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Le sort des traducteurs afghans après le départ de l'Otan
Ils sont afghans, civils, et plus souvent pour le salaire que par conviction, ils ont choisi de travailler pour les troupes occidentales. Aujourd'hui, avec le départ de leurs employeurs, ils se disent en danger de mort et demandent des visas. Leur situation varie selon les pays qui les ont embauchés.
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Trois jeunes traducteurs de l'armée britannique ont du saisir la Haute Cour de justice afin d'obtenir le droit de se réfugier en Grande-Bretagne, afin de fuir la menace des talibans. David Cameron a cédé devant un mouvement qui prenait de l'ampleur. Une pétition a ainsi recueilli 82.000 signatures pour réclamer l'accueil des traducteurs afghans qui ont aidé les troupes de sa Majestée durant l'intervention.
Jusqu'à présent, les Britanniques ne voulaient pas entendre parler d'asile. Ils offraient une aide financière pouvant atteindre 12.000 euros à leurs interprètes et employés afghans estimés à 3.000 personnes.
Désormais, pour répondre à la colère grandissante de l'opinion publique qui considère que le Royaume-Uni n'a guère de reconnaissance, le gouvernement britannique promet des visas de 5 ans à ceux qui ont servi au moins un an.
Ce visa n'est pourtant en aucun cas un droit. Chaque demande sera étudiée au cas par cas. L'extrême danger de rester au pays sera le seul critère. le Royaume-Uni pourrait accueillir ainsi 600 interprètes et leur famille.
Aux Etats-Unis, c'est une loi votée en 2009, qui régit la protection des alliés afghans. Jusqu'en 2014, 1500 visas «d'immigrant spécial» seront accordés aux traducteurs et à leur famille. Mais là aussi, la délivrance n'est pas automatique, et s'appuie sur l'analyse du risque encouru, ainsi que des services rendus.
Quel danger ?
Là est bien la question. Quelle menace plane sur ces hommes ? Probablement considérés – ils le disent eux-mêmes – comme des traitres par les talibans, ces traducteurs craignent les vengeances, une fois les troupes occidentales parties du pays. Mais cette menace est variable selon les lieux où ils ont servi. Dans certaines régions la menace des talibans est inexistante. De plus, Le gouvernement afghan ne souhaite pas voir partir ces hommes. D'une part du fait de leur niveau de formation. Surtout, le président Karzaï veut toujours faire croire à la fable d'un pays pacifié et donc sans risque. Ces départs contredisent la vision officielle d'un pouvoir central qui maîtriserait le risque taliban.
Et la France ?
L'armée française parle de personnels civils de recrutement local (PCRL). Elle a employé 800 personnes depuis le début de l'engagement en Afghanistan. Tous n'ont pas travaillé comme traducteurs, mais la question de leur sécurité s'est posée chez nous aussi pour les Afghans les plus exposés.
En France également, la réponse donnée à la problématique des auxiliaires afghans est variable. Tous ont obtenu une prime de licenciement s'élevant en moyenne à 2.246 euros. En cas de risque, certains ont pu prétendre à une prime de réinstallation dans une autre région d'Afghanistan. Le montant moyen de cette prime est de 1.450 euros pour une famille de trois enfants.
Enfin la délivrance d'un visa ne concerne que les cas les plus exposés.
Un rapport de l'Assemblée nationale de février 2012, donne le chiffre de 70 PCRL concernés, soit 166 personnes en comptant leur famille. Des visas délivrés au compte-gouttes donc, après une longue instruction, par l'autoritée militaire, mais aussi les services du Quai d'Orsay.
Un processus qui a été critiqué pour son côté trop restrictif. D'ailleurs, c'est le chef de l'Etat qui a doublé le nombre de visas initialement accordés. La presse se fait régulièrement l'écho de candidats déboutés qui prétendent être en danger de mort.
Quant à leurs arrivées en France, elle se fait dans le plus grand secret. Elles auraient commencé en janvier 2013, mais aucune communication n'a été faite à ce sujet.
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