Tour de France: des supporters érythréens applaudissent leurs coureurs
Dimanche 26 juillet dans l’après-midi. Il pleut. Les Champs-Elysées sont bouclées à la circulation. Soudain, on voit s’agiter des drapeaux qui ressemblent à ceux de la Colombie. On se dit : «Chic. On va avoir l’occasion de discuter avec des fans de Nairo Quintana», second au classement général.
On demande à ces fans, enthousiastes, d’où ils viennent. «We come from Erythrea ! Do you know Erythrea ?» («Nous venons d’Erythrée. Vous connaissez l’Erythrée ?»), répondent-ils, joyeusement. On sait à peu près localiser cet Etat, situé dans la Corne de l’Afrique…
Deux femmes, dont l’une aux vêtements blancs, arborent fièrement les couleurs de son pays. «Nous avons deux coureurs engagés dans le Tour, Daniel Teklehaimanot et Merhawi Kudus (qui ont terminé respectivement 49e et 84e du classement général, Ndlr). Ils appartiennent à l’équipe sud-africaine MTN-Qhubeka. Nous en sommes très fiers !», explique le voisin de la dame. Effectivement, ils en ont l’air. Et font plaisir à voir.
Survient le peloton qui passe, majestueusement. «Erythrea ! Erythrea !», s’époumonne le groupe.
L'Erythrée, indépendante depuis 1993, possèderait une culture cycliste issue de la colonisation du pays (1885-1941) par l'Italie. «L'Italie a introduit le vélo en 1920. Depuis lors, le deux-roues fait partie de notre culture et de notre vie. Erythrée et vélo sont indissociables», a affirmé à l’AFP le commissaire aux Sports du pays, Zemede Tekle. Toujours est-il que quelques semaines plus tôt, Teklehaimanot avait créé la sensation en juin en remportant le classement de la montagne du Dauphiné.
Aux dires de l’AFP, les premiers coups de pédales érythréens dans la plus grande course du monde ont suscité un bel engouement dans cet Etat reclus des hauts plateaux est-africains, parfois appelé la «Corée du Nord» des sables. «C'est un jour extraordinaire pour notre pays, l'un des plus importants de son histoire, une journée dont tous les Erythréens se souviendront», avait expliqué le commissaire aux Sports le 4 juillet lors du départ du Tour à Utrecht (Pays-Bas).
Apparemment, Zemede Tekle était accompagné de supporteurs. Les membres du groupe des Champs-Elysées racontent en effet qu’avant de venir applaudir leurs compatriotes sur les Champs, ils se sont rendus aux Pays-Bas. Et qu’ils vont rester en France encore une semaine. On leur fait remarquer qu’il ne doit pas être très facile de quitter légalement la dictature de Issaias Afewerki, «mélange de Staline et d’Ubu roi». «C’est faux!», répondent-ils, à l’unisson. Ce n’est pas forcément ce que pensent leurs concitoyens : en 10 ans, plus de 300.000 Erythréens (sur une population de 6 millions d'habitants) auraient ainsi pris la fuite. Des Erythréens qui «votent avec leur pied», comme l’on disait des Allemands de l’Est qui passaient à l’Ouest avant la construction du Mur de Berlin en 1961…
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