Côte d’Ivoire : des Africains se mobilisent pour faire libérer Laurent Gbagbo
La dernière pétition a été lancée le 30 juillet 2016 depuis le Cameroun, dans la ville de Bamenda. C’est le fief de John Fru Ndi, le chef du principal parti de l’opposition (SDF).
Le vieil opposant a réuni ses principaux collaborateurs pour annoncer que son parti voulait obtenir auprès des Camerounais, un maximum de signatures de soutien pour réclamer la libération de Laurent Gbagbo. L’ancien chef de l’Etat ivoirien est emprisonné depuis 2011 à La Haye. Il est jugé à la CPI pour crimes contre l’humanité commis lors de la crise post-électorale de 2010-2011 dans son pays.
Pour le chef de l’opposition camerounaise, la réconciliation en Côte d’Ivoire ne peut avoir lieu sans Laurent Gbagbo, considéré comme le père du multipartisme en Côte d’Ivoire.
«Après un conflit entre deux personnes, où il y a eu des morts, on ne doit pas envoyer les gens d’un camp en prison et laisser libres ceux de l’autre camp…En l’absence de tous les acteurs responsables de la crise qui a secoué la Côte d’Ivoire, toutes les décisions prises à la Haye n’auront aucune légitimité», a indiqué un porte parole du SDF, le parti de John Fru Ndi.
Il ne s’agit pas de faire revenir Laurent Gbagbo au pouvoir, précise le SDF qui accuse la Cour pénale internationale de partialité.
«Le Moyen Orient et l’Afrique du nord font face à des crimes de toutes sortes, sans que ceux qui ont provoqué ces situations ne soient inquiétés par la CPI, soutient le SDF dans les colonnes du journal camerounais La Nouvelle Expression.
«Le combat de la liberté»
C’est une personnalité très respectée en Côte d’Ivoire, l’écrivain centenaire Bernard Dadié, qui a donné le coup d’envoi de cette campagne internationale. Il espère recueillir 22 millions de signatures en Côte d’Ivoire et partout dans le monde en vue d’exiger la libération de Laurent Gbagbo.
Pour l’initiateur de la pétition, «c'est le combat de la liberté, de la fraternité et de la réconciliation», qui est en cours. Il s’agit, explique-t-il, d’un devoir de conscience devant l’Histoire. Il veut accompagner «ce vaste mouvement de résistance face à l’imposture».
Partenaire de cette campagne aux côtés de Bernard Dadié, l’ancien Premier ministre togolais Joseph Kokou Koffigoh dénonce l'arrestation et la déportation d’un homme considéré par beaucoup d’Africains «comme étant l’un des pionniers de la démocratie africaine».
Parmi les signataires de la pétition figurent d’anciens hommes d’Etat, comme l'ancien chef de l'Etat ghanéen Jerry Rawlings, des hommes politiques et de nombreux intellectuels africains. C’est le cas de la romancière d’origine camerounaise Calixte Beyala qui s’insurge contre la CPI, la Cour pénale internationale, qui «n’existe que pour les africains».
«Le parcours du combattant»
Alphonse Douati est coordonateur de la pétition lancée le 22 Juin 2016 à Abidjan. Il affirme qu’en quelques semaines la campagne a suscité un réel enthousiasme dans le pays même si la tâche s’avère parfois difficile.
«C’est un véritable parcours du combattant qui nous est servi, déclare Alphonse Douati à l’agence Sputnik. Le secrétaire général du Front Populaire Ivoirien, le parti de Laurent Gbagbo, dénonce «la saisie de fiches de pétition vierges, la destruction de 500.000 fiches signées, des brimades, des bastonnades, des arrestations et incarcérations au quotidien. Trois jeunes gens ont été incarcérés à la prison centrale d’Abidjan pour cause de pétition et libérés après une semaine pour délit non constitué», se plaint-il.
Il espère que la pétition internationale lancée finira par interpeller les pays membres du Conseil de sécurité comme la Russie pour soutenir une action qui concourra à la libération de Laurent Gbagbo et de tous ceux qui sont incarcérés «au seul motif qu’ils sont adeptes de ses idées»
«La justice des vainqueurs»
Avant le lancement de cette campagne de pétitions, deux anciens chefs d’Etat africains s’étaient directement adressés à la procureure de la CPI, Fatou Bensouda, le 9 Septembre 2015. Dans une longue lettre, les ex-présidents du Mozambique, Joachim Chissano et du Bénin, Nicephore Soglo, mettaient en garde contre «le prolongement à la CPI de la justice des vainqueurs».
«La Cour pénale internationale est perçue par une grande partie d’Ivoiriens et de la société africaine comme ayant été cooptée par une faction politique pour neutraliser Laurent Gbagbo et son parti», écrivaient les deux anciens chefs d’Etat.
Pour eux, Laurent Gbagbo reste un acteur-clé dans la recherche collective de la réconciliation et de la stabilité en Côte d’Ivoire.
Tous les défenseurs de Laurent Gbagbo veulent montrer au monde que sa place n’est pas dans une cellule de la CPI, mais bien auprès des siens. Ils espèrent le voir regagner bientôt sa terre natale.
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