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L'exposition "Maroc : une identité moderne" présente les artistes du Groupe de Casablanca
Publié le 01/03/2020 10:08
Mis à jour le 03/03/2020 14:12
Temps de lecture : 1min
Objets traditionnels marocains et œuvres d'un collectif d'artistes d'avant-garde, né en 1965, cohabitent dans une exposition organisée à l’Institut du monde arabe de Tourcoing.
Françoise Cohen, la directrice de l’Institut du monde arabe de Tourcoing et commissaire de l'exposition "Maroc : une identité moderne" présente, jusqu'au 14 juin 2020, une collection d'objets marocains - tapis, textiles, céramiques, bijoux… "De tradition millénaire, la production populaire au Maroc témoigne d’une formidable créativité. (…) Présents dans toutes les sphères de la vie sociale, ces objets expriment une identité, une vision du monde " explique-t-elle. Mais elle a voulu aussi, à travers cette manifestation, mettre en dialogue cet artisanat traditionnel avec des œuvres du Groupe de Casablanca. Ce collectif d'artistes, a révolutionné l'art et sa façon de l'enseigner. Il a permis d'ouvrir dans le système éducatif des cycles d'études à la photographie, au graphisme, à la calligraphie, la céramique, l’architecture... Une démarche pour un art "décolonisé" qui a largement contribué à la construction de l’identité marocaine.
Six œuvres d'acteurs de cette révolution culturelle sont présentées ici.
Entre 1964 à 1970, l’Ecole des beaux-arts de Casablanca est un lieu où se rejoignent aspirations sociales, politiques et artistiques. L'émergence de cette nouvelle conscience est alors instruite par un groupe d'enseignants et artistes : Farid Belkahia, Mohamed Melehi, Mohamed Chabâa. Après avoir été formés à l’étranger, ils veulent réévaluer l’apport de la tradition, l'intégrer à leur démarche avant-gardiste, moderniser la pédagogie, décoloniser l'art dans un pays indépendant depuis 1956. (MOHAMED CHABAA - SOCIETE GENERALE MAROC)
Ces pionniers veulent ainsi concrétiser un "programme (qui) met en avant l’étude et la réappropriation du patrimoine artistique populaire et traditionnel, ainsi que la réhabilitation de la figure de l’artiste-artisan, conformément à la tradition nationale et aux principes du Bauhaus. Imprégné de l’esprit du Bauhaus, Mohamed Melehi prône un art qui n’est pas limité à sa dimension esthétique ou formelle, mais apte à contribuer à la transformation de la réalité sociale. Parallèlement à leur engagement au sein de l’école, ils présentent en 1965 une exposition collective qui donnera la naissance au Groupe de Casablanca", précise le site Bauhaus imaginista. (MOHAMED MELEHI / COLLECTION PARTICULIERE)
Comme l'écrit C&, magazine spécialiste de l’art contemporain africain, le Groupe de Casablanca s'est "fait connaître pour son enseignement novateur qui refuse l’héritage académique occidental de la peinture de chevalet au profit d’un vocabulaire artistique abstrait, selon une démarche qui n’appartient ni à la tradition formaliste, ni à aucun ordre préexistant. Au fondement de leur pédagogie réside la nécessité de réaliser une reformulation de la radicalité révolutionnaire des avant-gardes historiques en prenant compte des données culturelles et historiques du Maroc avec ses composantes berbères, arabo-africaines et méditerranéennes." (HOUSSEIN MILOUDI - COLLECTION PARTICULIERE)
Pour cela, le choix des matériaux (peau, cuivre…) dans leurs créations, les signes du tifinagh (écriture utilisée par les Berbères pour écrire leur langue, le tamazight), mais aussi les motifs des tapis ou les tatouages traditionnels au henné, ont participé à la création d'un nouveau langage pictural. Ce courant a permis d'amorcer "de nouvelles voies vers l'abstraction expérimentale, le volume, la fresque, les arts appliqués, la typographie, le design d’intérieur" ajoute le site La Colonie. (FARID BELKAHIA, ADAGP PARIS)
Comme l'explique Patrick Scemama, journaliste culturel et critique d'art : "Nourris de l’abstraction occidentale de Klee ou de Kandinsky, tout autant du Futurisme italien, que de (l'expressionnisme abstrait, NDLR) de De Kooning … (ces artistes) envisagent d’inclure leur patrimoine dans une modernité qui leur est propre. Et c’est aussi, bien évidemment, après l’indépendance de leur pays, une manière d’affirmer une identité marocaine qui s’affranchisse du colonialisme et s’inscrive dans le panarabisme, la conscience de l’appartenance claire au camp africain." (RACHID DEMNATI - SOCIETE GENERALE MAROC)
Très vite d'autres membres ˗ Houssein Miloudi, Rachid Demnati, Mohamed Hamidi Mohamed Ataallah, Mustapha Hafid… ˗ vont rejoindre le collectif et participer intensément à cette modernité marocaine revendiquée. Plusieurs manifestes verront le jour dans les années 1970 et donneront naissance à un mouvement qui dépassera largement le cadre artistique.
(PHILIPPE MIGEAT - CENTRE POMPIDOU, MNAM-CCI / DIST. RMN-GP)
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