Un différend qui met de l'eau dans le gaz entre Israël et l'Egypte
Jusqu’à la chute d’Hosni Moubarak le 11 février 2011, l’opinion publique égyptienne ne montrait pas d’hostilité revendiquée à l’égard de son voisin.
Un incident de frontière en août 2011 – cinq soldats égyptiens et huit Israéliens tués – a provoqué de violentes manifestations anti-israéliennes, allant jusqu’à la mise à sac de l’ambassade israélienne du Caire.
Le 22 avril 2012, la rupture du contrat gazier conclu entre les deux pays en 2005 a fait le reste. C’est un contentieux commercial pas diplomatique, a-t-on clamé côté israélien. Certes, mais un contentieux qui tend un peu plus les relations bilatérales.
Mais de quoi s’agit-il exactement ?
Israël fait venir d'Egypte 43% de son gaz naturel grâce à un gazoduc qui traverse le nord du Sinaï. Interrompues pendant le soulèvement populaire début 2011, les livraisons ont repris en mars de la même année, mais les sabotages du gazoduc – quatorze en un an – se sont multipliés depuis.
En 2012, le gouvernement égyptien a annulé les livraisons en raison, selon lui, du non-respect de certaines clauses du contrat de 2,5 milliards de dollars. Ce contrat porte sur la vente annuelle pendant 15 ans de 1,7 milliard de mètres cubes de gaz naturel à la compagnie électrique israélienne via un consortium israélo-égyptien.
Le Caire a indiqué ensuite être disposé à reprendre ses exportations vers l'Etat hébreu. Mais cette fois, à «un nouveau prix et de nouvelles conditions». La fourniture de gaz égyptien à Israël, négociée sous le règne d’Hosni Moubarak, fait depuis longtemps l’objet de critiques en Egypte, où l’on estime que son prix a été sous-évalué.
Les conditions de négociations dudit contrat font partie du dossier à charge contre Hosni Moubarak et ses fils, Alaa et Gamal.
Instabilité dans le Sinaï
La région, peuplée en grande partie par des Bédouins armés, longtemps marginalisés et réprimés sous le régime de Moubarak, est en proie à une insécurité grandissante depuis la chute du régime.
L'armée égyptienne y est assez peu présente en raison de la démilitarisation de ce secteur, prévue par les accords de paix israélo-égyptiens de 1979. L'Egypte a récupéré le Sinaï dans le cadre des accords de Camp David (vidéo), conclus par le président égyptien Anouar el Sadate et le Premier ministre israélien Menahem Begin en 1978 et signés l’année suivante.
Mais le peuple n’a pas réellement profité de cette rétrocession. Elle a été plutôt favorable aux proches du régime de Moubarak qui ont investi dans les lucratives stations balnéaires au bord de la mer Rouge.
« L'accord de fourniture de gaz ne fait pas partie de l'accord de paix, mais c'est un important contrat commercial qui montrait la stabilité des relations entre les deux Etats», selon le ministre israélien des Affaires étrangères, Avigdor Lieberman.
L'approvisionnement en gaz, source de discorde
Euronews, le 23 avril 20012
Des élections qui pourraient changer la donne
En Egypte, l’armée gouverne depuis la chute d’Hosni Moubarak. Elle a promis de rendre le pouvoir aux civils à l’issue du scrutin présidentiel qui doit se dérouler les 23 et 24 mai (1er tour) et 16 et 17 juin (2e tour).
Si les islamistes, bien placés pour le scrutin à venir et majoritaires au Parlement, disent n’avoir aucune volonté de remettre en cause la paix entre les deux pays, ils voient dans la normalisation des relations une trahison de la cause arabe. Et ils s’accordent pour dénoncer l’accord gazier. Plusieurs candidats à l'élection présidentielle ont également salué l'arrêt de ces ventes.
Inquiets, les Israéliens ont renforcé leur armée au sud
En mars 2012, Israël a annoncé avoir déjoué en quelques mois «plus de dix tentatives d'attaques» en provenance du désert égyptien.
Le 24 avril, Avigdor Lieberman plaidait pour le déploiement de renforts israéliens sur zone, arguant avoir «laissé l'Egypte stationner sept bataillons de plus que le quota fixé par l'accord de paix pour renforcer son contrôle et la sécurité dans le Sinaï.»
Selon lui, la situation du Sinaï est aujourd’hui plus préoccupante que celle de l'Iran. Des propos qui lui ont attiré les foudres du Caire qui n'a pas, à la différence de Téhéran, l'arme nucléaire.
De son côté, le maréchal Mohamed Hussein Tantaoui, chef des militaires au pouvoir en Egypte, a prévenu : «Nous n'attaquons pas les pays voisins mais nous défendrons notre territoire.»
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