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Afrique : le solaire pour les établissements de santé et les futures mamans
La lutte contre le réchauffement climatique passe par le développement des énergies renouvelables. Compte tenu du caractère erratique de la fourniture en électricité dans certains pays africains, le solaire est devenu une alternative pour les établissements de soins, notamment en matière de santé maternelle.
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Une couveuse qui ne fonctionne pas parce qu'il n'y a pas d'électricité dans l'hôpital et la méthode naturelle – celle de réchauffer son bébé avec son corps – devient salvatrice. Rukayya Muhammad, en charge du changement climatique et de la santé au ministère nigérian de l'Environnement, qui participe à la COP21, en a fait personnellement l'expérience.
«L'un des défis que le Nigeria doit relever est la fourniture en électricité. Si nos hôpitaux se tournaient vers l'énergie solaire, qui est une énergie propre, cela aiderait les populations aussi bien dans les zones rurales qu'urbaines. Au lieu d'utiliser des groupes électrogènes qui polluent, nous opterions pour le solaire qui serait plus fiable, plus performant, permettrait de créer des emplois et plus largement, réduirait les risques de maladie qui découlent de la pollution de l'air», explique-t-elle. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), l'utilisation de kérosène pour éclairer les établissements de santé est largement répandue en Afrique. Un usage qui présente des risques sanitaires parce qu'il est source de pollution. D'après l'OMS, la pollution atmosphérique tue 7 millions de personnes dans le monde par an.
Près d'un tiers des établissements de santé au Nigeria n'ont pas d'électricité
L'agence des Nations Unies s'est penchée sur la question de la fourniture en électricité des établissements sanitaires dans 14 pays en développement, dont 11 en Afrique sub-saharienne. Ainsi, en moyenne dans ces pays africains, un établissement sanitaire sur 4 n'a pas accès à l'électricité (26%). Seulement 28% des établissements de santé et 34% des hôpitaux peuvent compter sur une fourniture fiable en électricité (à savoir pas d'interruption de plus de deux heures pendant la semaine précédente). L'étude, qui porte sur 4000 infrastructures sanitaires publiques ou privées, a montré que plusieurs centaines utilisaient ainsi le solaire comme première source d'énergie ou de façon alternative. En Ouganda,15% des hôpitaux font appel à cette énergie pour compléter leur fourniture en électricité. En Sierra Leone, 36% des établissements de soins et 43% des hôpitaux combinent le solaire avec d'autres sources d'énergie.
Au Nigeria, ce sont 30% des établissements de santé qui n'avaient pas accès à l'électricité en 2011. Ce sont les difficultés de ce pays en matière d'énergie et de santé maternelle et infantile qui ont inspiré le travail de l'ONG We Care solar. L'organisation a été distinguée en septembre 2015 par les Nations Unies lors de la première édition du prix Powering the Future We Want – Recognizing Innovative Practices in Energy for Sustainable Development award (pratiques innovantes dans le développement durable).
De l'énergie solaire en kit
D'après une enquête commune d'agences des Nations Unies (Tendances des estimations de la mortalité maternelle de 1990 à 2013) publiée en 2014, dix pays concentrent 60% des décès maternels dans le monde. Le Nigeria, avec 40.000, est le deuxième pays après l'Inde (50.000). En 2008, la cofondatrice de l'ONG We Care Solar, le docteur Laura Stachel, se rend dans le nord du Nigeria pour faire une étude sur la façon dont la mortalité maternelle peut-être réduite dans les hôpitaux publics. Elle constate très vite que les coupures d'électricité empêchent une bonne prise en charge des femmes enceintes. La nuit, elles accouchent pratiquement dans le noir ou les césariennes sont annulées ou effectuées à lueur d'un rai de lumière.
Laura Stachel fait alors appel à l'expertise de son époux dans le domaine solaire. Il conçoit alors des «valises solaires» (We Care solar Suitcase®). Elles contiennent, entre autres, un kit de production et un doppler fœtal. Les sages-femmes nigérianes seront les premières à recevoir ces valises.
«A la date de novembre 2015, près de 1300 valises solaires ont été distribuées dans 27 pays», peut-on lire sur le site de l'ONG qui a lancé des programmes en Sierra Leone, en Ouganda, au Malawi, en Tanzanie, au Népal, en Ethiopie et aux Philippines. Le Ghana devrait être la prochaine étape de l'ONG en 2016.
Cependant, si le solaire constitue une alternative énergétique pour les établissements de santé, il n'en demeure pas moins que son développement demeure coûteux, souligne l'OMS. «La plus grande barrière à l'expansion des projets solaires est le coût initial des panneaux photovoltaïques (PV), comparés aux petits groupes électrogènes, en dépit de la baisse du coût du solaire sur la dernière décennie.»
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