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Bénin : avec la mort du roi Agoli Agbo, «la fièvre s’est emparée du royaume»

30.000 personnes ont assisté les 11 et 12 août 2018 à Abomey-Calavi à une cérémonie en l’honneur du roi Agoli Agbo, souverain du royaume d’Abomey (sud du Bénin), mort le 2 juillet. Désormais, il va falloir lui chercher un successeur. Et ce ne sera apparemment pas une mince affaire.
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
Cérémonie en l'honneur du défunt roi d'Abomey au Bénin, Agoli Agbo, le 11 août 2018. (YANICK FOLLY / AFP)

«Il fait nuit sur le royaume», a lancé le Premier ministre du royaume d'Abomey, dans le sud du Bénin, à quelque 30.000 personnes venues se recueillir pour marquer la disparition du souverain local, Dadah Dédjalagni Agoli Agbo.

«Dans la tradition, on dit que la fièvre s'est emparée du royaume tant que la mort du roi n'a pas été officialisée par des cérémonies», fait observer Dah Sodjo Kehounhon, ministre à la Cour et superviseur des festivités. «Le décès du roi est synonyme d'une nuit qui tombe sur le royaume et le plonge dans l'obscurité. Il n'y a plus de manifestations grandioses ni aucune réjouissance tant que les cérémonies du roi n'ont pas pris fin», précise-t-il.
           
Ces cérémonies doivent durer au moins six mois. Après le week-end des 11 et 12 août, elles se dérouleront dans la plus grande intimité.
           
Le long de la cour extérieure du palais royal, dignitaires, princes et gardiens du culte, torses nus, pagnes noués, se sont assis en tailleur sur deux longues colonnes. Puis, la foule a assisté a l'immolation d'une chèvre, suivie de coups de gong signifiant le début du recueillement.
           
De nombreux députés et membres du gouvernement ont également fait le déplacement jusqu'à Abomey, capitale de ce royaume vieux de quatre siècles, autrefois connu sous le nom de royaume du Dahomey (ancien nom du Bénin).

Le roi d'Abomey Agoli Agbo le 26 juin 2015 (AFP - JEAN-PIERRE DE MANN / ROBERT HARDING HERITAGE / ROBERTHARDING)

«Un roi réformateur»
«Sous les douze rois qui se succédèrent de 1625 à 1900, ce royaume s'affirma comme un des plus puissants de la côte occidentale de l'Afrique», rapporte le site de l'Unesco. Aujourd’hui, les palais royaux sont inscrits au Patrimoine mondial de l’organisation onusienne.

De nos jours, la Constitution béninoise ne reconnaît pas de pouvoir politique aux rois et autres chefs traditionnels. Mais ils conservent une grande influence sur la vie de la cité, notamment sur le plan religieux. Ainsi les dignitaires vaudou font allégeance au roi d’Abomey. «Les têtes couronnées, comme on les appelle au Bénin, ne dirigent plus de royaume mais elles gardent un rôle important. Elles aident les autorités à résoudre des crises et sont très courtisées à l’approche des élections», observe RFI

De fait, signe de l’influence du roi d’Abomey, «les politiques le considèrent comme un très grand électeur et viennent le voir à chaque veille de scrutin», précise le site de RFI.

Le souverain défunt imposait le respect à ses sujets par sa carrure et sa prestance.

Après son accession au trône en 1989, il a travaillé à la rénovation de plusieurs palais, dont certains sont devenus une priorité pour le développement touristique du petit pays d'Afrique de l'ouest. «C'était un roi réformateur qui estimait que les enfants du royaume devaient s'intéresser à la coutume et à la culture», explique l’un de ses descendants, Didier Samsom. Il a travaillé «à rendre la cour plus moderne et dépoussiérer la tradition», ajoute-t-il.

Béhanzin, roi du Dahomey. Extrait du Petit Journal, supplément du dimanche 23 avril 1892. (AFP - LE PETIT JOURNAL / RETRONEWS-BNF / BNF-PARTENARIATS)

Héritier d'une longue lignée de monarques, Agoli Agbo est l’un des successeurs du roi Béhanzin. Au XIXe siècle, ce dernier avait combattu les Français qui l’avaient déporté (et avaient pillé son palais) lors de la lutte coloniale, mettant ainsi fin au pouvoir politique du royaume. Son descendant avait accédé au royaume après une longue période de pouvoir transitionnel pour tenter d'apaiser les disputes au sein de la famille royale.

Au terme des cérémonies en l’honneur du souverain disparu, son successeur devrait être connu et révélé au public. Mais tous craignent des intrigues fratricides lors du processus de succession. Comme cela a été souvent le cas: toutes les communautés du royaume doivent se mettre d'accord pour désigner leur nouveau souverain. Cette fois, pour désigner son successeur, «on pourrait au besoin consulter le Fâ», l'esprit vaudou, souffle-t-on à la Cour.

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