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La répression s’abat à nouveau sur l’Egypte dans l’indifférence internationale

En Egypte, après les manifestations du week-end dernier, le pouvoir a lancé une vague d’arrestations contre les opposants, et essaie de cacher cette information.

Article rédigé par franceinfo - Jean-Marc Four, Édité par Thomas Pontillon
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Des manifestants en Egypte le 20 septembre 2019 au Caire.  (STR / AFP)

Après les manifestations du week-end dernier en Égypte, 516 personnes au total auraient été arrêtées depuis 48 heures, selon les estimations d'une ONG égyptienne, le Centre égyptien pour les droits économiques et sociaux. Et ce chiffre devrait encore grossir, car les interpellations continuent. Le tout se déroule sous le boisseau : l’accès à l’information est très compliqué.

Les premières manifestations en cinq ans

Cette vague de répression fait suite aux manifestations surprises du vendredi 20 septembre dans la soirée au Caire et samedi soir à Suez, les premières du genre depuis plus de cinq ans dans ce pays de 100 millions d’habitants, mis en coupe réglée par le régime d’Abdel Fattah al Sissi. Plusieurs centaines de jeunes Egyptiens ont défilé aux cris de "Sissi dégage", alors que tout rassemblement de plus de 10 personnes est interdit.

La police a répliqué avec des gaz lacrymogènes, comme en témoignent plusieurs vidéos postées sur les réseaux sociaux. Et dans la foulée, la répression n’a donc pas tardé. Parmi les personnes interpellées, une figure des droits de l’homme depuis 10 ans. Il s'agit de l’avocate Mahienour Al Masry, interpellée au Palais de justice, alors qu’elle assistait aux comparutions des premières personnes arrêtées.

L'accès à l'information très difficile 

On est dans un cas d’école de censure par un pouvoir autoritaire. Le signal de plusieurs médias, par exemple la BBC, a été coupé. Le service d’information d’État envoie des menaces à peine voilées aux journalistes étrangers soupçonnés de propager des "informations erronées qui vont au-delà de la vérité". Plusieurs comptes Twitter ont été rendus inaccessibles. Les informations sont donc parcellaires et difficiles à collecter. Pour les autorités, l'objectif est atteint puisque presque personne n’en parle.  

L’enjeu des réseaux sociaux est central. C’est par ce biais que s’opère la mobilisation. En particulier à l’initiative d’un personnage controversé : il s’appelle Mohammed Ali, un ancien acteur reconverti dans le BTP. Il est réfugié en Espagne après avoir fui le pays. Et sur son compte Twitter, il multiplie les vidéos pour dénoncer la corruption du pouvoir. Il a par exemple appelé à une grève dans les universités aujourd’hui et surtout, il appelle à un énorme rassemblement au Caire vendredi prochain pour "la marche du million".

Il est impossible de prédire si cet appel sera suivi. Ce qui est certain, c’est que le pouvoir fait tout pour l’éviter, d’où ces arrestations en masse. Mais en face, il est tout aussi certain qu’une partie de la population est excédée par l’absence de libertés publiques. On estime que depuis cinq ans, plus de 60 000 personnes ont été arrêtées : des militants des Frères Musulmans mais aussi des militants des droits de l’homme.

La population est aussi excédée par la situation économique et sociale qui ne cesse de se dégrader malgré les promesses du pouvoir : aujourd’hui un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté. La suite est donc imprévisible. 

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