
 
C’est le cas de l’opposant Zacharie Myboto. Le président de l’Union nationale et ancien collaborateur du président Omar Bongo appelle le peuple gabonais à se lever contre celui qu’il qualifie de «faussaire», en faisant référence à l’acte de naissance du président sortant.
 
«Vous ne pouvez pas utiliser des documents qui sont faux pour prouver que vous êtes gabonais… Nous devons prendre conscience qu’on n’a pas besoin d’avoir une candidature qui soit inconstitutionnelle. Ce n’est pas sorcier», martèle l’opposant gabonais au micro de RFI.
 
La querelle judiciaire autour de l’acte de naissance d’Ali Bongo est loin d’être terminée. Ses détracteurs ne lâchent pas prise à quelques mois de la présidentielle. Pour le président sortant, Ali Bongo, ce sont tous "des professionnels de la critique et du mensonge".
 
«Au lieu de venir nous proposer autre chose, on vient nous parler de fausses histoires de papiers, des histoires à dormir debout…Vous savez qui je suis. Je ne suis pas quelqu’un qui a débarqué d’une autre planète…Je ne suis pas un fantôme», a déclaré le président Ali Bongo qui lançait sa campagne le 8 Février 2016 à Franceville. Il a qualifié l’acharnement sur son acte de naissance de «stupide et ridicule».
 
Une opposition en ordre dispersé
Autre figure de l’opposition gabonaise, Jean Ping, ancien premier ministre et ancien président de la Commission de l’Union africaine. Désigné comme candidat unique du Front uni de l’opposition pour l’alternance, il ne fait pas l’unanimité au sein de cette vaste coalition.
 
De nombreux poids lourds du Front ont ouvertement dénoncé sa désignation annoncée le 15 Janvier 2016. Ils lui reprochent de faire cavalier seul et de ne pas respecter le calendrier fixé par la coalition.
 
Jean Ping peut désormais s’appuyer sur un nouveau parti politique : «Démocratie Nouvelle» lancé le 28 Avril 2016 pour soutenir sa candidature.
 
«Le but est de regrouper l’opposition trop dispersée» explique à Jeune Afrique l’ancien ministre René Ndemezo’o Obiang qui a quitté la majorité présidentielle en Février 2015.
 
A quelques mois de la présidentielle, plusieurs opposants veulent en découdre avec le président sortant. Au moins quatre candidats se sont déjà positionnés sur la ligne de départ. Une opposition en ordre dispersé qui pourrait faciliter la tâche au président Ali Bongo.  Rien n’est encore joué, affirme le journal  Le Pays du Burkina Faso :
 
«Il est une caractéristique commune à toutes les oppositions africaines : plutôt que d’unir leurs forces, elles s’illustrent par des querelles de chiffonniers. Or il s’agit d’un scrutin à un seul tour» rappelle le journal qui estime que le président sortant Ali Bongo a toutes les chances de l'emporter si l’opposition n’arrive pas à accorder ses violons.
 
 

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.